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et dans le Nord Riding le nom de Swaledale Forest, rappelle l'existence d'une forêt, là où il existe à peine aujourd'hui un arbre'.

Des bois épais recouvraient les comtés de Nottingham, Lincoln, Derby, Leicester, Rutland. La forêt de Sherwood (limpida sylva) que Robin Hood' a rendue célèbre, était située dans le premier de ces comtés. Les forêts de Dunsinane et de Birnam, illustrées par les vers de Shakspeare, ont totalement disparu3.

le

On donne le nom de Weald à un vaste district qui est borné à l'ouest par le Surrey, au Sud par Sussex, au Nord par une chaîne de collines qui commence à Well-Street et s'étend jusqu'à la rivière de Medway. Les bouquets de chênes qu'on rencontre fréquemment dans ce district, les forêts de Tilgate et de Hastings, rappellent la magnifique forêt qui le recouvrait jadis, et qu'habitaient ces Cantii que César nous dépeint comme si sauvages'.

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Ce nom de Weald qui signifie forêt (le Wald

1 Cooke, o. c., p. 176, 339, 340.

2 Le nom de Robin Hood se rattache à plusieurs forêts de l'Angleterre et à une foule de vieux chênes. Voy. dans la Revue britannique, 6e série, t. XII, un article intitulé le Romancero de Robin Hood.

3 La forêt de Sherwood se rattachait à celle de Needwood. Elle est citée dans plusieurs chartes du moyen âge. Voy. Archeologia publish. by the Society of Antiquaries of London, t. XV, p. 213. 4 Cæsar, Comment. de Bell. Gall., lib. V, c. xxII.

allemand), lui fut imposé par les Saxons. Les Bretons l'appelaient Coit-andred, c'est-à-dire le grand bois (saltus andred des chartes), et comme elle devint la propriété exclusive du roi, elle prit le nom de saltus regalis1.

La plus grande partie du Weald' n'était point encore partagée en paroisses et en manoirs au temps des rois normands, voilà pourquoi cette forêt n'est pas mentionnée dans le Domesdaybook. Elle abondait en gibier, et les chartes font sans cesse mention du droit de panage et de paisson qu'on y accordait aux églises de Rochester et de Cantorbery. On appelait dens, denberries, wealdberries les cantons dans lesquels de semblables droits étaient concédés. Leur multiplication finit par faire passer cette forêt à l'état de forêt domaniales.

Près de Tunbridge, on voit encore des taillis qui sont les restes des forêts qui ombrageaient le North et le South-Frith. Sous le règne d'Elisabeth, ces

1 Joh. M. Kemble, Codex diplomatic. ævi Saxonici, t. I, p. 133, 239; t. VIII, p. 81 et suiv., 396.

* S. Bagshaw, History, Gazetteer and Directory of the county of Kent, t. I, p. 30, 31.

Il est remarquable que la formation géologique qui correspond en France au Weald anglais, le pays de Bray, et qui en est comme la continuation, ait été aussi couvert d'une forêt. Voy. Ad. Brongniart, Des périodes de végétation qui se sont succédé à la surface du globe. Annal. des Sciences nat., an. 1849, p. 310.

forêts avaient donné naissance à 53 parks dont quelques-uns subsistent encore1.

En Irlande, au temps de Giraud de Cambrie, il existait encore des forêts qui avaient plus de 30 milles de long'; aussi cette île porta-t-elle longtemps le nom de l'île boisée, the woody island", Arthur Young dit qu'il n'y a pas observé cent acres de terre sans y rencontrer quelques signes évidents, que jadis les bois en revêtaient la surface aujourd'hui totalement dépouillée. Ce déboisement s'est étendu jusqu'aux Orcades, aux Hébrides et à l'Islande.

L'emplacement des anciens bois est maintenant occupé, en beaucoup de comtés, par de vastes bruyères. Les noms que portent plusieurs de ces heath-fields, rappellent leur ancien état. Dans le BasLanguedoc, on observe des faits analogues; bon nombre de garrigues semblent avoir remplacé des forêts abattues.

Ce déboisement rapide de la Grande-Bretagne a eu bien des causes. Mais outre celles que nous avons déjà fait connaître, en parlant d'autres pays, nous devons signaler surtout le désir que le pouvoir avait d'enlever, en Écosse aux montagnards, en

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2 J. Logan, The Scottish gael, t. I, p. 76. (Lond. 1821). 3 Moreau de Jonnès, Mém. cit. Robert Kane, The industrial resources of Ireland, 2e édit., p. 3 (Dublin, 1645).

Angleterre aux outlaws, aux bandits, en Irlande aux white-boys, les refuges qu'ils trouvaient au fond de ces forêts1.

Jean de Lancastre employa vingt-quatre mille ouvriers pour abattre les forêts de l'Écosse. Robert Bruce en détruisit un grand nombre, dans son expédition à Inverary contre Cumin, et dans la partie septentrionale de ce royaume les Danois en incendièrent une partie notable. On a trouvé un ordre du général Monk, daté de 1654, lequel était au service de la République, ordre qui prescrit de détruire les bois d'Alberfoyle, parce que les troupes du parti qu'il voulait exterminer, et qu'il embrassa depuis, allaient y chercher un refuge3.

La Grande-Bretagne est actuellement l'un des pays les plus dépourvus de forêts de l'univers. Après avoir consumé les végétaux arborescents qui ombrageaient son sol, elle fouille maintenant ses entrailles et livre à la flamme les débris fossiles de celles qui la couvraient, il y a des millions d'années. Il semble que sa civilisation, que son industrie, reine de celle du monde, aient hâte de réduire notre globe à cette nudité et à cette sécheresse qu'il offrait avant que la vie prît naissance à sa surface.

1 Kane, o. C., 1. C.

'Moreau de Jonnès, Mém. cit., p. 53.

3 Moreau de Jonnès, ibid. Voyez, sur les forêts d'Angleterre, un article des Annales forestières pour mai 1848.

Nous ne chercherons pas à déterminer quel était l'état forestier de l'Angleterre et de la France, à cette époque d'une si prodigieuse antiquité qui précéda la période géologique actuelle. Cet état dut varier suivant les âges qui correspondent aux divers étages géogéniques de notre patrie. C'est surtout à l'époque de la houille qu'une vaste végétation arborescente recouvrait les districts qu'occupent aujourd'hui les bassins houillers. Dans le bassin d'Autun existait une magnifique forêt de conifères'. Aux environs de Saint-Étienne, les tiges d'arbres monocotylédones qui se trouvent engagées verticalement ou quasiverticalement dans le grès houiller de Treuil, révèlent l'antique existence d'une forêt analogue aux guaduales de l'Amérique2.

Les fougères arborescentes s'élevaient alors dans les lieux humides et ombragés, comme elles le font encore en Amérique, où on les voit fuir les rayons directs du soleil 3.

A une époque moins éloignée de nos âges, de magnifiques forêts bordaient les deux rives de la Manche, et toutes les côtes de l'Angleterre. Ces forêts ont laissé des vestiges dans les forêts marines qu'on a découvertes dans la baie de Saint-Brieux, près la pointe du Roselier et sur la côte du Finis

1

Dufrénoy et Élie de Beaumont, Descript. de la carte géologique de France, t. I, p. 681. Ad. Brongniart, o. c., p. 310, 336. 2 Lyell, Éléments de Géologie, trad. Meulien, p. 318. * Humboldt, Voyages aux régions équinoxiales, t. II, p. 214.

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