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Temporal, s. d. in-4) 125 fr. ; sont des livres qui se montrent pour la première fois en vente publique à Paris, du moins le « Manuel »> ne signale aucun prix à leur égard.

Les exemplaires du catalogue Ch. G. avec les prix mis à la main à côté de chaque article, mériteront d'autant plus d'être conservés chez les amateurs, que ce catalogue signale des éditions inconnues à tous les bibliographes. Nous mentionnerons les Fais Maistre Alain Charetier, Paris, s. d. in-fol. (n. 1200) et Ordinaire des Crestiens, Paris, 1490, in-4; l'un et l'autre de ces volumes ont été imprimés chez Antoine Vérard; ils n'échapperont sans doute pas à l'attention de M. Francisque Michel qui s'occupe depuis longtemps de dresser la liste raisonnée de toutes les productions de ce célèbre typographe.

Dom CATALOGUS.

D'un livre rare et curieux : les Statuts de l'Inquisition.

Dans un précédent numéro du « Quérard; » (p. 195), nous avons dit quelques mots d'un livre excessivement curieux et très rare, que possède la bibliothèque du Corps législatif, des Statuts de l'Inquisition. Nous devions ce que nous en avons dit à des renseignements qui nous avaient été donnés de mémoire par un de nos amis, qui depuis, a eu l'obligeance de nous décrire plus exactement cet exemplaire de la bibliothèque du Corps législatif, ainsi que de mieux préciser les vissiciudes de ce volume. Nous en faisons aujourd'hui profiter nos lecteurs. Le volume en question a pour titre :

Orden que comunmente se guarda en el Santo Oficio de la Inquisicion, acerca del processar en las causas que en èl se tratan; conforme à lo que est a proveido por las instruciones antiguas y nuevas. Valencia, 1736, in-4.

Ce volume est composé de 88 feuillets, y compris le titre et la table, et de 16 autres feuillets de même impression, contenant des formules et des prières mises à la fin; on a placé en tête deux instructions, l'une pour les gardes, l'autre pour les règles à observer, qui sont d'un format moins grand, quoique in-4, ayant ensemble 12 feuillets et les armoiries de l'Inquisition imprimées à la première page. Le volume est relié en velours rouge (couleur tristement de circonstance), et a appartenu au grand inquisiteur. Cet exemplaire, qui contient quelques notes marginales et des endroits remplis à la main, fut saisi dans le cabinet du grand inquisiteur, le 13 décembre 1808, par ordre de Napoléon, et envoyé immédiatement en France: il était accompagné de la lettre qui suit :

Madame,

· Madrid, le 25 décembre 1808.

A sa Majesté l'Impératrice et Reine.

• Pendant plusieurs siècles, l'Inquisition a été la terreur et l'effroi de beau

coup de pouples et de bien des rois! Un seul mot de l'Empereur et Roi, Napoléon, a suffi pour l'anéantir.

Sa Majesté ayant daigné me confier le commandement de Madrid, lorsque son armée victorieuse est entrée dans cette ville, j'ai été chargé de l'exécution de ses ordres, relativement au décret d'abolition de l'Inquisition.

» J'ai pénétré dans l'intérieur terrible (et naguère inaccessible à tout mortel) de ce tribunal, et je me suis emparé du livre particulier d'ordre du grand inquisiteur, qui était renfermé sous une forte clef, dans le tiroir de la table sur laquelle il signait officiellement ses arrêts.

» J'ai l'honneur, Madame, de présenter ce livre à votre Majesté, non comme une curiosité typographique, mais comme un monument extraordinaire de la puissance de l'Empereur, de la valeur de son armée, car il a fallu l'une et l'autre pour arriver jusqu'à ce livre, et pour foudroyer du même coup l'Inquisition et l'écrit.

J'ai pensé, Madame, que votre Majesté daignerait agréer l'hommage de ce trophée, de cette victoire sur l'opinion, et de ce nouveau témoin irrécusable du fort et vaste génie de l'Empereur.

Je suis avec respect,

» Madame,

» de votre Majesté Impériale et Royale,

le très humble et très obéissant serviteur.
» Le général de brigade,

» Baron de Lauberdière,

» Commandant de Madrid.

P. S. Dans le même tiroir où se trouvait le livre que j'ai l'honneur d'envoyer à Votre Majesté, se trouvait le bonnet ou toque noire dont se couvrait le grand inquisiteur. Je l'ai donné à M. l'archevêque de Malines, mon plus ancien ami.

La mitre de ce prélat fait oublier l'effroi qu'a longtemps causé ce petit bonnet noir.... Je connais assez ses principes pour assurer qu'il ne se servira jamais de son ministère que pour faire aimer et respecter la morale, et chérir et bénir l'Empereur et l'Impératrice !!! Il ne tourmentera jamais les consciences.

