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romains (1). Ce changement vers les limites des Alpes graies et pennines, pouvait être motivé dans ce fait que cette dernière province a appartenu plus longtemps à l'Italie que la Viennoise et le reste de l'ancienne Narbonnoise.

Dans cette hypothèse, on parvient d'abord à fixer, d'une manière satisfaisante, les deux stations de Ad Publicanos et de Casuaria; mais le système est inap plicable au reste de la voie; car il déplace Genaba et Lemencum, deux stations sur la position desquelles il n'y aucun doute.

Force est donc de reconnaître avec Ammien Marcelin (XV.II.) que les voies qui traversaient le pays des Allobroges avaient été tracées d'après les mesures italiennes, à une époque où les traditions de la conquête se substituaient volontiers à l'exactitude géographique, et où le nom de provincia sans addition rejetait jusqu'au Rhône les confins politiques et administratifs de l'Italie.

Une seule leçon de l'Itinéraire d'Antonin s'accorde avec la position de Lemencum, celle donnée par les manuscrits de Madrid du Xive ou xv siècle. Nous allons la suivre. Le résultat nous permettra d'apprécier et de remplir les lacunes des autres. (Sera continué.)

BIBLIOGRAPHIE

DUCIS.

Voici les noms des familles anciennes sur lesquelles M. Borel d'Hauterive a donné une notice spéciale:

Allinges, Andrevet, Angeville, Balaison, Ballan, Balon, Bellegarde, Berliet, Berthollet, Bertrand, Bertrier, Blonay, Boigne, Bolomier, Buttet, Candie, Capré de Mégève, La Chambre, Chevron, Chignin, Chissé, Constantin, Contamine, Conzié, Corgenon, Costa de Beauregard, Croyson, Escrivieux, Faucigny, Favre, La Fléchère, Foncet de Montailleur, Foraz, Garnerin de Montgelaz, Genève ou Genevois, Hauteville, Ivoley, Jaillet de Saint-Cergues, Laforest, Lazary, Lescheraine, Leuctre, Lucinge, Maillard de Tournon, Maistre, Mareschal, Mareste, Mellarède, Menthon, Millet, Monet, Montbel, Montfort, Monthoux, Morand, Motz, Mouxy, Muffat de Saint-Amour, Oncieux, Orly, Passier, Perret d'Hauteville, Pillet-Will, Pingon, Pobel, Du Port, Portier, Rochette, Sacconay, Sales, Sallier de la Tour, Salteur, Seyssel, Sonnaz, Tamisier, Thiollaz, Thoire, Vialet de Montbel, Vichard de Saint-Réal, Villette, Viry.

Nous ne dirons rien de l'élégante exécution typographique du texte et des planches où sont représentés les blasons. C'est un agrément que le lecteur appréciera : car les avantages extérieurs ne nuisent jamais, pas plus aux bons livres qu'aux honnêtes gens.

A. LECOY DE LA MARCHE.

ANNUAIRE DE LA NOBLESSE, par M. Borel d'Hauterive. NOBILIAIRE DE SAVOIE (2).

Une des publications les plus importantes pour l'histoire des familles nobles est sans contredit celle que nous devons à M. Borel d'Hauterive, secrétaire de l'Ecole impériale des Chartes. Sous le titre d'Annuaire, qu'il ne faut pas prendre ici dans sa sèche et rigoureuse acception, le laborieux érudit nous tient au courant, depuis dix-huit ans, de tous les faits intéressants au point de vue nobiliaire et héraldique. En outre, des notices historiques puisées aux meilleures sources font revivre tour à tour, dans ce recueil, les vieilles et glorieuses maisons de la France, depuis leur origine jusqu'à nos jours. Mais cette fois un intérêt particulier s'y ajoute pour les habitants de la Savoie. Aucun livre spécial n'avait été consacré encore aux annales de la noblesse savoisienne, que des alliances et des sympathies réciproques unissaient depuis longtemps à la patrie française. L'auteur a rassemblé des matériaux épars pour combler cette lacune: son Annuaire de 1861 contient un nobiliaire de Savoie assez détaillé, qui retrace le passé et décrit le blason de chaque ancienne famille.

