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gen, situé sur la rive gauche de l'Aar, en aval de sa jonction avec la Sarine, en face d'Aarberg. Ce village figure, sous le nom de Barges, comme paroisse du doyenné d'Avenches, dans le Cartul. du chap. de Lausanne'.

Le titre de comté avait passé soit au château, soit au village de Bargen, comme il passa, au milieu de l'anarchie féodale, des territoires à de simples villes, bourgs et chàteau forts. Il indique une juridiction. Könitz 3, Ruggisberg, Lengnau ou Longeau" étaient du ressort de ce comitat ou comté. Il ne s'étendait que sur une partie du Hochgau, dont une autre portion, notamment Château-d'OEx, ressortissait au comté de Vaud. Le Hochgau était un pays ou territoire qui dépendait, on le voit, de plusieurs juridictions. Compris dans le comté de Bourgogne (Landgrafschaft Burgund), qui constituait le diocèse de Lausanne, il était limité par l'Aar. Cette rivière séparait le comté de Bourgogne du duché de ce nom, et l'évêché de Lausanne de celui de Constance.

D'une étendue beaucoup moins considérable que l'évêché de Lausanne, le Hochgau ou pays d'Ogo était un pagus minor ou petit pays par opposition au pagus maior, qui répondait au territoire de la cité ou du diocèse, et il formait une subdivision diocésaine de cet évêché.

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Page 14. Cp. Mém. et Doc. de la Soc. d'hist. et d'archéol. de Genève, T. VII, p. 221, note 90.

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Guérard, Prolég. du Pol. d'Irm., § 22.

3 << Chunicis in comitatu Bargensi. » Annal. Heremi, p. 130.

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<< In comitatu Bargen in villa Lanha » charte de 1040. Regestes publ. par M. de Mohr, Ire livraison, p. 6. Voyez le Geschichtforscher, T. XI, p. 42, n.

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<< In comitatu Valdense in loco qui vocatur Osgo. « Ch. de 1040, citée ci-dessus, p. 53. Le « comitatus Waldensis» est déjà mentionné dans une charte de l'an 885. Voyez le Cartul. du chap. de Lausanne, p. 132.

Chaque diocèse était subdivisé en archidiaconés et en doyennés. Les premiers, dont l'institution paraît dater du temps de Charlemagne, ont été composés en grande partie avec les pagi minores, dont ils représentent assez généralement l'ancienne circonscription romaine ; les seconds se sont formés de territoires qui s'étendaient sur une moindre fraction du diocèse.

Les archidiaconés du diocèse de Lausanne sont inconnus. J'incline à penser que le pays d'Ogo en était un, bien qu'il ne pût représenter la circonscription d'un territoire cultivé et administré autrefois par les Romains. Le Cartulaire du chapitre de Lausanne, de l'an 1228, nous apprend que le diocèse de ce nom était subdivisé en neuf doyennés, dont l'un était le doyenné d'Ogo. Or, celui-ci ne comprenait pas tout le territoire du Hochgau. Une partie de ce territoire, détachée du pagus par une église-mère, avait servi à former un autre doyenné, sans cesser pour cela, je le présume, d'appartenir à l'archidiaconé.

Le doyenné d'Ogo comprenait au commencement du XIIIe siècle, l'abbaye de Marsens, les prieurés de Rougemont, de Broc, de Pont-la-Ville, d'Avril-devant-Pont et de Farvagny; les églises de Bulle, Riaz, Grandvillars, Albeuve, Château-d'OEx, Gessenay, Bellegarde, Charmey, Villars-Volar, Hauteville-de-Corbières, Vuippens, Treyvaux, Vuisternens-devant-Pont, Autigny, Estavayé-le-Gibloux, Orsonens, Villa-St.-Pierre, Berlens, Vuisternens vers Romont, Sales près Vaulruz, Echarlens, Mézières vers Romont, Villarimboud 2.

1 Guérard, ibid., S 21.

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2 V. le Cartulaire du chapitre de Lausanne, ou la Chronique de ce car

Toutes ces paroisses, à l'exception de Château-d'OEx, de Rougemont et de Gessenay, sont situées dans la partie du comté de Gruyère qui fut incorporée au canton de Fribourg. Elles forment un rayon qui ne répond pas à l'ancienne circonscription du Hochgau. A une époque indéterminée, lorsque la population des Alpes bernoises se fut accrue, il fallut y élever des chapelles et des églises, puis instituer un nouveau doyenné, et, dans ce but, détacher une portion du Hochgau. L'église de Ruggisberg qui, suivant la charte de 1076, fut construite dans le pays d'Ogo, figure un siècle et demi plus tard dans le doyenné de Berne. Celui-ci comprenait en outre le prieuré de Dærstetten, les églises de Wimmis, d'Erlenbach, de Boltigen, d'Oberwil, de Zweisimmen, et d'autres, dans le Simmenthal, qui dépendait plus ou moins des anciens comtes de Gruyère ou d'Ogo.

