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quatre lingères jurées alors en exercice, et dont le domicile était indiqué rue de Buci.

A une époque moins ancienne, vers 1840, nous trouvons un principal locataire important : c'est Ducreux, fondateur à cette place du Café de France, qui se fit une réputation pour la confection des glaces et sorbets. Il eut pour successeur Rouzé qui augmenta encore la célébrité de la maison. En ce temps-là, on vint de tout Paris commander des glaces rue de Buci.

Ducreux qui avait fait fortune, acheta l'immeuble, par acte du 27 janvier 1853 et le reconstruisit à l'alignement tel qu'il est aujourd'hui. Le Café de France s'y réinstalla au rez-de chaussée. Dans les appartements des quatrième et cinquième étages habitèrent, de 1853 à 1864 le violoniste et compositeur Dancla qui est devenu en 1857 professeur au Conservatoire et a laissé de nombreuses. œuvres musicales; M. de Saint-Hilaire, homme de lettres; Millet, artiste peintre; Me Lemire, peintre de fleurs, qui a exposé à tous les Salons de 1836 à 1864.

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En 1873, la propriété fut acquise, moyennant 157.100 francs par M. Mazaroz-Ribalier sculpteur, dont le nom est bien connu dans l'industrie parisienne. Elle est actuellement en la possession de M. Rolland demeurant à Pont-Sainte-Maxence.

Aujourd'hui, le brillant Café de France a été remplacé par le Bazar de Buci où les gens du quartier viennent s'approvisionner d'ustensiles de ménage et de jouets d'enfants à bon marché.

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Nous rencontrons ici une belle façade en pierre de taille ornée à la hauteur du troisième étage d'une grande étoile sculptée, et, au-dessous, d'une tête formant mascaron dans le style du xvIII° siècle. La maison a cinq fenêtres sur la rue. Derrière est une cour étroite et longue, avec vieux bâtiments en aile et dans le fond. La forme de la propriété et la présence de l'étoile sur la façade évoquent tout de suite le souvenir d'un jeu de paume qui eut une véritable célébrité, car, pendant huit années, il servit d'asile à l'Opéra-Comique naissant.

Dès 1595, d'après la Topographie historique de Berty et Tisserand, il y avait là un jeu de paume, et, en 1628, il portait pour enseigne : la Diligence.

Étienne

Le 9 octobre 1657, la propriété est vendue par Rousselin, agent de change, à Nicolas de Bailleul, seigneur de Bois-Guiacourt, capitaine aux gardes françaises, demeurant rue du Bac. Ce devait être le frère de Claude de Bailleul qui possédait alors la maison du n° 4 illustrée plus tard par le restaurateur Landelle.

Par son contrat de mariage du 14 juillet 1659, Nicolas de Bailleul fait don à sa femme Catherine Bertrand de la susdite maison à jeu de paume ayant toujours son enseigne de la Diligence. En 1678, la déclaration de propriété est encore faite à l'Abbaye par les sieur et dame de

Bailleul, mais en 1697 elle est faite par leur héritier ou cessionnaire Jacques Darras.

Le 16 juillet 1702, la succession de ce Jacques Darras se partage entre ses deux filles, mariées, l'une à Louis-Jacques De Cours, avocat au Parlement, l'autre à François Courtois, chef d'échansonnerie du roi. Restées co-propriétaires indivises, elles passent déclaration en 1702, 1710, et 1728, mais, à cette dernière date, la maison est désignée comme ayant eu ci-devant l'enseigne de la Diligence.

Dans l'intervalle, en 1726, avait commencé la période intéressante de cet ancien jeu de paume. L'Opéra-comique, fondé en 1715 à la foire Saint-Germain des Prés, venait d'en être expulsé par suite de la construction d'un nouveau marché. Le directeur en était alors Honoré, exfournisseur des chandelles de l'Opéra, qui, par ses utiles relations, avait obtenu de l'Académie royale, en 1724, pour quatre années, le privilège de jouer sur son théâtre forain des pièces avec musique. Ne trouvant aucune place disponible sur le terrain même de la foire, il se mit en quête d'un local aux environs. La rue de Buci était tout près; le jeu de paume de la Diligence offrait un espace suffisant. Honoré le loua pour la durée de la foire et y installa son théâtre de l'Opéra-Comique. Bien que la salle fût pourvue de loges et galeries, elle n'avait rien de l'édifice monumental qui porte aujourd'hui le même nom. C'était une baraque foraine en bois, facile à installer rapidement comme à démonter.