Ce travail, sans doute, n'est pas encore complet: mais le sillon est ouvert, espérons qu'il sera continué et creusé dans les années suivantes. Tel qu'il est, le Nobiliaire de Savoie peut déjà être d'une grande utilité pour les recherches historiques, en même temps qu'il fait connaître à la France entière les illustrations d'un pays plus riche sous ce rapport que beaucoup d'autres.

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CHRONIQUE

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ASSOCIATION FLORIMONTANE

Séance du 7 novembre 1861

PRÉSIDENCE DE M. J. REPLAT

M. le docteur Bouvier, vice-président de la Société, a ouvert la séance par la lecture d'une charmante poésie, due à une jeune personne de seize ans, sur une herborisation dans le Salève, à la recherche du Sabot de Vénus (Cypripedium calceolus, L.).

M. Lecoy de la Marche, archiviste de la Haute-Savoie, a donné lecture de plusieurs passages d'un Mystère manuscrit qui a pour sujet la vie de saint Bernard de Menthon. Cette lecture a captivé l'attention de l'assemblée par les détails curieux qu'elle a fait connaitre sur les mœurs du moyen-âge en Savoie.

M. J. Replat, président de la Société, a lu ensuite un fragment intéressant d'un ouvrage en préparation.

M. J. Philippe, secrétaire, a fait le dépouillement de la correspondance. Sur sa proposition, l'assemblée a nommé une comMurger; tous les biographes sérieux s'accordent à dire que cet mission chargée de rechercher le lieu de naissance de Henri écrivain, de regrettable mémoire, est originaire de la Savoie, mais aucun ne cite sa ville natale

A la fin de la séance, les dons ou échanges suivants ont été déposés sur le bureau :

1° Cartulaire de Notre-Dame de Paris; don de S. Exc. M. le Ministre de l'Instruction publique;

2 Cartulaire de Savigny; id;

3 L'éclaircissement de la langue française, par Jean Palsgrave; id.

4 Comptes et dépenses de la construction du château de Gaillon; id.

5 Journal d'Olivier Lefèvre d'Ormesson, t. I; id.

6° 35 ouvrages sur différentes matières; id.

7° Mémoires de l'Académie impériale de Dijon; 2a série, t. VIII; année 1860;

S' Bulletin de l'Académie delphinale; 2o série, t. I, 1856-1860;

9° Mémoires de la Société dunkerquoise, pour l'encouragement des sciences, etc., 1860-1861.

10° Mémoires de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève; t. XVI, 4 partie;

11° Atti della Società italiana di scienze naturali, vol. III, fasc. II, f. 6 à 41. Milan;

12 Mémoires et documents de la Société d'histoire de la Suisse romande, t. XVIII, 1re liv. Lausanne.

13" Bulletin de la Société savoisienne d'histoire et d'archéologie, 1861-1862, 1o numéro.

14 Travaux de la Société d'histoire et d'archéologie de la Maurienne, 2o bulletin, 1860;

15o Bulletin mensuel de la Société d'agriculture de la Savoie ; n° 9;

г

16 Le mouvement littéraire dans l'Académie de Grenoble, depuis le 1er janvier 1858, par M. Antonin Macé, professeur d'histoire à la faculté de Grenoble. Don de l'auteur;

17° Lettres rogatoires en France et dans les Etats sardes, par M. L.-A. Eyssautier, de Grenoble. Don de l'auteur;

18 Bulletin bibliographique de la Savoie, 5 année, 1860; par M. F. Rabut. Don de l'auteur;

49 Numismatique vallaisanne; époque merovingienne, par M. J.-E. d'Angreville. Don de l'auteur;

20° Chants prosaïques, par M. Paul-Ernest de Rattier; Paris 1861. Don de l'auteur;

21° Description du pays des Ségusiaves, avec le supplément, par M. A. Bernard; Paris, 1850 Don de l'auteur;

22° Ortografia sarda, etc, 2 vol, par le professeur Giovani Spano, bibliothécaire de l'université de Cagliari. Don de l'auteur;

23° Projet d'histoire universelle, etc, par le baron Ernest Roguet, député de la Gironde; Paris, 1864. Don de M. le général comte Roguet;

24. Cours élémentaire d'Agriculture, par M. Fleury Lacoste; 1861. Don de l'auteur;

25° Carte des anciens glaciers du versant italien des Alpes, par M. G. de Mortillet. Don de l'auteur;

26° Erminia Buniva-Cambieri. Don de M. F. Delachenal, conseiller à la Cour d'appel de Cagliari (Sardaigne);

27° Bibliothèque universelle de Genève, 1861; no 43, 44, 45, 46; 28° Deux brochures. Don de M. J. Replat;

29 Notre-Dame de Savoie, etc.; par M. l'abbé Grobel, 1864. Don de M. C. Burdet.

30 La Gazette de Savoie; Chambéry.

31o Le Léman; Evian.

