et des deux poissons, la Reine survint comme il commençoit. Le Père André aussitôt : « — Madame, lui dit-il, vous ne serez pas fort régalée. Il ne s'agit que de cinq pains et de deux poissons; mais je ne vous attendois pas. Ainsi, vous me pardonnerez si je ne mets pas plus grand pot-au-feu pour aujourd'hui. » Le même Père André étant au confessionnal, il s'y présenta une jeune fille, laquelle demeurant à ses pieds sans rien dire, obligea le Père à lui demander ce qu'elle avoit fait. A quoi cette jeune fille niaise ayant répondu plusieurs fois qu'elle n'avoit rien fait. Eh bien répliqua-t-il brusquement, allez donc faire quelque chose, et puis vous me le viendrez dire. » Parlant un jour de Noël, des merveilles de la naissance de Jésus-Christ, il dit : << -- L'enfant est né, il est né dans nos cœurs, mais il faut l'y nourrir et l'y entretenir, il a une mère, mais il a besoin de nourrices. Mesdames, j'ai dessein de vous faire toutes nourrices. » L'abbesse de Chelles, fille de M. le duc d'Orléans écrivant au Régent pour lui demander une grâce, se donna la qualité d'épouse de Jésus-Christ! Ce prince répondit en riant : Il y a trop longtemps que je suis brouillé avec mon gendre pour rien accorder à sa femme. » J'ai ouï dire de M. de La Guesle, autrefois premier président en ce Parlement, qui étoit fort replet, qu'un jour, comme il s'endormoit à l'audience, un conseiller, qui ne l'aimoit point, dit à son voisin : « - Voyez ce gros cochon comme il dort! » Ce qu'entendant, M. de La Guesle répondit brusquement: « - D'un cochon tout est bon, mais d'un asne rien ne vaut. » Le feu président de Souvert estoit fort agréable et avoit souvent de plaisantes reparties. Estant un jour près d'une dame de ses amies qui n'avoit pas l'haleine bonne : << Ne voulez-vous donc pas, lui dit-il, faire arracher la dent qui vous empoisonne la bouche ?» A quoi la dame lui ayant répondu qu'elle l'avoit fait arracher la veille : « — Parbleu! repartit-il, si cela est, madame, il faut donc que vous l'ayez avalée. » La duchesse de Guise, fàchée de voir son mari se ruiner au jeu (d'autant plus qu'il jouoit en dupe), pria la princesse de Conti, sœur du duc, de lui faire sur cela des remontrances. Elle promit de le faire, et ayant, peu de temps après, rencontré son frère, qui descendoit les degrés du Louvre, elle lui dit sur cela ce qu'elle avoit promis de lui dire. Lui, qui venoit justement de perdre encore beaucoup d'argent, lui répondit tout en colère: « Ma sœur, je ne jouerai plus, quand vous ne coqueterez plus. » Dans le même instant, la duchesse de Guise. s'étant présentée à elle, et lui ayant demandé si elle avoit obtenu quelque chose du duc: « <<< Ah! ma sœur, lui repartit la princesse, c'est temps perdu que de vouloir empêcher mon frère de jouer... Il ne s'en tiendra jamais. » L'évesque du Puy, qui est de la maison de Béthune, a un très-grand nez. Un jour, le duc de Roquelaure, qui n'en a presque point, plaisantoit fort sur le nez de cet évêque. Enfin, le prélat s'en lassant! Hé, monsieur, lui dit-il, laissez mon nez! Croyez-vous qu'il ait été fait aux dépens du vôtre !>> Un vieillard de quatre-vingt-dix ans qui se tira d'une maladie, disait: « Ce n'est pas la peine de me rhabiller. » Défiez-vous, jeune beauté, De votre esprit et de vos charmes; Est toujours en danger d'en prendre. Un jeune auteur dramatique s'attacha à une actrice qui jouait les premiers rôles tragiques; il 1. Malgré son titre un peu prétentieux et la réputation d'esprit laissée par l'auteur, ce recueil est assez pauvre en anecdotes méritant la reproduction. Ce serait le cas de dire ici avec Ménage (Voyez p. 18): « On dit des allusions, des équivoques et des turlupinades qu'elles ne valent rien quand on les donne pour bonnes. » |