Le 19 février 1726, Honoré fit son ouverture avec deux pièces nouvelles : l'Ambigu comique, parodie d'une comédie jouée alors aux Français, intitulée l'Impromptu de la folie; et une autre parodic, faite par Fuzelier, sur la

tragédie d'Atys. Il donna ensuite Crédit est mort, opéracomique en un acte de Piron avec couplets sur des airs connus; puis l'Enrôlement d'Arlequin, autre opéra-comique du même auteur. Dans le courant du mois de mars, on joua notamment les Songes, parodie de la tragédie d'Edipe par La Motte; et les Stratagèmes de l'amour, ballet dont le succès dura jusqu'à la clôture de la foire. La saison finie, Honoré démonta son théâtre, et se transporta à la foire Saint-Laurent.

En 1727 et 1728, on ne sait pourquoi, les propriétaires de la maison refusèrent de renouveler cette location, ou en demandèrent un prix trop élevé, et le pauvre Opéra-Comique ne trouva aucun local pour se produire à la foire Saint-Germain.

En août 1727, cependant, un nouveau directeur avait succédé à Honoré; c'était Boizard de Pontau, auteur dramatique en même temps qu'entrepreneur de spectacles, qui avait obtenu de l'Académie royale de musique, moyennant 12.000 livres par an, le droit d'exploiter l'Opéra-Comique avec vaudevilles, danses, machines, décorations et symphonies. A la fin de 1728, il s'adressa de nouveau aux propriétaires de l'ancien jeu de paume de la Diligence et en obtint la location. Il y installa tout à neuf sa salle de théâtre, et lui donna pour enseigne : l'Étoile, à l'instar de cet autre jeu de paume de l'Etoile de la rue des FossésSaint-Germain, où s'était logée la Comédie française en

1688.

La salle était mieux aménagée qu'au temps d'Honoré, la troupe mieux composée et Pontau ne craignit pas d'offrir au public, comme on va le voir, des jouissances variées. Il ouvrit, le 3 février 1729, par un opéra-comique nouveau en deux actes, la Tante rivale, de Panard et

Thierry où il fit débuter Charpentier, bon acteur et habile joueur de musette, qui devint célèbre surtout par ce der nier talent. On donna, peu après, aussi en première représentation Argenie, opéra-comique en trois actes, tiré du Prince déguisé de Scudéry, par Marinier, Panard et Pontau lui-même. Au lieu de se contenter de couplets chantés sur des airs connus, les auteurs s'étaient adressés à Gilliers, compositeur à la mode, qui écrivit pour cette pièce une série d'ariettes, duos et morceaux d'ensemble. La musique fut, dit-on, ce qu'il y avait de meilleur dans l'ouvrage.

Encore en février 1729, on joua Achmet et Almanzine avec le concours de l'excellent danseur Nivelon fils, puis les Pèlerins de la Mecque. Le 10 mars eut lieu la première représentation de Pierrot Tancrède ou la Méprise de l'amour, parodie de l'opéra de Tancrède. Enfin, Pontau termina la saison par une parodie de la Boîte de Pandore, composée par Panard avec musique et ariettes de Gilliers, sous ce titre : l'Amour et la Nécessité. C'est là qu'on vit figurer dans un joyeux ballet final toutes les fièvres déchaînées sur l'humanité et, comme étoiles de la danse, la Migraine, la Paralysie et le Transport au cerveau se livrant à des ébats chorégraphiques. Ce fut le succès de l'hiver.

Le 3 février 1703, l'Opéra-Comique s'ouvrit encore rue de Buci dans le jeu de paume de l'Étoile, avec une installation derechef améliorée par Pontau. L'édifice était plus solide, la salle plus commodément disposée et pourvue de deux entrées indépendantes. Le duc de Lorraine honora de sa présence la soirée d'ouverture pour laquelle fut joué en première représentation un opéra-comique en trois actes de Fuzelier, Panard et Pontau, avec musique de

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