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heureux présage de l'avenir, et l'année qui commence ne sera pour elle ni moins fructueuse, ni moins studieuse que celle qui finit. Le savant auteur de l'Histoire de l'Arrondissement de Péronne trouvera dans son vice-président un concours aussi empressé et aussi efficace que celui dont je dois, pour mon propre compte, remercier M. le baron de Calonne. Notre nouveau secrétaire annuel n'aura qu'à marcher sur les traces de son prédécesseur pour remplir avec succès une fonction que le bienveillant esprit dont toute la Société est animée rend facile et agréable. Tous auront, d'ailleurs, pour les seconder, le dévouement et le talent de notre si excellent Secrétaire perpétuel qui ne cesse d'apporter à nos travaux le concours d'une vieille expérience, jointe à une activité toujours jeune et toujours infatigable.

Je me reprocherais, Messieurs, de retarder davantage l'installation du bureau; les faits se chargeront de justifier mes paroles et je n'ai plus qu'à vous demander la permission de terminer ma présidence comme je l'ai commencée, en disant à tous: Merci!

Ce discours est vivement applaudi.

M. l'abbé De Cagny répond en ces termes :

MESSIEURS,

En mon absence et malgré mes intentions bien sincères, vous avez daigné néanmoins m'élever å la présidence, pour la session de la grande année 1880! Par cette détermination tout-à-fait imprévue, vous avez eu égard, moins assurément à mon aptitude personnelle, qu'à mes longs services d'antiquaire de Picardie, et au sentiment sans doute de la plus bienveillante sympathie. J'ai donc le devoir de vous remercier cordialement pour cette honorable distinction dont j'étais moins digne que tout autre membre de la Société. Après avoir constamment décliné une position supérieure qui aurait compromis mon amour pour l'étude, je ne

saurais aujourd'hui convenablement opposer au choix accompli d'excellents collègues un refus désobligeant, bien que motivé par mon grand âge; et j'essaierai de remplir la charge importante que vous m'avez confiée, en lui consacrant les faibles restes de mon intelligence, de mon activité d'autrefois. Pour le faire dignement, je n'aurais qu'à suivre les traces de vos présidents antérieurs, s'ils n'étaient pas inimitables; et mon prédécesseur immédiat particulièrement a déployé, dans sa présidence, des qualités si éminentes et dignes de notre gratitude, que j'ai sujet de craindre pour mon infériorité, dont on pourrait dire :

Tel brille au second rang, qui s'éclipse au premier!

Toutefois, cette charge en elle-même serait toujours un fardeau qui pèserait lourdement sur mes vieilles épaules de 76 ans, et finirait par m'accabler, si je n'avais une juste confiance dans votre appui, dans votre concours général et empressé, pour l'exercice de ces difficiles fonctions; si encore, au milieu des luttes irritantes du dehors, nous ne formions ici, dans le calme de cette enceinte, une association cordiale, pacifique, où l'amour du progrès archéologique s'allie si bien à une affable courtoisie, au respect de la tradition!

En particulier, quelle assistance favorable n'ai-je pas le droit d'attendre des collègues bienveillants et distingués que je trouve à mes côtés, dans votre bureau. C'est un trésorier modèle, nouveau Colbert, qui, à l'aide d'habiles combinaisons, a si bien rétabli la prospérité dans nos finances. C'est un Secrétaire perpétuel qui a blanchi sur les travaux archéologiques et dans la direction des affaires de la compagnie, dont il est devenu l'administrateur justement consolidé. A sa suite, je pourrai dire avec le poète : Nil desperandum, Teucro duce et auspice Teucro! Ensuite, par un choix vraiment sage et opportun, vous avez élu pour Vice-Président un écrivain renommé et plein d'avenir, dont le bras vigoureux pourra me soutenir, si je venais à chan

celer; et, pour Secrétaire annuel, un jeune et ardent archéologue qui attendait impatiemment son appel à l'activité. Que de motifs propres à me rassurer et à m'inspirer l'espérance de pouvoir concourir avec vous à l'honneur, à la prospérité de notre corps savant!

Car, j'en ai conservé le souvenir, après la guerre néfaste de 1870, il avait paru décheoir un instant de son prestige antérieur, de son ancienne et haute réputation. Même par des épigrammes assez futiles, un journaliste de l'époque avait ridiculisé nos réunions annuelles qu'il représentait comme des assemblées abstraites, sombres et froides, à l'égal de tombeaux, etc. Grâce à Dieu, l'assistance nombreuse et honorable de la séance publique de 1879 a donné une nouvelle preuve de sa réhabilitation dans l'opinion publique ; et nous avons le devoir de seconder courageusement cette réaction favorable, afin de ne point dégénérer de nos illustres fondateurs.