» La comédie du Diable Prédicateur et les autres papiers que je joins au livre, étaient, ainsi que le bonnet noir, les seuls objets renfermés dans le tiroir du grand inquisiteur. Du reste, tous leurs papiers ont été saisis; leurs différentes bibliothèques, ou plutôt magasins de livres confisqués et défendus par l'Inquisition, renfermant une immense quantité de livres français.

Ainsi

L.

que nous l'avons dit précédemment, l'exemplaire de ce si curieux ouvrage fut, après la mort de l'impératrice Joséphine, vendu avec les livres de la bibliothèque de la Malmaison.

Il y a une dizaine d'années, un libraire de Paris (Mongie aîné), son dernier acquéreur, se trouvant avoir besoin d'argent, en fit proposer l'acquisition (1) à la bibliothèque de la chambre des députés. Après s'être enquis près du grand inquisiteur, qui vivait à Paris sous un nom

(1) Par l'ami auquel nous devons les matériaux de cet article.

supposé, si ce volume lui avait réellement appartenu, et si les notes étaient de sa main, et sur son affirmation, les questeurs de la chambre donnèrent ordre au bibliothécaire d'acquérir ce précieux volume à tout prix. Il valait 12 à 1,500 fr.: le bibliothécaire ne rougit pas de faire profiter l'État de la détresse du vendeur, lui en offrit 500 fr., et il lui fut cédé.

Ce volume est aujourd'hui conservé avec tout le soin de son premier propriétaire dépossédé ; c'est-à-dire qu'il est sous clef, dans un tiroir de la bibliothèque du Corps législatif. J. M. Q.

De quelques supercheries littéraires en Allemagne.

La probité est pratiquée en Allemagne dans toutes les actions de la vie; aussi est-il très rare qu'on ait à reprocher à nos voisins d'outreRhin de ces fraudes qui sont assez communes dans d'autres pays. Quelques exceptions ont pourtant été signalées dans ces derniers temps, et nous croyons devoir reproduire ces accusations pour effrayer les écrivains qui pourraient être tentés plus tard d'imiter les coupables que nous allons nommer. L'histoire littéraire est cultivée aujourd'hui par tant de personnes, qu'il est impossible qu'une fraude passe inaperçue.

Il paraît à Hambourg une feuille quotidienne qui, aujourd'hui, est à sa cent-vingt-cinquième année! son titre est: Staats und Gelehrte Zeitung des Hamburgischen unpartheiischen Correspondanten. Un homme très savant en histoire littéraire, non-seulement de l'Allemagne mais encore de la France, et qui, quoique étranger, écrit avec une rare élégance notre langue aussi bien que sa langue maternelle, et auquel on doit une série d'excellents articles qui n'ont point l'aridité de ceux dus à la plume de la plupart des bibliographes, le docteur F.-L. Hoffmann, de Hambourg, est l'un des principaux rédacteurs actuels de cette feuille pour la partie littéraire, et il y écrit beaucoup. Obligeamment, et à titre d'encouragement, M. le docteur Hoffmann a bien voulu consacrer dans cette feuille quotidienne, quatre ou cinq articles à notre petit journal: nous l'en remercions très cordialement ; hélas, il faut bien le reconnaître; c'est plutôt bienveillance que justice: nous tâtonnons trop encore pour mériter sa juste approbation. C'est à des numéros récents de la feuille dans laquelle M. F.-L. Hoffmann écrit que nous empruntons les deux premières fraudes littéraires suivantes, assez singulières.

La supercherie littéraire qui fut découverte il y a quelque temps à Weimar, où quelqu'un eut l'effronterie stupide d'évoquer le génie de Goethe et de Schiller pour se l'approprier, rappelle à l'auteur une supercherie analogue, qui eut lieu à Berlin il y a quelques années.

Les fils du philosophe Mendelsohn entreprirent dans cette ville une

nouvelle édition des œuvres de leur père, et dans ce but, ils invitérent, par une annonce dans les journaux, toutes les personnes qui pourraient posséder un manuscrit quelconque de leur père, de le leur envoyér moyennant une rétribution convenable.

De Hambourg on leur envoya onze lettres parfaitement conservées, que Mendelssohn avait adressées à son beau-frère qui avait résidé dans cette ville, et qu'on avait retrouvées chez un marchand du pont de Wedde.

Puis un certain Dr H..... parut à Berlin avec de très-belles poésies posthumes de Mendelssohn en langue hébraïque, et dont il demandait une très-forte somme aux éditeurs. Ceux-ci regardèrent le travail comme précieux et envoyèrent les poésies au prédicateur Jallowitz, de Leipzig, qui devait revoir l'édition. Jallowitz trouva le trésor suspect. Car il est connu que Mendelssohn n'était rien moins que poète, et il n'existait de lui qu'une seule pièce de poésie en allemand, qu'il fit pour l'anniversaire de sa femme, et une autre en hébreu sur le retour de Frédéric-le-Grand après la guerre de sept ans.