32° Journal des connaissances médicales et pharmaceutiques, du docteur Caffe ; Paris.

L'assemblée a voté des remerciments à tous les donateurs,

Le 7 septembre 1861 a été un jour de fête pour la Société d'histoire et d'archéologie de Chambéry; elle se trouvait réunie sous la présidence de M. Rabut François, éloigné de sa ville natale depuis plus d'une année. L'assemblée était nombreuse; chacun avait eu à cœur de donner un nouveau témoignage de son affection et de son dévouement au savant modeste qui a consacré son intelligence et ses lumières à faire connaître la Savoie.

On sait que M. F. Rabut est l'âme de la Société d'histoire et d'archéologie de Chambéry; et bien qu'il soit aujourd'hui séparé de ses collegues, son influence contribue puissamment à maintenir la Société dans la voie excellente qu'elle a suivie jusqu'à ce jour.

M. Croisollet, notaire à Rumilly, nous écrit qu'on a decouvert, le 19 octobre dernier, dans le Val-de-Fier, ancienne voie romaine près de Rumilly, en creusant pour les fondations d'un mur de soutènement, plusieurs rouleaux de pièces romaines. Les ouvriers, en faisant cette découverte, ont crié au trésor ! Il y en

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On a tout récemment découvert, dans la plaine des Fins, voisine d'Annecy, une matrice de sceau remontant au quatorzième siècle environ, et en état de conservation parfaite. Elle est en cuivre, d'une forme ovale brisée, de la grandeur d'un œuf, et munie d'une poignée. L'empreinte représente la Vierge debont sous un dais gothique, et tenant l'enfant Jésus dans ses bras; au-dessous est un écusson orné d'une croix épiscopale. La légende qui est autour est ainsi conçue:

S. r. p. d. jo. orioli, sedis ap.ce protho.rius vicarius habundancie.

C'est-à-dire Sigillum reverendi patris domini Johannis Orioli, sedis apostolicæ prothonotarius, vicarius Habundancia. Cet intéressant monument a éte réuni par M. E. Serand aux collections de l'Association florimontane.

Volta, le grand physicien dont le merveilleux appareil destiné à la production de l'électricité a popularisé le nom et a puissamment contribué à l'invention de la télégraphie, a laissé en mourant des manuscrits et des instruments de physique.

L'institut scientifique de Milan, sachant que sa famille, tombée dans la detresse, cherchait à vendre le tout, a saisi cette occasion de montrer son attachement à la mémoire de Volta. Il a décidé que 100,000 francs seraient payés à la famille.

Des souscriptions ont été immediatement ouvertes dans ce but. La municipalité de Como, la ville natale de Volta, a souscrit l'une des premières pour la somme de 20,000 francs.

Les sciences viennent de faire une perte immense M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire a succombé le lundi 11 du courant, à dix heures du matin, à une maladie qui le tenait, depuis peu de temps, éloigné de ses travaux.

M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire était membre de l'Institut (Académie des Sciences), conseiller et inspecteur général honoraire de l'instruction publique, professeur administrateur au Muséum d'histoire naturelle (dont il était directeur au moment de sa mort), professeur de zoologie à la Faculté des Sciences, membre libre de l'Académie impériale de Médecine. C'est à ce savant qu'on doit la fondation de la Société zoologique d'acclimatation, dont la presidence, qu'il occupait encore, lui fut décernée dès 1854. M. Geoffroy Saint-Hilaire n'était àgé que de cinquantesix ans. Digne fils de l'illustre Etienne Geoffroy Saint-Hilaire, mort en 1844, il était né le 16 décembre 1805, au Jardin des Plantes de Paris.

