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donna un rendez-vous à Riom la princesse en profita. Riom, étonné de cet embonpoint, disait le lendemain à un de ses amis : « Voyez cette madame de Mouchy, qui a l'air grosse comme une mauviette; cela tient une place énorme dans un lit. » Tel fut le commencement de ce scandaleux amour 1.

1. Voir plus haut Correspondance de la duchesse d'Orléans, 22 août 1719 (p. 55).

VIII.

Mémoires

du Marquis d'Argenson.

René-Louis de Voyer, marquis d'Argenson, était le fils aîné du célèbre lieutenant de police, Marc-René de Voyer, qui conserva son poste, au grand mécontentement des Parisiens, pendant 21 ans, et ne le quitta qu'en 1720.

René-Louis de Voyer composait beaucoup de petits opuscules, écrits au jour le jour, qui, en général, n'étaient pas destinés à la publicité, et dont l'ensemble a formé un fonds considérable de volumineux dossiers dans l'ancienne bibliothèque du Louvre. Ils ont paru pour la première fois dans la collection Baudouin des Mémoires de la Révolution française en 1825. Un éditeur, qui a conservé l'anonyme, a repris cette publication en 5 volumes de la collection elzévirienne de Jannet en 1867.

Le frère du marquis, Marc-Pierre, comte d'Argenson, fut intendant de Paris, membre du Conseil des ministres, et ministre de la Guerre en 1743. C'est lui qui prépara la victoire de Fontenoy.

ΙΟ

PARADIS DE MONCRIF. Parmi le grand nombre de plaisanteries qui courent sur le compte de Moncrif, on a prétendu qu'il avoit appris à faire des armes, et étoit même parvenu à se faire recevoir maître d'escrime. Ce qui le fait croire, c'est qu'étant déjà lecteur de la reine, et par conséquent à la cour, il fut question de son âge; on voulut prouver qu'il étoit plus vieux qu'il ne paraissoit l'être, et on allégua sa réception dans le corps des maîtres en fait d'armes. M. de Maurepas voulut s'en assurer, et, ayant eu l'occasion de lire la liste des membres de cette communauté, qui demandoient le renouvellement de leurs privilèges, il trouva en effet le nom de Paradis à la tête. Il demanda aux syndics ce qu'étoit devenu ce maître. La réponse fut que depuis trèslongtemps il avoit disparu, et avoit sans doute renoncé au métier. Le ministre, qui, comme tout le monde sait, aime assez les petites malices, n'eut rien de plus pressé que de conter cette anecdote au roi. D'après cela, Moncrif devoit avoir quatre-vingts ans. Le roi Louis XV, en ayant beaucoup ri, trouvant un jour Moncrif chez la reine, lui dit : « Savezvous, Moncrif, qu'il y a des gens qui vous donnent quatre-vingts ans? Oui, Sire, répondit-il, mais je ne les prends pas. »

Roy, poète satirique, lança contre lui une pièce de vers fort méprisante. Moncrif s'en vengea bien, car, rencontrant Roy un soir après souper, il le reconnut à la clarté de son flambeau, et lui donna force coups de canne sur les épaules et coups de pieds dans le ventre. Roy lui disoit en les recevant: « De grâce, monsieur des Chats, faites patte de velours.»

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