Page images
PDF
EPUB

goût? en ce cas je la soupçonnerois fort d'en avoir changé.

FRÉDÉRICH.

Ne voyez-vous pas les menaces qu'elle me fait pour lui avoir enlevé le seigneur Jean-Mathias Macker?

GOTERNITZ.

Elle n'ignore pas combien les François sont aimables.

FREDERICH.

Non; mais elle sait que les Françoises le sont encore plus, et voilà ce qui l'épouvante.

SOPHIE.

Point du tout car je tâcherai de le devenir avec elles ; et tant que je plairai à Dorante je m'estimerai la plus glorieuse de toutes les femmes.

DORANTE.

Ah! vous le serez éternellement, belle Sophie ! Vous êtes pour moi le prix de ce qu'il y a de plus estimable parmi les hommes. C'est à la vertu de mon père, au mérite de ma nation, à la gloire de mon roi, que je dois le bonheur dont je vais jouir avec vous: on ne peut être heureux sous de plus beaux auspices.

FIN DES PRISONNIERS DE GUERRE.

PYGMALION,

SCÈNE LYRIQUE,

PYGMALION.

GALATHÉE.

La scène est à Tyr.

N. B.

Cette scène, que Rousseau composa sans doute pendant son séjour à Motiers, fut représentée à Paris pour la première fois le 30 octobre 1775, et parut imprimée dans la même année chez la veuve Duchesne (in-8° de 29 pages). En tête de cette brochure est une lettre datée de Lyon, 26 novembre 1770, et signée Coignet, négociant, à Lyon, par laquelle ledit Coignet nous apprend que cette scène fut dès ce temps-là représentée à Lyon par des acteurs de société, et qu'il en a fait la musique, à l'exception de deux morceaux, qu'il déclare être de Rousseau, savoir, l'andante de l'ouverture, et le premier morceau de l'interlocution qui caractérise, avant que Pygmalion ait parlé, les coups de ciseau qu'il donne sur ses ébauches. C'est cette musique qui fut exécutée à Paris lors des premières représentations en 1775; elle y fut même gravée tant en partition qu'en parties séparées. Mais quelque temps après on la jugea beaucoup trop foible pour l'ouvrage, et M. Baudron, maintenant encore chef d'orchestre au Théâtre-François, se chargea d'y faire une musique nouvelle, dans laquelle il nous a dit lui-même avoir conservé le second des deux morceaux faits par Rousseau, et que l'on vient d'indiquer. Cette seconde musique, qui n'a point été gravée, est celle qui s'exécute maintenant à Paris, quand on y représente Pygmalion, et les directeurs de spectacle en province l'ont généralement adoptée.

Il paroît que Rousseau ne s'est pas senti assez fort pour faire cette musique lui-même. Voici l'anecdote qu'on lit à ce sujet dans l'Avertissement qui précède le recueil des Romances de Rousseau, gravé après sa mort.

Pendant son dernier séjour à Paris, quelqu'un l'ayant prié de corriger les fautes existantes dans le Pygmalion imprimé, qui en contient en effet beaucoup, il eut la complaisance de le lire, et de faire sur son propre manuscrit les corrections demandées. Quel dommage, dit quelqu'un présent à cette lecture, que le petit faiseur n'ait pas mis une telle scène en musique! (On sait que Rousseau désignoit lui-même ainsi l'auteur prétendu de son Devin du village, et dont il se disoit le prête-nom.) « Vraiment, répondit-il, s'il ne l'a pas fait, c'est qu'il n'en étoit pas capable. Mon petit faiseur ne peut enfler que les pipcaux. Il y faudroit un grand fai»seur. Je ne connois que M. Gluck en état d'entreprendre cet ouvrage, et je voudrois bien qu'il daignât s'en charger. ».

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

L'éditeur du Rousseau compacte (1817) s'est étrangement mépris en disant que Pygmalion reçut les honneurs de la parodie, sous le titre de Brioché, ou l'origine des Marionnettes. Cette pièce, représentée et imprimée en 1753, vingt ans avant qu'on ne connût le Pygmalion de Rousseau, est la parodie d'un opéra du même nom représenté en 1748.

[graphic][subsumed][subsumed]
« PreviousContinue »