Jallowitz fit des recherches qui le conduisirent au résultat suivant : Il y a 40 ans, le docteur susdit publiait une feuille périodique où se trouvaient des poésies en langue hébraïque, qui provenaient la plupart du poète hébreu Moïse Mendelssohn, de Hambourg. Cette feuille eut bientôt une fin malheureuse, et il resta dans les mains du docteur diverses compositions, que l'auteur ne jugea pas valoir la peine d'être redemandées.

Parmi celles-ci se trouvaient les poésies hébraïques que le rusé docteur voulait convertir en argent.

Jallowitz les renvoya à Berlin avec l'observation que lesdites poésies étaient très-belles, il est vrai, mais que l'auteur n'était pas le philosophe défunt, mais bien son homonyme le poète vivant à Hambourg.

Pour faire opposition, l'anecdote suivante mérite d'être rapportée. Le premier écrit de Mendelssohn fut un commentaire de la logique de Maimon. Mendelssohn en fit présent à un Polonais voyageur, nommé Jankowsky, qui, en faisant la seconde édition fit mettre après le titre: Rédigé et publié par le rabbin Jankowsky.

Quelle fut la vengeance du philosophe ?

Lorsque celui-ci, à la prière instante de la Communauté, composa un sermon et la pièce de poésie précédemment citée, sur le retour du roi, il fit mettre en tête de l'ouvrage : Rédigé et publié par le rabbin Jankowsky.

« Si ce Polonais, écrivait Mendelssohn à Lessing, a rédigé mon commentaire, il peut bien être le père de ces pauvres enfants ».

Il nous reste à signaler un fait plus grave et aussi plus récent. Un philologue du nom de Charles Rambach a osé publier à Stuttgard, et sous son propre nom, le Glossarium eroticum linguæ latina, de M. Pierrugues, sans oublier un seul mot depuis la préface, jusqu'à

la fin. « J'ai voulu », nous mande l'un de nos abonnés, M. Tn. M., D. M., à Chalons-sur-Marne, « me rendre compte de la fidélité avec la» quelle cette copie avait été faite, et j'ai trouvé dans ces deux ouvra»ges le même nombre de mots faisant tête d'articles, c'est-à-dire : » 1995. Sous ce rapport, le ferè duorum millium sermonum an>> noncé dans le titre est parfaitement exact. L'ouvrage de M. Pierru» gues a paru en 1826 et celui de M. Charles Rambach en 1833. >> M. Pierrugues a intitulé son ouvrage : Glossarium eroticum linguæ » latina; M. Rambach a intitulé le sien: Thesaurus eroticus linguæ » latinæ, etc. (1), ce qui fait que les bibliophiles sont indignement » trompés et que j'ai été moi-même victime de cette supercherie. Il » n'y a donc que les deux premiers mots des titres de ces deux » ouvrages qui diffèrent, et il y a en plus sur le folio de la couver>>ture de la soi-disant publication de M. Rambach, un titre très-long, >> en langue allemande, qui n'est que la périphrase du titre de » M. Pierrugues (2) ».

M. Ch. Rambach n'est pas, comme on le voit, un vulgaire plagiaire, mais un éhonté........... contrefacteur, que tous ses compatriotes flétriront lorsqu'ils connaîtront ce charlatanisme si peu en usage chez eux. J. M. Q.

RETROSPECTIF.

Dans une lettre adressée à M. A. D.-B., à Grenoble, imprimée page 194, nous avons dit d'un ouvrage faussement attribué à Llorente:

« Quant à la traduction espagnole des Aventures de Faublas, » qu'aurait faite Llorente, c'est, au dire d'un bibliophile espagnol très>> distingué, que j'ai l'avantage de recevoir quelquefois chez moi, >> tout simplement une infamie qu'on prête gratuitement à ce digne

>> Llorente ».

Il n'y a point dans ce paragraphe d'appréciation émise sur le roman Louvet il y a une défense de Llorente, qui, d'après sa position et son caractère, n'a pu traduire un roman quel qu'il fût. Une malveillante critique fait dire à M. S. P., dans le « Bulletin du Bibliophile belge, t. XI, page 316: « Une traduction espagnole de Faublas (Paris, 1821, 4 vol. in-12) a été attribuée au célèbre Llorente, mais « le Quérard, archives d'histoire littéraire » (nos 5 et 6, mai-juin 1855, page 194), dit que c'est une infamie (?) qu'on prête gratuitement à Llorente. «Le

(1) Stuttgartiae, MDCCCXXXIII. Typis Hasselbrinkianïs. Apud Paulum Neff, bibliopolam, in Commisione, in 8 de vj et 312 pages.

(2) Ainsi conçue: Erotischer Sprachschatz der Römer. Mit mehreren tausend Citaten aus Dichtern und Prosaisten, Studien und critischen Erläuterungen. Erotographie für Freunde und Kenner des Alterthums; von Carl Rambach.

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