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une cheminée et allée de passage à costé conduisant à l'escallier et suspente au dessus de ladite allée, avec une escurie au derrière de ladite bouticque, et au dessus à cinq estages dont quatre quarrez et un autre en galtas; chacun desdits estages applicqué à une chambre et bouge au derrière de l'escallier, un desquels est applicqué à un siège d'aisances; et cave au dessoubz desdits lieux garnye d'une descente droicte... tenant d'un costé à la maison cy devant déclarée, d'autre costé à la vefve Lecomte, abboutissant par derrière à la vefve Cruchet et par devant, sur ladicte petite rue de Nesle (1) ».

Gittard, l'expert de du Roux, demandait 37.000 1.; Jacques Bornat en offrait 30.800. L'arrêté du conseil du 1er mars 1663 adopta ce dernier chiffre (2) et, le 31 du même mois, Le Fouyn, notaire passait l'acte de vente au profit des exécuteurs du testament de Mazarin (3).

« La Corne de cerf », puis « L'Image Saint-Jean ».

Nous voici arrivés à la dernière maison de la petite rue de Nesle, à l'Est; elle est adossée à « La Croix de Lorraine», notre point de départ sur le quai Malaquais. D'après Tisserand, Nicolas Canivet était propriétaire du terrain dès 1530, avec obligation d'y bâtir. Quand il mourut, sa femme Jehanne Bridou se remaria avec le tonnelier Guillaume Marcoureau; nous en avons déjà parlé en étudiant « La Croix de Lorraine » dont il était aussi propriétaire. En 1542, ni feu Nicolas Canivet, ni son successeur Marcoureau n'avaient encore mis à exécu

(1) Arch. nat. S. 6500.

(2) Arch. nat. E. 1718 (fol. 27.)

(3) Arch. nat. S. 6500.

tion la clause de bâtir insérée dans la vente primitive faite à Canivet. Marcoureau s'était installé dans l'autre partie du terrain, sur le quai même et se décida à vendre le lot qui était derrière lui et formait le coin de la rue longcant les fossés et de la petite rue de Nesle. Sur une vente postérieure (1), nous relevons parmi les pièces livrées, mention de « lettres obligatoires au Châtelet de Paris passées doubles devant Charron (ou Le Charron) et Dunesme, notaires, le mercredi 28 février 1542, par lesquelles appert Guillaume Marcoureau et Jehanne Bridou sa femme... avoir baillé, cédé..., (etc.) à titre de rente annuelle et perpétuelle... à deffunct Jehan Jugan, maître passeur es portz de Paris, 13 toises 1/2 de terre close de murs assis au terouer dudit Saint Germain des Prez, près la tour de Nesle, sur lequel a esté depuis basti et édifié ladite maison et lieux moyennant 13 livres 10 sols tournois de rente annuelle perpétuelle ».

C'est donc le passeur Jean Jugan qui, après 1542, construisit la première maison sur ce coin de terre. Tout ce que nous savons de ce Jean Jugan, c'est que sa femme se nommait Antoinette Dumas et qu'il avait un fils appelé Cosme, écolier étudiant à l'Université de Paris, qui semble s'être mal conduit et lui avoir donné peu de satisfaction car, après lui avoir fait donation d'une partie de ses biens, Jean Jugan la révoqua (2). Le 25 août 1552, dix ans après son acquisition et après avoir fait bâtir une petite maison, il la revendit à un libraire, Jehan Longis, et à sa femme, Denise Frézot (ou Farot). Ce Jehan Longis appartenait

(1) Du 28 octobre 1570, devant Hacte et Champy. Lemaignier à Antoine Briant. — (Arch nat. S. 6499)

Vente par Robert

(2) Pièce citée dans la vente du 28 octobre de Lemaignier à Briant. Arch. nat. S. 6499.

à une vieille famille de la corporation. Son père, Clément Longis, avait exercé dès 1490 et lui-même avait commencé à vendre des livres en 1524. Il avait sa boutique «en la galerie du Palais par où l'on va à la chancellerie ». Il s'était associé en 1530 avec Jehan Saint-Denis, qui mourut presque aussitôt, et il continua l'association avec sa veuve. S'étant lui-même marié, il eut deux filles et donna l'une d'elles en mariage à un jeune homme de la corporation, Robert Le Maignier (ou le Mangnier) avec qui il s'associa encore. Sa marque avait pour motif principal un cœur ardent au haut d'une lance, parfois avec la devise « Nihil in charitate violentia » (1). Jehan Longis mourut le premier, et la maison demeura à sa veuve et à son gendre Le Maignier. Quand Denise Frézot mourut à son tour en 1558, ses deux filles Marie et Geneviève héritèrent, et le partage eut lieu le 20 mai de ladite année devant Franquelin et Bresson notaires. Geneviève avait épousé Robert Lemaignier, tandis que Marie avait pour époux Regnault de La Croix, marchand chaudronnier. La propriété avait été partagée en deux, mais, par échange du 19 mars 1562, les Lemaignier récupérèrent l'ensemble de la maison de la petite rue de Nesle. Ils ne l'habitèrent probablement pas. En effet, peu de temps avant la mort de Denise Frézot, sa belle-mère, le 13 novembre 1557, Robert Lemaignier (ou Le Mangnier) prenait en location. une maison rue des Canettes (2).