Ses obsèques ont eu lieu le 13. On remarquait dans l'assistance, M. le ministre de l'Instruction publique, le maréchal Vaillant, le prince Lucien Napoléon, etc. Cinq discours ont été prononcés sur la tombe, par M. Milne-Edward, membre de l'Institut; par M. Robinet, président de l'Académie impériale de Médecine; par M. De Launay, de la Faculté des Sciences, par M. Drouyn de Lhuis, au nom de la Société générale d'acclimatation, et par M. Pasteur, au nom de la Société de secours des amis des sciences.

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existait dans un parfait état de conservation sur un mur en briques crues faisant partie de la maison d'un Turc. Ce fait vient jeter une nouvelle lumière sur la vie d'Auguste, sur les honneurs qu'il avait reçus pendant sa vie, etc. C'est ainsi qu'Auguste y parle du pouvoir absolu qu'il a refusé, de la préfecture annuelle qu'il a exercée, du consulat à vie dont il n'a pas voulu, de la préfecture des mœurs, de son titre de prince du sénat; il y donne même la date de son testament, toutes choses qui manquent dans le latin. - Voilà pour l'archéologie une de ces bonnes fortunes qui deviennent de plus en plus rares, et les nombreux adeptes qu'elle possède en tous lieux trouveront là une feconde matière pour piquer à la fois leur zèle et leur sagacité.

L'expédition anglaise entreprise sur le Niger était retournée, d'après les dernières nouvelles, à l'embouchure de la Rivière, où le navire l'Espoir l'avait accompagnée pour la protéger. Le docteur Baikie et son aide ont été trouvés vivants et en bonne santé après une résidence de deux années parmi les indigènes, pendant lesquelles ils furent sans communication avec des Européens. Le docteur Baikie resta au confluent. L'Espoir fit voile pour Ascension après avoir quitté la Rivière.

Découverte d'un nouveau mammifère. Un hardi baleinier, le capitaine Maclenchar, vient de découvrir dans la baie d'Hudson un mammifère nouveau qui avait échappé jusqu'ici à l'attention des naturalistes. Cet animal, qui rappelle un peu le Lamentin, mais qui est beaucoup plus gros, ne pese pas moins de 3,222 livres. Il peut vivre dans l'air et dans l'eau, mais il ne supporte l'air que le jour et l'eau que la nuit, de telle sorte que durant les longues nuits de ces solitudes polaires, il est presque toujours caché dans les profondeurs de la mer. Quand il est à terre, il a huit pattes armées chacune de cinq doigts assez semblables à des pattes d'ours; mais se plonge-t-il dans l'eau, ses doigts se dilatent et deviennent de véritables nageoires. L'animal saisi par le capitaine Maclenchar est une femelle qui possède tous les accessoires nécessaires pour allaiter ses petits. Comme les yeux du crocodile, ceux de cet amphibie ont une triple paupière. La nature ne lui a pas refusé le don de la voix et il pousse des cris plaintifs qui émeuvent les cœurs les moins sensibles. Il se nourrit d'algues marines et parait inoffensif. On croit que c'est l'animal inconnu rencontré par sir John Franklin en 1847 et dont cet infortuné navigateur, surpris par les glaces, n'a pu donner qu'une relation fort incomplète.

Bien que sa place dans la série zoologique ne soit pas encore irrévocablement arrêtée, on peut dès à présent le ranger dans la famille des cétacés herbivores qui ont la faculté de ramper sur la terre et qui viennent, à la façon des ruminants, paitre l'herbe sur le rivage de la mer. Cette analogic de régime a valu à ces animaux de la part des voyageurs le nom de veau marin par lequel on les désigne souvent.

Le Pronostiqueur du temps. L'amiral anglais Fitz-Roy, directeur du bureau des observations méteorologiques, vient d'envoyer à l'Academie des sciences de Paris un petit appareil très simple, destiné, comme le baromètre, à indiquer les variations atmosphériques. Le baromètre est un instrument d'un prix élevé, les observations sont difficiles à faire, difficiles à interpréter. Le nouveau Pronostiqueur du temps, au contraire, est d'un prix très modique et facile à construire et à observer. Nous croyons qu'il peut rendre de grands services aux agriculteurs.

