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LE SÉMINAIRE DE SAINT-SULPICE

C'est vers la fin de 1641 que Jean-Jacques Olier, abbé de Pébrac, fonda la Compagnie de Saint-Sulpice et créa à Vaugirard un premier séminaire. L'année suivante, il devint curé de Saint-Sulpice et transféra aussitôt cet établissement à Paris. « Une partie des prêtres qui le composaient logeaient dans le presbytère, d'autres dans une maison de la rue Guisarde. L'abbé Olier, voyant s'accroître le nombre de ses prosélytes, sentit la nécessité d'en former deux corps entièrement séparés. Au mois de mai 1645, il acquit une maison, un jardin et un vaste emplacement situé rue du Vieux-Colombier; et après avoir, dans la même année, obtenu toutes les autorisations nécessaires (1), il forma un grand et un petit séminaire. Le petit séminaire fut établi dans des bâtiments contigus à la rue Férou et au cul-de-sac de ce nom (2), le grand le fut dans des bâtiments élevés sur le lieu où se voit aujourd'hui la place Saint-Sulpice. Ces bâtiments n'avaient

(1) Les lettres patentes de la fondation datent de 1645 (Cf. abbé H. Michon, les Séminaires, article dans Paris-Guide, 1867, t. Ier).

(2) L'impasse Férou commençait à la rue Férou et se terminait au revers d'une maison faisant front sur la rue du Pot-de-Fer [actuellement rue Bonaparte]. (Cf. Berty, Topographie du vieux Paris; région du bourg Saint-Germain).

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rien de remarquable (1). » Toutefois Le Brun en avait décoré la chapelle (2).

Par décret du 5 avril 1792, les sulpiciens furent supprimés; ils avaient tous refusé de prêter le serment civique, et, en 1800, les bâtiments qui les avaient abrités disparurent (3). Deux ans après (1802), la Compagnie était rétablie. Elle s'installa à l'angle de la rue du Pot-de-Fer et de la rue de Vaugirard, dans une maison appartenant autrefois aux Filles de l'Instruction chrétienne ou de la Très-Sainte-Vierge, congrégation fondée en 1667 (4).

Le 11 avril 1816, paraissait l'ordonnance suivante :

Louis, par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre, sur le rapport de notre Ministre secrétaire d'État au département

de l'Intérieur.

Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :

ART. I.

Il est fait abandon au séminaire diocésain de Paris, pour l'agrandissement de ce séminaire, du terrain libre ayant appartenu au séminaire de Saint-Sulpice, et formant un triangle qui se prolonge le long de la place Saint-Sulpice, de la rue Férou à celle du Pot-de-Fer; ledit terrain placé entre les murs de clôture de l'ancien petit séminaire et les limites de la place Saint-Sulpice, etc.

ART. 2. Nos Ministres secrétaires d'État de l'Intérieur et des Finances sont chargés de l'exécution de la présente ordon

nance.

(1) Dulaure, Histoire physique, civile et morale de Paris, 1837-1838; t. V et VII; abbé Michon, op. cit.

(2) Abbé Michon, op. cit.; Ernest Renan, Souvenirs d'enfance et de jeunesse.

(3) Dulaure, op. cit.

(4) Dulaure et abbé Michon, op. cit.;- Collection Lazare (Arch. dép. de la Seine), articles séminaire, place Saint-Sulpice et rue Bonaparte.

t

Donné au château des Tuileries le 11 avril de l'an de grâce 1816, et de notre règne le vingt et unième.

Signé : Louis.

Par le Roi, le Ministre secrétaire d'État

de l'Intérieur. Signé : Vaublanc.

Environ trois ans et demi après la publication de cette ordonnance, le 10 septembre 1819, le comte Chabrol, Conseiller d'État, Préfet de la Seine, disait dans son rapport au Conseil général du département, faisant fonctions. de Conseil municipal de la ville de Paris:

Parmi les demandes qui me sont faites avec insistance, je ne dois pas vous laisser ignorer celle de l'établissement d'un séminaire à Paris. L'ancien séminaire a été détruit pour former la place Saint-Sulpice; celui qui existe est singulièrement resserré et même malsain; une partie des élèves est obligée d'habiter la maison de campagne du séminaire, ce qui augmente les frais et rend l'instruction plus difficile. Pour mettre un terme à cet ordre de choses, le Ministère doit contribuer pour une somme annuelle de 200.000 francs, jusqu'à l'achèvement du projet; on espère aussi quelques sacrifices des bontés du Roi; enfin Mar l'archevêque de Paris compte sur le zèle et la charité des fidèles qu'il provoquera après son installation. Ainsi la circonstance paraît favorable à une création qui devient urgente et qui d'ailleurs serait plus tard indispensable et ne présenterait peut-être pas les mêmes moyens d'exécution. La place Saint-Sulpice s'embellira par la décoration des nouveaux bâtiments et deviendra une des plus belles places de Paris (1). Lorsque le projet aura été arrêté, je

(1) Un décret impérial du 24 février 1811 ordonnait l'achèvement << de la formation de la place Saint-Sulpice dans le cours de 1811 ». (Cf. Ville de Paris, Recueil des lettres patentes, ordonnances royales, décrets et arrêtés préfectoraux concernant les voies publiques, dressé sous la direction de Alphand, par A. Deville et Hochereau; Paris, 1886, 1 vol. in-4o, P. 56.)

vous le soumettrai et je réclamerai une allocation qui pourra être imputée sur le fonds de réserve mis à ma disposition (1).