A cet effet, puissions-nous ne jamais oublier que le diplôme d'Antiquaire de Picardie n'est pas un simple et vain titre honorifique, et que noblesse oblige! Un titulaire de plus dans les membres non résidants, ce n'est pas seulement un nouveau souscripteur, un abonné platonique à nos publications; mais bien plutôt, selon l'esprit de nos statuts, un délégué, un représentant de la compagnie, dans sa contrée respective, pour en approfondir l'histoire locale, pour en signaler et surveiller les découvertes dignes d'intérêt. Car (on ne saurait le méconnaître), les manuscrits, les vieilles chroniques et les archives communales n'ont pas révélé tous leurs secrets; et le sol de notre pays recèle encore d'immenses trésors d'antiquités. Quel relief honorable pour le monument archéologique des Mémoires et Bulletins des Antiquaires de Picardie, si tous, sans exception, et chacun dans sa spécialité, nous pouvions y incruster notre pierre scientifique, sculptée et signée par son auteur.

C'est ainsi que, dans son genre, notre actif et généreux collègue, M. Gédéon de Forceville, vient d'apporter encore non-seulement sa pierre, mais aussi son marbre, son airain, son or, et surtout son art et son courage invincible, pour élever le monument grandiose des Illustrations Picardes: travail immense qui perpétuera le souvenir des célébrités de notre province, et l'honneur même de notre compagnie dont le doyen d'âge, octogénaire, a pu, au déclin de sa carrière, concevoir et exécuter personnellement, à ses frais exclusifs, un aussi vaste et incomparable projet.

Pour ce résultat bien favorable, je ne saurais formuler que des vœux; mais, par rapport à la présidence que vous avez bien voulu me confier, je puis donner une assurance de mon zèle et de mon dévouement, dans la mesure du possible, afin de maintenir au moins la Société à ce degré de considération et de prospérité où je la trouve en ce jour de mon installation. Dans l'hypothèse d'insuccès, j'obtiendrais toujours une consolante justification dans la seconde partie de cette belle sentence de Massillon: Le pouvoir sans la volonté fait des coupables; mais la volonté sans le pouvoir fait des malheureux !

Ce discours est accueilli par les applaudissements de la Société.

- M. le Trésorier, obligé de se rendre comme témoin devant la Cour d'Assises de Paris, exprime son regret de ne pouvoir présenter le compte de l'exercice 1879 à la séance de ce jour.

- M. l'abbé De Cagny nomme, pour le remplacer dans la Commission des recherches, M. de Jancigny.

- D'après l'usage, on procède à l'élection des membres de la Commission d'impression. Le dépouillement du scrutin donne le résultat suivant: MM. Garnier, l'abbé Duval, l'abbé Crampon et Darsy ayant obtenu la

majorité absolue sont nommés membres de cette Commission, qui se trouve complétée par l'élection de M. H. Josse au second tour de scrutin.

Sur la proposition de M. le Président, M. Le Tellier, ancien membre résidant, est nommé membre honoraire.

M. Poujol de Fréchencourt donne l'analyse d'un titre existant dans les archives du château de Bertangles. C'est un traité passé le 27 janvier 1706 entre messire Jean de Pujol, capitaine de cavalerie au régiment de Tarente, et messire Louis-Joseph, premier marquis de Clermont-Tonnerre. Ce dernier fait l'achat, moyennant 8,000 livres, de la compagnie du sieur de Pujol. Elle se compose de 32 hommes et de 35 chevaux. Le titulaire doit commencer par donner sa démission en faveur de celui avec lequel il traite pour le faire agréer par l'inspecteur et par le colonel. A cette époque le prix des chevaux pour l'armée était d'environ 270 livres. La selle du cavalier valait 15 livres, le mors avec les étriers coûtait 4 livres.

-M. Janvier donne communication de la préface d'une Histoire de Picardie qu'il va publier. Cette lecture est écoutée avec grand intérêt. A propos de l'annonce de cette importante publication, un membre propose de retrancher le prix offert pour une histoire de la Picardie. Cette proposition n'est point agréée, car plusieurs autres membres font observer qu'il n'y aura pas double emploi. On a demandé au concours une histoire de la Picardie qui doit être un livre abrégé et élémentaire, et qui ne remplira point le même but que l'important ouvrage annoncé par notre collègue.

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