La science de la connaissance du temps n'est pas encore constituée. On conçoit facilement son objet: connaitre les lois qui régissent l'atmosphère, et prévoir au moyen de ces lois les variations du temps. Mais comment arriver aux lois, sinon par les faits bien interprétés et bien classés? Or ici les faits manquent et l'on n'a que des pronostics d'une valeur plus que douteuse. Ces pronostics toutefois, malgré leur insuffisance, doivent être pris en considération.

Quand les mouches piquent et que les abeilles sont méchantes, -c'est un signe d'orage; quand les hirondelles volent en rasant la terre et les eaux, c'est un indice de pluie; lorsque les abeilles s'écartent peu de leur ruche, les pigeons reviennent tard au colombier, les poules se roulent dans la poussière plus que d'habitude, on peut prédire une pluie prochaine; de même si les grenouilles coassent longtemps, si les vers sortent de terre en grande quan

tité, si les taupes fouillent plus que de coutume, quand la lune est environnée d'une lueur blanchâtre. la pluie est certaine, et lorsque les étoiles perdent de leur clarté, c'est un signe d'orage. La chouette qui crie pendant le mauvais temps, les nuages qui, après la pluie, roulent près de la terre, annoncent le retour du beau temps. Lorsque les corbeaux croassent le matin, lorsque l'horizon est sans nuage, ou que les nuages, le soir, se forment à l'ouest et se colorent en rouge, cela indique un temps sec.

La direction des vents peut donner aussi de précieuses indications pour un lieu déterminé, car le même vent n'indique pas toujours le même temps dans tous les pays: la latitude du lieu, son altitude, le voisinage des hautes montagnes, de la mer, peuvent changer la direction initiale des vents.

L'organisation des animaux, les phénomènes naturels peuvent donc donner des renseignements sur les variations du temps, mais l'agriculteur n'est pas tenu à tant de science, et lui demander toutes ces connaissances, ce serait lui demander l'impossible. Un instrument facile à observer qui lui donnerait toutes les indications dont il a besoin, ferait bien mieux son affaire. Le problème a souvent été abordé mais sans succès. Quoiqu'il en soit, l'instrument de l'amiral Fitz-Roy est un instrument très simple, que chacun peut construire, qui est d'une grande sensibilité et donne des indications très exactes. Il se compose d'un tube en verre de 50 centimètres de hauteur sur 8 de circonférence, rempli aux trois quarts d'une dissolution dans de l'alcool pur de deux parties de camphre, d'une partie de nitrate de potasse et d'une partie de sel ammoniacal. On y verse de l'eau distillée jusqu'à ce que les sels tenus en dissolution apparaissent et se précipitent en partie; puis on ferme le tube et on le suspend le long d'un mur.

Si les particules solides reposent au fond du tube et si le liquide est parfaitement clair, le temps doit être beau. Les petits cristaux flottent dans le liquide lorsque le temps tourne à la pluie. Avant une tempête, les cristaux surnagent à la partie supérieure, s'y groupent en une sorte de rameau qui se forme du côté d'où viendra la tempête. Une cristallisation étoilée est un indice de neige et de gelée. Un trouble dans le liquide pronostique une perturbation prochaine.

Un de nos amis se sert depuis quelque temps de ce petit instrument et n'a jusqu'ici qu'à s'en louer.

Nous lisons dans le Courrier des Etats-Unis que les habitants d'Hampeisville, dans le Dacotah, s'apercevaient depuis quelque temps que d'épaisses colonnes de fumée s'exhalaient de la vallée de la Tête-Plate. non loin de la vallée des Nez-Percés. Plusieurs d'entre eux s'étaient rendus sur les lieux et n'avaient reconnu aucune trace d'incendie. Seulement la fumée semblait sortir des entrailles de la terre par plusieurs fissures L'opinion générale voulait que ces symptômes fussent les précurseurs de l'éruption d'un nouveau volcan, mais les savants de l'endroit faisaient observer avec raison que le sol environnant était un terrain d'alluvion et n'avait rien de commun avec les territoires où se produisent d'ordinaire les phénomènes volcaniques. Enfin, le mystère s'est expliqué, et on a decouvert que d'immenses forêts souterraines, recouvertes par de récentes alluvions, étaient en feu. L'air nécessaire à leur combustion pénétra par la caverne de Kinglake, au fond de laquelle personne n'est jamais allé. On ne sait au juste combien de temps pourra durer cet embrasement, qui gène de plus en plus les citoyens d'Hampeisville. De pareils incendies ont duré parfois des années, laissant après eux d'excellentes couches de tourbe et de charbon propres à être exploitées plus tard.

