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Pierre Boulard, avait, pendant plus de trente ans, rempli les fonctions de premier secrétaire des ambassades du comte d'Avaux, à Venise; en Hollande, lors des traités de Nimègue (1678-1679); et en Irlande, à la suite de Jacques II, roi d'Angleterre (1689-1690) (1).

Pierre-Maurille Boulard, son père, entra au service du roi en 1701 et fut également attaché à la personne du comte d'Avaux, en qualité de premier secrétaire d'ambassade; il remplit ces fonctions en Hollande jusqu'à la mort du comte (1709). Après avoir été premier secrétaire de l'ambassade du maréchal d'Huxelles et de l'abbé de Polignac aux conférences de Gertruydenberg (1710), il devint premier secrétaire du frère du comte d'Avaux, le comte de Mesmes, premier président du Parlement de Paris (1712), et fut reçu chevalier de l'Ordre militaire et hospitalier de Saint-Lazare, le 9 octobre 1716. Le roi, pour récompenser les services de Pierre-Maurille Boulard et de son père, lui accorda des lettres de noblesse pour lui et sa postérité, par lettres patentes du mois de février 1719 (2); et, quelques années plus tard, le 15 juillet 1722, il était nommé commandeur et secrétaire général de l'Ordre de Saint-Lazare. A la mort du président de Mesmes (1723), « S. A. S. le prince de Conty, connaissant la probité, la capacité et le désintéressement du sieur Boulard », le choisit pour le mettre à la tête des affaires de sa maison, en qualité d'in

(1) Cf. Lettres patentes, Biblioth. nat., mss, pièces originales, 44€, et Mercure de France, février 1734.

(2) « Le vendredi dixième jour du mois de février de la présente année 1719 ", le généalogiste Charles d'Hozier établissait le «< règlement d'armoiries pour le sieur Maurille Boulard », contenant la description suivante: «Un écu de gueules à un lion d'argent passant, et un chef d'or, chargé de deux roses de gueules. Cet écu timbré d'un casque de profil, orné de ses lambrequins d'or, de gueules et d'argent. » (Cf. Règlement d'armoiries, etc.; Bibl. nat., mss, pièces originales, 446.)

tendant général et de secrétaire de ses commandements. C'est dans ces dernières fonctions qu'il mourut, le 18 janvier 1734, « à l'âge d'environ soixante-deux ans, portant le titre d'écuyer, chevalier, commandeur, secrétaire général et greffier de l'Ordre royal militaire et hospitalier de Notre-Dame-du-Mont-Carmel et de Saint-Lazare-deJérusalem (1). »

Dans les situations qu'ils avaient occupées, les Boulard n'avaient guère obtenu, pour les services qu'ils y avaient rendus, que des récompenses et des distinctions honorifiques. Mais la considération dont ils avaient joui pendant leur carrière rejaillit sur leur descendant, et Mr Henry Boulard (2), « écuyer, avocat en parlement, conseiller du roi, notaire au Châtelet de Paris », homme d'une grande culture, se trouva en relations avec ce qu'il y avait de plus élevé dans le royaume; son étude devint le rendez-vous de la noblesse, du clergé, de la magistrature et de la haute bourgeoisie (3).

(1) Cf. Lettres patentes, etc.; et Mercure de France, op. cit.

Le frère de Pierre Maurille, Jean-Antoine, fut Conseiller du roy, Inspecteur des fermes à Bordeaux. - « Dame Elizabeth Roussart, veuve de Pierre-Maurille Boulard,» mourut quai Conty; ses obsèques, portent le billet de décès, «eurent lieu le vendredy 28 de May 1745, à 6 heures du soir en l'Église Saint-André-des-Arcs, où elle sera inhumée. » (Cf. Bibl. nat., Pièces orig. 446).

(2) Il était né en juin 1714.

(3) Cf. Duviquet, Notice sur la vie et les ouvrages de feu M. A.-M.H. Boulard, notaire à Paris, ancien maire du XIe arrondissement, ancien député au Corps législatif, membre de la Société royale d'agriculture, de plusieurs autres sociétés savantes et littéraires, chevalier de l'Ordre royal de la Légion d'honneur; 1 broch. in-8°; 23 p. Paris, 1828; imprimerie Migneret, 20, rue du Dragon.

C'est dans ce milieu que naquit, le 5 septembre 1754, Antoine-Marie-Henry Boulard. L'enfant fut baptisé le lendemain à la paroisse Saint-André-des-Arcs, par Messire Pierre-Bernard Viet, licencié en théologie et prieur commendataire du prieuré de Saint-Ouen; il eut pour parrain son oncle, Messire Marc-Antoine de Quelen, colonel d'infanterie, gouverneur de Lanion et écuyer de. S. A. S. Madame la princesse de Conty, et pour marraine sa grand'mère maternelle, dame Marie-Marguerite Favart, épouse de Me Nicolas-Henry Sellier, avocat en parlement, notaire honoraire au Châtelet de Paris (1).