La Gazette de France (2) du dimanche 19 novembre 1820 et le Moniteur du lendemain annoncèrent, à peu près dans des termes identiques, que : « La première pierre du nouveau séminaire de Saint-Sulpice doit être posée, avec pompe, mardi prochain, jour de la Présentation de la Sainte Vierge. M. le Ministre de l'Intérieur la posera au nom de Sa Majesté, après avoir entendu la messe, qui doit être célébrée dans l'église de Saint-Sulpice, par M. le coadjuteur de Paris. »

La cérémonie eut lieu le mardi 21. Le Moniteur du jeudi 23 en rend compte en ces termes :

Hier (3), à 11 heures 1/2, le clergé de Saint-Sulpice, la communauté, les séminaristes de Saint-Sulpice, M. le coadjuteur, M. le cardinal-archevêque, M. le Ministre de l'Intérieur, des archevêques, des vicaires généraux, des chanoines de l'église métropolitaine de Paris, MM. les Préfets de la Seine et de police, MM. les maire et adjoints de l'arrondissement, M. d'Oissel, directeur des travaux publics, M. Godde, architecte des églises de Paris, etc., etc., se sont rendus processionnellement en l'église Saint-Sulpice (4), pour la cérémonie de la pose de la première pierre du nouveau séminaire.

(1) Pour tout ce qui concerne la part contributive de la ville de Paris pour la construction du séminaire de Saint-Sulpice, voir Budget de la ville de Paris pour l'exercice 1820 et compte de ses recettes et dépenses pendant l'exercice 1818, et les dix-sept volumes suivants jusqu'à l'exercice 1839; (18 vol. in-4o; 1820-1839).

(2) La Gazette de France avait ses bureaux et s'imprimait chez Pillet aîné, 5, rue Christine.

(3) On pourrait croire, d'après la date du journal, que c'était le mercredi 22. C'est une erreur de rédaction, il faut lire avant-hier.

(4) D'où partaient-ils? Probablement du séminaire provisoire.

M. le coadjuteur a célébré une messe basse, après laquelle la procession s'est dirigée à l'angle nord-est de l'édifice (1), dont la construction est commencée au midi de la place SaintSulpice, lequel est destiné au grand séminaire de Paris.

La première pierre a été bénie (sic) par M. le cardinal-archevêque de Paris, et posée au nom du roi par S. Exc. le Ministre de l'Intérieur, aux cris de Vive le Roi!

Des médailles en argent représentant la Sainte Vierge, le Roi et le Pape (2), ainsi qu'une pièce d'or de 20 francs, une de 5 francs, une de 2 francs, une de 1 franc, une d'un demifranc et une de 25 centimes en argent, du millésime de 1820, ont été placées, ainsi qu'une plaque de cuivre dans un coffre de bois de cèdre, renfermé dans un autre coffret de plomb, et scellés dans la première pierre, recouverte d'une autre pierre de taille. L'inscription latine, gravée en style lapidaire sur la plaque de cuivre dont nous venons de parler, porte le nom de M. Siméon, Ministre de l'Intérieur, de M. le cardinal de Talleyrand-Périgord, de M. le comte Chabrol de Volvic, préfet de la Seine, de M. d'Oissel et de M. Godde.

La cérémonie a duré une heure et demie.

Nous dirons quelques mots succincts sur certains personnages qui assistèrent à cette cérémonie :

Le coadjuteur qui célébra la messe était le comte Hyacinthe-Louis de Quélen. De 1812 à 1814, il avait été catéchiste à Saint-Sulpice, où il avait prononcé l'oraison funèbre de Louis XVI (1814); coadjuteur en 1817, il devint titulaire de l'archevêché de Paris en 1821.

Le prédécesseur de M. de Quélen, Alexandre-Angélique de Talleyrand-Périgord, cardinal-archevêque de Paris,

(1) C'est-à-dire à l'angle de la place Saint-Sulpice et de la rue Férou. (2) Pour la description des médailles relatives à la reconstruction du séminaire de Saint-Sulpice, voir: Bulletin de la Société, année 1901, PP. 178-179.

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