Faute de renseignements plus complets, nous bornons ici nos recherches sur l'Ogo.

tulaire et la carte publiées par M. Matile. Il faut observer que Farvagny et Sales (au N. d'Arconciel?), qui étaient compris dans le doyenné d'Ogo, et apparemment dans le pagus de ce nom, furent confisqués avec les autres possessions de Rodolphe de Rheinfelden, qui disputait l'empire à Henri IV, et donnés par celui-ci, en 1082, à l'un de ses fidèles, avec Arconciel et les dépendances des dits lieux. Il est probable qu'Illens, qui, dans les chartes accompagne ordinairement Arconciel, fut compris dans cette donation, quoiqu'il n'y soit pas nommé :.. « castrum Arconciacum cum ipsa villa posita in pago qui dicitur ontlanden (Uchtland) in comitatu tirensi et villam favernie et salam cum universis appendenciis, etc.» Pièce tirée des archives d'Hauterive (mihi). La charte originale de cette donation est perdue. La copie de ce document est le seul acte connu qui fasse mention du mystérieux comté de Tir, qui, du reste, signifie non un territoire mais une juridiction. Voyez de Gingins, Mém. et Doc. de la Société d'hist. de la Suisse romande. T. Ier, p. 32, 36, 44. Kopp, Geschichte der eidgen. Bünde› L. IV, P. 64.

Les comtes de ce nom, qui depuis la seconde moitié du XIIe siècle ne se montrent plus que sous celui de comtes de Gruyère, paraissent avoir d'abord administré le Hochgau, dont nous regrettons de ne pouvoir indiquer avec certitude toutes les limites de manière à reconstituer ce canton.

Le comté de Gruyère comprenait une partie assez considérable de l'ancien Hochgau, dans la Bourgogne transjurane. Il s'étendit un jour des sources de la Sarine ou du mont Sanetsch, qui le séparait du Vallais, jusqu'au delà du château de Simmeneck', qui en fit partie; le long de la Sarine jusqu'au territoire d'Arconciel, à deux lieues de Fribourg, et à l'ouest jusque vers Romont. Les seigneuries de Corbières, de Charmey et de Bellegarde formèrent un jour le cinquième mandement militaire de ce comté.

Au midi, le Val d'Ormont fut pendant quelque temps sous la juridiction des comtes de Gruyère. A l'occident, ils comptaient au nombre de leurs possessions les seigneuries

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« Lazius, lib. II de migr. dit que le domaine des comtes de Gruyère » s'estendoit depuis Frybourg jusques au lac de Lausanne. » Munster en sa cosmographie, p. 459, parle ainsi de cette contrée et de ses limites : < La comté de Gruyère du costé du midy est tenant et joignant aux Fri» bourgeois en tirant vers le Valais, et s'estend jusques à Vevey et au lac » de Genève. En ceste comté aussi finissent les hautes Alpes toujours cou» vertes de glaces et de neiges, lesquelles s'estendent de Schvvitz, Vri et » Vntervvalden vers l'occident. » Plantin, Abrégé de l'histoire générale suisse, p. 641 et suiv « Toute cette vallée (du Sybenthal) anciennement » fut des appartenances des comtes de Gruyère. » Id., ibid., p. 466. Ces citations ne servent qu'à établir des points de comparaison avec nos données.

d'Oron et de Palézieux; ils furent dans un temps barons d'Aubonne et co-seigneurs de Coppet. Borjod, la Bâtie, Mont-le-Grand étaient cités avec orgueil parmi leurs châteaux forts. Il est vrai que le chapitre de l'Eglise de Lausanne possédait de grands domaines dans le comté de Gruyère, que les monastères d'Hauterive et de la Part-Dieu y avaient des droits et des revenus qu'ils devaient à la munificence des comtes. Mais si d'un côté, les biens patrimoniaux de ces princes furent diminués par des cessions, par des fondations pieuses et des dons faits à des corporations religieuses, de l'autre, leur fortune s'accrut de diverses acquisitions faites par achat, par alliance et par héritage. Le vidomnat de Vaulruz échut à la maison de Gruyère. Elle avait des terres et des droits seigneuriaux dans diverses localités, à Vuadens, à Surpierre, à Pallier, à Vuarens, à Pully, dans le val de Lutry, à Villette, au Désaley, à St.-Saphorin, à Corsier, à Chardonne, à Grandcour.- La Grue apparaissait jusqu'aux rives du Léman.

Les comtes de Gruyère étaient de hauts et puissants seigneurs. Leurs richesses, les fondations dues à leur piété, leur esprit chevaleresque, leur vertu guerrière et d'autres brillantes qualités leur assignèrent de bonne heure une place au premier rang de la noblesse bourguignonne. Ne relevant que du roi des Romains, ou de son vicaire, ils avaient eux-mêmes de nombreux vassaux. Ils étaient princes de leur comté, exerçant tous les pouvoirs de la souveraineté.

Au milieu du XVIe siècle, d'environ cinquante maisons souveraines en Helvétie, celle de Gruyère était seule debout. Mais l'heure suprême allait sonner pour elle. En face d'idées nouvelles, dont l'influence était irrésistible, placée entre les

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