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NOTULES

M. PAUL FROMAGEOT.

Dans le compte rendu moral et financier que nous rédigeons chaque année à l'intention de l'Assemblée Générale, mais que nous ne publions pas, parce qu'il ferait en quelque sorte, double emploi avec les procès-verbaux des comités et celui du Conseil d'Administration qui contient le bilan financier, nous avons cette année salué la mémoire de M. Paul Fromageot, auquel nous liait une respectueuse affection remontant déjà à seize années. On nous permettra de placer ici le passage qui concerne notre éminent et regretté sociétaire.

M. Paul Fromageot faisait partie de la Société historique du VIe arrondissement, depuis ses débuts. Chacun avait apprécié très tôt la distinction de ce collègue, le charme de sa conversation, la sûreté de sa documentation. Toutes qualités qui s'alliaient à une modestie extrême. M. Fromageot ne venait pas à vous, mais tout en lui attirait, donnait confiance.

Ancien membre du conseil de l'Ordre des avocats, M. Paul Fromageot avait eu au barreau parisien une carrière brillante et fructueuse. Il se délassait maintenant en consacrant ses loisirs à des publications historiques où l'érudition parfaite s'alliait à une méthode de présentation excellente, celle sans doute qui avait fait de lui l'un des avocats les plus convaincants de son temps. D'ailleurs une bibliothèque bien fournie, complétée par des collections d'estampes, la propriété de documents manuscrits. permettait à notre éminent collègue d'apporter à de pareils travaux le maximum de perfection. Versailles, où il passait un partie de l'année, avait d'abord limité ses recherches; la Société du VI° fondée, il s'intéressa à notre coin de Paris, et vous savez de quelle façon, et par quelles

recherches neuves, séduisantes dans la forme autant que nourries par le fond.

Aussi, lorsqu'en 1910 l'Académie des sciences Morales et Politiques daigna honorer d'un prix l'ensemble de notre effort, soyez certains que des études telles que celles consacrées à la rue de Buci et la rue du Cherche-Midi qui commençait à paraître, furent d'un poids sérieux dans la décision de l'illustre compagnie.

Voilà pourquoi le nom de M. Paul Fromageot suscite en nous un sentiment de fierté telle que, ce nom prononcé, toute autre chose nous apparaît, en cet instant, secondaire...

ZONIERS INTRA-MUROS.

Depuis trente années les véritables amis de Paris réclament son extension. C'est le seul moyen de sauver ce qui reste du passé, d'arrêter la démolition des hôtels historiques ou artistiques, de protéger les vieux arbres qui en ombragent les jardins; le seul moyen aussi de rendre Paris habitable aux Parisiens, en lui assurant de l'air.

Cependant, combien de temps faudra-t-il encore lutter pour avoir raison de la mauvaise foi, des bas intérêts des sémites et des limousins qui spéculent sur les terrains de la zone extramuros? Mais, ce qu'on connaît moins, ce sont les petites intrigues des zoniers de l'intérieur.

Tout extraordinaire que cela paraisse, il existe encore dans Paris même, vers la Porte-Dorée, des terrains non construits. Ce n'est pas par disette d'acquéreurs, mais pour cause d'exigences de vendeurs. Détruire les fortifications, ceux-ci n'y tiennent donc pas. Un parc existant déjà hors l'enceinte, l'emplacement du bastion et du fossé serait non réservé pour les espaces libres, mais loti. D'où concurrence. Aussi qu'ont-ils imaginé? — Simplement ceci. Une pétition pour conserver à titre de spécimen la section des fortifications dont la disparition gênerait leurs intérêts. Ils agissent et comment!

Si encore la Roche Tarpéienne était d'actualité, on pourrait conserver ce coin de fortif comme une menace pour les spéculateurs de mauvaise foi. Mais ils sont trop, le fossé serait bien vite rempli et il faudrait vraisemblablement constituer parallèlement sur le bastion même, un Montfaucon.

LE JOURNAL DE COLETTE.

Suivez-vous dans le Matin, le « Journal de Colette »?

Si oui, vous avez certainement lu avec le même plaisir que nous-même, ce feuillet intitulé : « On détruit Passy. »

Les démolisseurs ont la besogne facile : on sape un coin de balcon, une véranda vieillote, et toute la bâtisse s'affaisse comme un soufflé sous la cuiller. Pour nous, voisins menacés, cela débute par des surprises charmantes : derrière un pan de mur noir, derrière une maisonnette à croisillons, close et moisie, apparaît un jardin prisonnier, profond, un rond-point de tilleuls, ruine verdoyante d'un parc ancien, un bassin d'eau couronné de moucherons, la dalle bleue d'un cadran solaire, une vieille escarpolette à dossier.

Ailleurs, les brèches ont démasqué une allée étroite, qui divise en deux un jardin de curé, et les tombereaux écrasent des laitues, des poireaux et des rosiers, ébranchent des poiriers en quenouille, et délient, hélas! les bras généreux d'une treille, qui portent des grappes déjà nouées... Les terrassiers mâchent des brins de syringa, et leurs chevaux pesants s'en vont, un iris à l'œillère. C'est un pillage assez gai, sur fond de murs éventrés et livrant au jour le dessin grossier de leurs cellules irrégulières. Papiers de tenture chocolat ou lie de vin, peintures d'un rouge funèbre, caissons de plâtre et statuettes stuquées, témoins d'une époque où le laid se faisait distingué, et qui bannissait la couleur comme une inconve

nance.