Le jeune Boulard commença ses études au collège Louisle-Grand et les acheva, sous René Binet, célèbre traducteur de Virgile, d'Horace et de Cicéron, au collège du Plessis, où il remporta, en 1770, le prix d'honneur au concours général de l'Université; il avait alors seize ans. Un tel succès semblait décider de sa vocation pour les lettres; mais, respectueux des intentions de sa famille, il passa à l'École de droit, et, y ayant terminé ses cours, il fit l'apprentissage du notariat. A l'âge de vingt-sept ans et demi, le 4 janvier 1782, il succéda à son père, et, le 3 septembre suivant, il épousa « Me Marie-Chrestien des Ruflais, âgée de dixsept ans et demi passés, fille de Me Simon-Philibert Chrestien des Ruflais, avocat au Parlement, ancien consul, ancien marguillier de cette paroisse, et de défunte dame Viger, de droit et de fait rue des Mauvaises-Paroles de cette paroisse (2)».

D'après l'acte de mariage, nous voyons que la cérémonie nuptiale fut célébrée « par Messire Louis-Pierre-Bernard

(1) Archives du département de la Seine (État civil reconstitué, 334, 840).

(2) Ibid. (État civil reconstitué, 334, 895).

Viet, prêtre licencié en théologie et prieur commendataire du prieuré de Saint-Ouen (le même qui avait baptisé Boulard), en présence de Messire Jean Ringard, prêtre, licencié ès lois, curé de cette paroisse,... du consentement et en présence du père et de la belle-mère de la mariée, comme aussi en présence de M. Charles-Jean-Baptiste Lebrun, écuyer, conseiller secrétaire du roi, maison et couronne de France et de ses finances, avocat au Parlement, notaire au Châtelet de Paris, rue de la Monnoye de cette paroisse; de Me Edme-Hilaire Garnier Deschene, écuyer, conseiller, secrétaire du roy, maison et couronne de France et de ses finances, ancien notaire au Châtelet de Paris, et directeur général des finances de Monsieur frère du roy, rue des Quatre-Fils, paroisse Saint-Jean-en-Grève; de M° Denis Trutat, avocat au Parlement, conseiller, notaire au Châtelet de Paris, rue de Condé, paroisse Saint-Sulpice, tous trois beaux-frères du marié; de Me Pierre-Jean-François Chrestien, chevalier, conseiller du roy en la Cour des aides de Paris, seigneur de Lihus et autres lieux, oncle paternel de la mariée, rue d'Enfer, paroisse Saint-Séverin; de M Alexandre-Richard Rousseau, avocat au Parlement, conseiller du roy, notaire au Châtelet de Paris, rue Bardubec, paroisse Saint-Merry, beau-frère de la mariée, et Jean-Claude Camusat de Roeny, conseiller du roy en la Cour des aides, seigneur de Roeny et autres lieux, rue d'Enfer, paroisse Saint-Séverin, cousingermain paternel de la mariée, lesquels ont attesté le domicile, la liberté et la catholicité des contractants sous les peines portées par les ordonnances et déclarations. du roy (1) ».

(1) Arch. du dép. de la Seine (État civil reconstitué, 334, 895).

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Ce n'était qu'à regret que Boulard avait renoncé à la littérature; aussi lui consacra-t-il tous les loisirs que lui laissait l'exercice de sa charge. Pour se délasser des purges d'hypothèques, des donations entre vifs et des actes de ventes par licitation, il fit sa société habituelle d'écrivains distingués de l'époque et noua d'amicales relations avec Laharpe, Delille, Fontanes, Villoison, Millin et Sainte-Croix. Son aimable caractère, sa conversation d'un tour agréable, lui attirèrent les sympathies des nombreux littérateurs qu'il fréquentait, d'autant mieux qu'à l'occasion qui n'était pas rare Boulard se faisait volontiers leur prêteur. Toutefois, si l'on en croit Henry Berthoud (1), qui le connut personnellement, «< il faut dire que la bourse de Boulard ne s'ouvrait pas étourdiment, et qu'il ne prêtait qu'avec un tact extrême, et seulement lorsqu'il en était sérieusement besoin. Pour tout au monde, il n'eût point laissé un de ses amis dans l'embarras; pour plus encore, il n'eût point voulu encourager le désordre et la paresse. Ensuite, il était inexorable pour ceux qui ne rendaient pas; et, chose digne d'attention, on lui rendait presque toujours. Il avait consacré à ces prêts une somme assez importante, mais qu'il ne dépassait jamais sous aucun prétexte. La somme étaitelle épuisée, celui qui avait besoin d'argent se mettait en quête des emprunteurs en retard, leur exposait ses besoins et se parfaisait avec leur aide l'argent qui lui était nécessaire, jusqu'à ce que lui-même rendît cet emprunt à un autre ami de Boulard ».

(1) Cf. Constitutionnel, feuilleton du 1er mars 1854

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