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NÉCROLOGIE

M. THÉODORE BEAUGÉ

Voici les paroles prononcées sur la tombe de notre collègue, M. THÉODORE BEAUGÉ, maire-adjoint du VIe arrondissement, par M. FÉLIX HERBET, maire de l'arrondissement.

Messieurs,

Au moment de rendre les derniers devoirs à mon respectable et très cher collègue et ami M. Théodore Beaugé, ma pensée se reporte à deux ans en arrière, à la cérémonie semblable qui nous rassemblait autour de la tombe de notre collègue Boillot. J'ai dit alors combien était intime, combien était étroit et combien fut durable le lien qui unissait les membres de la municipalité de 1894. Le plus jeune nous a quittés d'abord; c'est aujourd'hui l'aîné que nous pleurons, et s'il est vrai que mes nouveaux collègues n'ont rien négligé pour que leur dévouement atténue mes regrets, s'il est vrai qu'ils feront tous leurs efforts pour combler ce nouveau vide, je suis maintenant trop avancé dans la vie pour espérer que les nouvelles affections aient le temps de remplacer les affections brisées.

Théodore-Edouard Beaugé était né à Savigné (Indre-etLoire), le 25 décembre 1831. Après quelques années de cléricature, il était admis par le Tribunal de commerce de la Seine au nombre des syndics et liquidateurs judiciaires. Sa

grande connaissance des affaires, sa prodigieuse activité, sa haute probité lui valurent tout de suite la confiance du Tribunal qui le chargea, à la satisfaction de tous, des plus délicates et des plus considérables liquidations. Président de sa compagnie, décoré de la Légion d'honneur, M. Beaugé avait parcouru la carrière la mieux remplie et la plus honorable, lorsqu'au moment de prendre sa retraite, il apportait, en 1894, à la municipalité de VI arrondissement sa précieuse collaboration.

Pour lui, ce ne fut pas le repos. Pendant près de vingt années, il a été le plus actif, le plus jeune d'entre nous. La Commission d'hygiène, qui était son domaine réservé, ne l'empêchait pas de suivre assidûment les travaux des autres Commissions. Toujours prêt aux besognes variées qui sont demandées aux municipalités, il les accomplissait avec son activité ordonnée et souriante. Au Bureau de Bienfaisance comme à la Caisse des Écoles et à la Délégation cantonale, aussi bien qu'à la Commission d'hygiène, son expérience consommée et sa bonté exquise lui assuraient l'estime, le respect, la sympathie de tous nos collaborateurs et de tous nos employés, et j'ai compris, par l'unanimité des regrets qu'ils m'ont exprimés, combien grande est leur douleur en face de ce trépas imprévu.

C'est que personne, parmi nous, n'avait conscience de l'âge de M. Beaugé. Son énergie, son allure, la vivacité de son intelligence ne nous laissaient pas le loisir d'y songer, et récemment, lorsque l'époque des congés nous a dispersés, nous avions bien la conviction de retrouver notre collègue à son poste. Une indisposition, qui remontait à un accident banal et dont son vigoureux tempérament semblait devoir triompher, a pris toup à coup un aspect tragique, et le 12 août 1913, à Orsay, M. Beaugé expirait sans souffrance, au milieu de sa famille surprise et désolée.

S'il a, dans ce moment suprême, embrassé d'un regard sa vie entière, il a pu se rendre ce témoignage qu'elle avait été bonne et qu'il avait rempli tous ses devoirs devoirs envers les siens qu'il avait la joie de laisser prospères et dans d'honorables situations, devoirs envers la Justice, dont il avait été un

Sté Hque DU VI. - - 1913.

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auxiliaire infatigable, devoirs envers la chose publique, à laquelle il avait consacré ses services désintéressés.

Au nom de la municipalité du VI arrondissement, au nom de nos collaborateurs bénévoles, au nom de nos employés, j'exprime à Madame Beaugé et à toute sa famille nos respectueuses condoléances. Que mes paroles leur portent l'assurance que nous conserverons fidèlement le souvenir de cet admirable vieillard, qui n'avait rien de la vieillesse et qui fut un ami sûr, un caractère droit, une intelligence d'élite et un serviteur de la République et de la Ville de Paris d'un absolu dévouement.

M. VICTOR DUJARDIN

A la veille de la rentrée des vacances, la Société perdait un de ses membres les plus aimés, M. Victor Dujardin, qui a succombé le 30 septembre 1913, après une très douloureuse maladie. Quoique profondément atteint depuis plusieurs années et dans l'impossibilité d'exprimer facilement ses idées, notre collègue qui avait conservé toute son intelligence et toute son énergie, trouvait encore, grâce au dévouement de sa femme et de son fils, le moyen d'assister à nos séances, d'enrichir nos collections et de participer à nos travaux. Il n'a cessé de le faire que lorsque la maladie l'a cloué sur son lit de douleur. Victor Dujardin était né à Lille, le 29 novembre 1849, dans une famille honorable qui, chose rare, a conservé les noms de tous ses ancêtres, en remontant jusqu'au milieu du xvie siècle. Il a publié à cette occasion, en collaboration avec son fils, M. Marius Dujardin, une brochure qui nous fait connaître le soin apporté à ses archives familiales, où l'on rencontre un nom célèbre, celui de Charlemagne Ovigneur, capitaine canonnier des volontaires de la ville de Lille, lors du siège de 1792.

Notre collègue a passé les années de son enfance et de sa jeunesse à Paris. De 1862 à 1879, il a habité rue de Seine, 52; de 1879 à 1881, rue Bonaparte, 40; et lorsque son mariage et ses affaires l'eurent fait quitter l'arrondissement, il avait toujours plaisir à y revenir, pour assister, par exemple, aux séances de la Société de Géographie commerciale, dont il était fondateur et membre du Conseil. Après vingt années d'une honorable carrière de négociant commissionnaire, M. Victor Dujardin se retirait des affaires en 1904, avec le désir d'em

ployer son repos aux études historiques qu'il avait toujours aimées; il se faisait affilier à la Société Le Vieux Papier et à plusieurs Sociétés historiques d'arrondissements. Les souvenirs qu'il avait conservés du nôtre ne pouvaient manquer de nous assurer son concours. Son frère et lui s'inscrivirent comme membres perpétuels. Tous deux, hélas! viennent de

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mourir la même année, et le frère le plus jeune est parti le premier.

Nos bulletins ont conservé la trace de l'activité intellectuelle de M. Victor Dujardin. En outre des insertions insérées aux procès-verbaux des séances, je signalerai les articles qu'il nous a donnés sur Alexis Diot, le coiffeur poète, son voisin de la rue de Seine, et sur l'aviation dans le VI arrondissement. Il est aussi l'auteur de Souvenirs de la guerre de

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