La tragédie ne commence qu'au moment où l'on abat les charmilles. Vingt-quatre heures, et le quinconce est un chantier, la tonnelle scalpée traîne sa chevelure dans les gravats, le bosquet gît sous les cris des oiseaux sans abri. Vingt-quatre heures pour ruiner l'œuvre vivante de cinquante ou cent années, l'arbre, le bel arbre ancien que l'on n'achète pas, l'arbre que le milliardaire ne peut ni créer, ni emporter, ni hâter, l'arbre âgé, luxe des sédentaires qui l'ont mérité en le regardant grandir...

Sous les branches épanouies, on ne voit presque pas les bûcherons. Mais le feuillage tout entier, à chaque coup de hache, tressaille brièvement, jusqu'au moment de la chute. Lorsqu'il est tombé, il demeure encore si frais, d'une verdure si raide et si nourrie de sève, qu'on ne sait pas qu'il est mort. Mais le jour d'après, au crépuscule, monte vers nous le parfum de la feuille meurtrie, qui

penche et se ternit, cette odeur qui se lie à des souvenirs de fête d'été, d'arcs triomphaux pavoisés et verdoyants.

(Le Matin, 4 juin 1914.)

Le VI arrondissement a eu, lui aussi, de vieux logis avec de beaux arbres, des charmilles!

COMMISSION DU VIEUX-PARIS.

Samedi, 7 décembre 1912. Rapport de M. Félix Herbet sur la plaquette de M. Charles Saunier: L'Hôtel de Choiseul-Praslin, aujourd'hui Caisse nationale d'Epargne.

Rapport de M. Ch. Magne sur des fouilles récentes opérées à l'angle de la rue de Vaugirard, n° 21, et de la rue du Luxembourg, n° 2, c'est-à-dire sur la voie romaine de Vaugirard. Elles n'ont rien donné. Mais M. Magne rappelle, à ce propos, que lors d'une fouille faite non loin de là, rue de Vaugirard, no 26, il a trouvé, le 26 juin 1899, une statuette d'Hercule en bronze o", 13 de hauteur) en même temps que des monnaies à l'effigie de Claude 1o et de Vespasien.

Dans la même séance, M. Hartmann a fait une communication d'une importance extrême. Elle ne concerne pas notre arrondissement, il est vrai, mais elle contribuera à solutionner une affaire qui intéresse la beauté de Paris. Il résulte des déclarations de M. Hartmann qu'il existe chez un notaire parisien, un cahier des charges dressé le 22 avril 1828 par l'Administration de la Maison du Roi, établissant les dimensions obligatoires des combles, avec indication de profil, des immeubles à construire rue de Rivoli et rue Castiglione.

Cette pièce manquait, dit-on, à l'État pour empêcher les surélévations récentes de certains immeubles en façade sur les Tuileries. La voilà retrouvée. Il n'y a qu'à agir (1).

(1) Un jugement excellent a été rendu le 30 mai 1913 par le Tribunal Civil. On peut lire dans la Gazette des tribunaux des 22, 23, 24 et 25 juin 1913, le lumineux exposé de la question présenté par le substitut Monnet.

Ainsi que l'a fait remarquer le président de la Commission du Vieux Paris, M. Mithouard, dans la séance qui a suivi le jugement (14 juin) « La victoire est due aux documents et arguments de M. Hartmann,»

Vendredi, 8 février, 1913. — Dépôt d'une note de M. Ch. Saunier demandant la conservation d'une plaque placée avenue du Maine, sur une auberge, à l'enseigne de la ville de Chartres et indiquant, pour la route de Paris à Toulouse, la distance depuis Notre-Dame.

Rapport de M. Ch. Magne sur les fouilles exécutées boulevard Saint-Germain, 87, à l'occasion de la démolition d'une maison dont le fond reposait exactement sur le mur d'enceinte de Philippe-Auguste, tandis que les maisons des nos 89 et 91 sont baties d'aplomb sur le parement intérieur de l'avancée de la porte de 1598, -porte Saint-Germain, dite autrefois des Cordeliers.

Samedi, 8 mars. Notification de la nomination de notre collègue, M. F. Hoffbauer, comme membre de la Commission du Vieux-Paris.

Rapport critique de M. Félix Herbet sur le projet de restauration de l'ancien fronton en fer forgé qui ornait la grille du pavillon de l'Ermitage de l'ancien château de Bagnolet, maintenant Hôpital Debrousse. M. Herbet conclut à la restauration du fronton et à la remise en état du salon de Flore du pavillon de l'Ermitage.

Samedi, 12 avril. Rapport de M. Ch. Magne sur les fouilles du quai des Grands-Augustins, qui n'ont rien révélé de particulier.

Par contre, découverte d'ossements sous l'église des Carmes de la rue de Vaugirard, au cours de travaux effectués par M. Ruprich-Robert.

Rapport de M. Lucien Lambeau sur la maison de campagne du petit séminaire de Saint-Sulpice, sise 286, rue de Vaugirard et récemment démolie. Elle était dite aussi, Maison des Philosophes de Saint-Sulpice, et avait été acquise vers 1756 pour le compte du séminaire.

Samedi, 14 juin. - On photographiera avant démolition. les rues de la Petite-Boucherie, Bourbon-le-Château, de l'Échaudé-Saint-Germain, Cardinale, appelées à disparaitre.

Rapport de M. Félix Herbet sur une note communiquée par notre collègue, M. l'abbé de Launay, au sujet du pays d'origine de Pierre de Montreuil, l'architecte de Notre

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