Il est déjà un homme considéré et remplit les fonctions de curateur aux biens vacants de « Noble homme et saige

(1) Renouard (Ph.) — Imprimeurs parisiens, libraires, fondeurs en caractères... - Paris, 1898, in-8°.

(2) Arch. de Cothereau, notaire (publ. dans: Documents pour servir à l'histoire des libraires de Paris... publ. par le bon Jérôme Pichon et Gabriel Vicaire).

messire Jehan Jourdain en son vivant avocat au parlement ». En 1571, il change de domicile, mais non point pour aller Petite rue de Nesle, car, le 9 juin de cette année, il signe, ainsi que sa femme Geneviève Longis, un bail de neuf ans avec les marguilliers de Sainte-Genevièvedes-Ardents pour une maison, rue Neuve-Notre-Dame, à l'enseigne de « L'Image monsieur Saint Jehan-Baptiste », près et joignant la grande porte principale de l'église. C'était une maison modeste : il y avait une cour, un cellier, une salle, un « ouvrouer » ou atelier, deux chambres, un bouge et un grenier. Il payait 90 livres et versait en plus une somme de 10 écus d'or soleil pour l'œuvre de la , fabrique.

Robert Lemaignier acquit rapidement de la notoriété et de la considération dans son nouveau quartier. Deux ans après qu'il y était installé, il advint que le curé de la paroisse, Joseph Neveu, fut accusé d'être un mauvais desservant; c'est du moins ce qui paraît résulter de la pièce que nous allons citer; il semble même qu'on ait spécifié les accusations et qu'on lui ait reproché de n'être point habituellement à son poste. C'est d'ailleurs là un des griefs le plus fréquemment mis en avant dans les nombreuses. plaintes contre les irrégularités du clergé de cette époque. Le curé Joseph Neveu vint trouver ses paroissiens et leur demanda un certificat notarié de régularité. Le vicaire, les chapiers, les diacres, les marguilliers et deux notables attestèrent que Joseph Neveu demeurait à Paris et remplissait très bien ses devoirs de curé de Sainte-Genevièvedes-Ardents. Les deux notables étaient Robert Lemaignier et Pierre Odde, potier d'étain (1).

(1) Ibid. (Voir la note précédente.)

Sté Hue DU VI". 1913.

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Il semble que Robert Lemaignier ait terminé ses jours à « L'Image monsieur Saint Jehan-Baptiste » car, neuf ans après son premier bail, nous le voyons en signer un nouveau, moyennant 40 écus d'or, en considération des nombreuses améliorations qu'il a faites et compte faire encore. A cette époque il s'intitule libraire juré. En1 581 et 1584, nous le voyons encore prendre part à des contestations entre la fabrique de sa paroisse et un avocat au parlement, nommé Antoine Dulac; mais dès le 13 février 1587, nous trouvons à la même adresse Félix Lemangnier, fils du précédent et libraire lui même. Robert a dû mourir. entre 1584 et 1587 (1).

Il avait deux marques : l'une avec ses initiales R. L. M. entrelacées; l'autre avec un aigle reposant sur un livre et fixant le soleil et pour devise: «< Musarum in odore quiescet >>.

Robert Lemaignier avait donc fait un simple placement en achetant la maison de la petite rue de Nesle et l'avait donnée en location à Anthoine Bryant (ou Briant), capitaine et garde du bateau du roi, sommelier de la reine future et à sa femme, Roberde Le Normant. Cette reine future était sans doute Élisabeth d'Autriche que Charles IX épousa le 27 juin 1570.

Le 28 octobre de la même année, devant Roland Hacte et Quiriace Champy, notaires, Robert Lemaignier vendit pour 850 1. tz sa maison de la Butte à son locataire Antoine Bryant, qui continue du reste à s'intituler « sommelier de la reine future » (2). La maison avait alors pour enseigne « La Corne de cerf ». Antoine Bryant fut sans

(1) Ibid. D'autre part, Ph. Renouard (Imprimeurs parisiens, libraires...) dit qu'il exerça de 1557 à 1586.

(2) Arch. nat. S. 6499. Titres et quittances.

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