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Bornat (1). Peut-être s'agit-il là d'un état de choses qui avait déjà cessé au moment du procès-verbal Bornat et que le rédacteur de l'acte de vente aurait copié sur les vieux titres de propriété.

Tout ce que nous savons de Cruchet, c'est que sa veuve habitait, au moment de l'expropriation, la rue saint Martin, paroisse Saint-Nicolas-des-Champs, et qu'en 1606, un certain Christophe Cruchet était propriétaire à Pantin, près d'un aqueduc conduisant les eaux à Paris (2). Est-ce le même qui en 1658 achetait « Le Mortier d'Or » ? Nous ne saurions l'affirmer.

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L'Image saint Anthoine », puis « Le Petit Louvre », puis « L'Image saint André ».

La maison suivante, toujours en descendant le fleuve, est aussi une petite maison; on verra par sa description qu'elle n'a qu'une pièce par étage, comme « Le Mortier d'Or ». D'après le « Compte du don de trois cens mil livres tz. octroyé par la ville de Paris au feu roi Charles dernier décédé, en l'an M. Ve soixante onze (3) », l'emplacement où devait plus tard s'élever cette maison, était alors occupé par un certain François du Hanot qui est cotisé pour XL sols. Les actes que nous avons eus en main ne remontant pas jusqu'à cette date, nous ignorons si François du Hanot habitait la maison alors existante à titre de propriétaire ou de locataire. Mais avant 1604, le terrain

(1) Arch. nat. S. 6499.

(2) Registres des délibérations du bureau de ville, 30 juin 1606. (3) Bibl. nat. Mss. Fr. 11692, fo 309.

appartenait à Nicolas de Longuemare, le propriétaire voisin dont nous venons de nous occuper.

Il est probable que le terrain qu'il avait acheté en 1599 à Catherine Sénéchal, était trop grand pour lui, qu'il en fit bâtir la moitié et revendit l'autre moitié. Ce que nous savons, c'est que le 16 novembre 1604, devant les notaires Desmarquets et de Troyes, Longuemare, le passeur et sa femme, Marie Tournet, vendaient le terrain en question à Michel Poulier (ou Poulliet). Nous ignorons tout de ce personnage sinon qu'il était mort en 1610, laissant une veuve et des héritiers mineurs; que sur son terrain s'élevait une maison et que le notaire Lemoyne la vendait, le 24 mars, à Antoine Mallard, sur le compte de qui nous n'avons non plus aucun renseignement. Peutêtre fut-ce pendant sa possession, qui dura onze ans, que la maison bâtie par lui prit l'enseigne de «<L Image saint Anthoyne » en l'honneur du saint patron de son propriétaire. Mais nous ne saurions l'affirmer, car le propriétaire suivant s'appelait aussi Anthoine.

Le 31 juillet 1621, Antoine Mallard était mort laissant trois filles Marie qui avait épousé « noble homme >> Paul de Souvigny, orfèvre, valet de chambre ordinaire du roi; une seconde fille dont nous ignorons le prénom et dont le mari se nommait Jean Mouzot et était procureur en la chambre des Comptes; et enfin, une troisième fille, Jeanne, qualifiée femme de Jacques Véron, porte-manteau ordinaire du roi. Ceux-ci sont d'un niveau un peu plus relevé que des maîtres passeurs où des jurés porteurs de charbon; ils appartiennent à la petite bourgeoisie. Du reste, Antoine Mallard lui-même n'a d'autre titre que celui de bourgeois de Paris. Quoi qu'il en soit, en cette année 1621, le 31 juillet, devant les notaires Desquatrevaux et

Lemercier, les héritiers Mallard vendaient « L'Image saint Anthoyne » à Antoine Marcassin, bourgeois de Paris et à Claude Liart, sa femme.

Pendant la possession des Marcassin, eut lieu un incident juridique dont la portée nous échappe : Nous avons vu que les héritiers Pouliet vendirent la maison, le 24 mars 1610, à Antoine Mallard dont les héritiers vendirent euxmêmes à Antoine Marcassin le 31 juillet 1621. Or, le 3 février 1629, nous trouvons un décret d'adjudication au Châtelet au profit de Marcassin (1) qui est déjà propriétaire depuis 1621. Mais ce qui nous étonne encore davantage, c'est que cette adjudication est faite à la suite d'une saisie sur Mathieu Poullet (ou Pouliet) et Marie Poullet, mariée en secondes noces à Pierre de Lyvernette, lesquels sont précisément les héritiers Poulliet (ou Poullet) qui, le 24 mars 1610, ont vendu à Antoine Mallard. Il faut sans doute voir là quelque formalité de droit dont nous ne comprenons pas le mécanisme, faute d'éléments suffisants.

Les Marcassin conservèrent la maison jusqu'en 1640, mais alors, Antoine Marcassin étant mort, sa veuve et ses trois filles se décidèrent à la vendre. Cette famille Marcassin est dans le genre des Mallard: ce ne sont pas des artisans, ce ne sont pas des gentilshommes: la fille aînée, Marie, est veuve d'un certain Nicolas Lefébure, bourgeois de Paris, la seconde, Anne, a épousé Vincent de La Fouchardière, sieur du Filloux, « lieutenant d'une compagnie entretenue pour le service du roy » au Hâvre de grâce; elle habite avec sa mère; la troisième fille, Claude, est mariée à Mr Claude de Retz, bourgeois de Paris. C'est encore de la petite bourgeoisie et pourtant, quand Claude

(1) Arch. nat. S. 6500.

Liart, veuve Marcassin, et ses trois filles aliènent l'Image Saint-Anthoyne (13 novembre 1640, devant M. Bellehache) (1), la veuve déclare ne savoir signer.

L'acquéreur cette fois ne nous est pas tout à fait inconnu; il est dénommé dans l'acte : « Noble homme Guillaume Barbier controlleur du bois et charbon de cette ville de Paris, demeurant à Saint Germain des Prés, rue des Vaches, au Pré aux Clercs ». Il était le fils du fameux Louis Le Barbier (ou Barbier), le riche traitant, le constructeur du Pont Rouge, le fermier général, le spéculateur de terrains, qui s'était fait adjuger avec un consortium d'autres spéculateurs, la plus grande partie des terrains de l'hôtel de la reine Marguerite. Louis Le Barbier était mort entre 1641 et 1643 et c'est bien son fils que nous rencontrons ici achetant l'Image saint-Antoine, car dans un acte de constitution de rente consentie par Guillaume Barbier, nous le voyons donner en gage une délégation sur ce qui lui reste dû par un certain Du Chaufour à qui il a vendu la charge de maistre du pont des Thuilleries que possédait encore son père quelques années auparavant (2). Il est, au moment de son acquisition, marié avec Anne de Villemart et continue les attitudes de galanterie que recherchait son père, le fastueux financier; en effet, pour une acquisition qui ne monte qu'à la modique somme de 5000 # tz., il ajoute comme don gracieux, comme «< épingles », suivant la vieille expression, un anneau d'or dans lequel est enchâssé un diamant de la valeur de 150" tz., pour chacune des venderesses, c'est-àdire, Claude Liart, veuve Marcassin et ses trois filles (3).

(1) Arch. nat. S. 6500.

(2) Ibid.

(3) Ibid. Dans le même dossier se trouve, en date du 10 août 1646,

Se Hque DU VIo. - 1913.

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Guillaume Barbier changea la dénomination de sa maison et l'appella « Le Petit Louvre ». Il ne semble pas l'avoir habitée, car la veuve Marcassin y est encore quelque temps après la vente et cinq ans après, au moment d'une nouvelle aliénation de l'immeuble, Guillaume Barbier habite << L'image Saint Claude », au port de l'Escholle, paroisse Saint-Germain-l'Auxerrois. Le propriétaire du « Petit Louvre » suivait l'exemple de son père et spéculait sur les immeubles. Il avait perdu depuis quelque temps sa femme, Anne de Villemart, et s'était remarié avec Charlotte de Poupincourt. Il eut sans doute besoin d'argent pour quelqu'une des opérations compliquées auxquelles s'était livré son père et, le 31 août 1645, il échangeait devant Roussel notaire, « Le Petit Louvre », contre une rente de 383 #, 9, 8a, que s'engageait à lui servir André Maurice, huissier sergent à verge au Châtelet de Paris. Nous savons par ce contrat d'échange (1) que « Le Petit Louvre » était alors aux mains d'un locataire, le sieur de La Commune, l'un des archers du corps de Monseigneur le duc d'Orléans et sa femme.

Cette acquisition n'était aussi pour André Maurice qu'un placement car il ne quitta point la rue de la grande Truanderie qu'il habitait. Il y était même encore dix-sept ans après, quand il reçut avis qu'il allait être exproprié pour la construction du Collège des quatre Nations. Il ne semble pas y avoir fait de grandes modifications; il changea seulement l'enseigne et au lieu de s'appeler « Le Petit Louvre », la maison devint « L'Image Saint André », du

une rétrocession de rente à André Maurice par Guillaume Barbier dont la descendance nous est ainsi connue : il avait un fils nommé François et une fille Anne qui avait épousé un certain Charles Berte.

(1) Ibid.

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