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Le magnétisme animal et le somnambulisme naturel ou artificiel présentent tant d'observations curieuses, même pour la personne qui n'admet pas leur réalité, qu'un vif intérêt s'éveille toujours à leur nom seul. Cette étude se rattache, en effet, aux phénomènes les plus élevés de la physiologie et du système nerveux. Longtemps on a nie l'existence du magnétisme; tantôt on a soutenu qu'il ne pouvait produire aucun résultat, et tantôt on a prétendu qu'il était très nuisib.e. Singulières contradictions devant lesquelles ne reculent pas des esprits prévenus! Cependant, des preuves multipliées démontrent que le traitement magnétique augmente la force vitale des individus malades... Enfin, forcée dans ses derniers retranchements, la prévention a dû plier devant l'existence de cet agent qu'elle niait, parce qu'elle ne pouvait le saisir: mais, en admettant à regret cette existence, les mêmes hommes ont persisté à contester la sincérité de ses effets. Si des crises, disentils, si des guérisons, si des faits étranges se sont produits à l'ombre du magnétisme, n'est-ce pas un jeu de l'imagination, cette folle du logis, comme parle sainte Thérèse? Ou bien, n'est-ce pas l'effet d'une honteuse charlatanerie? Tout vrai magnétiseur, ajoute-t-on, est persuadé, mais il est dupe lui-même. Le magnétisme est réel pour ceux-là seulement qui y croient: or, qui a jamais osé dire dans aucune science, commencez par croire, afin que je vous prouve ensuite ma doctrine? Si le magnétisme existe sans la croyance, montrez-le-nous séparé d'elle, afin que nous l'admettions!

Comme toute lutte, celle ci a compté de nombreux athlètes; parmi ceux qu'animait une profonde conviction, les uns, modestes et patients, ont poursuivi leur ceuvre dans le silence du cabinet; chaque jour leur apportait de nouveaux matériaux, dont par malheur la classification, toujours différée, n'a pu s'accomplir; les autres, ardents, audacieux, impatients de la renommée, impru

dents peut-être, ont affronté trop tôt la publicité; armés à la légère, ils se sont présentés au combat, allant même. jusqu'à ouvrir champ clos, où un succès incomplet, si ce n'est un échec, leur fut réservé. L'insuccès de la démonstration apportait alors un obstacle de plus à ce que la science nouvelle fût accueillie: pour une expérience manquée ou incomplète, on rejetait aveuglément tout un monde de faits; comme si l'on eut été en droit d'exiger à heure fixe une épreuve décisive de ces capricieux phénomènes, à peine entrevus, et sur lesquels la moindre circonstance de temps, de lieu ou de personne, exerce presque toujours une influence que l'on ne peut mesurer! Les affections bizarres, qui ordinaire ment rendent le sujet plus impressionnable au fluide. magnétique, sont-elles donc les seules qui doivent rencontrer infaillibles les prévisions de nos modernes Esculapes? On regarde en pitié les croyants, parce qu'ils sont persuadés que la volonté est le principal moyen d'accumuler l'influx vital et de le pousser dans un corps voisin, tout comme la volonté envoie dans nos muscles le pouvoir de les remuer... Mais si cette volonté pousse le fluide nerveux à l'extrémité de ma main ou de mon pied, serait-il absolument impossible qu'elle l'élançàt au-delà de mes membres dans un individu voisin ? Si l'on peut jeter des regards ardents de colère ou d'amour, pourquoi ne transmettrions-nous pas aussi d'autres influences? Si l'approche d'une personne aimée agit à distance même sur un aveugle, pouvons-nous nier l'existence d'effluves, insaisissables il est vrai, et néanmoins réelles et certaines ?

Dans le camp adverse on rencontrait une opposition systématique, un parti pris d'expliquer par d'autres causes connues ce que l'on ne pouvait plus nier; et plus souvent encore, la persistance à employer cette espèce de force d'inertie qui consiste à tout nier; ces différentes circonstances, dis-je, ont étouffé la lumière qui commençait à se faire.

Parfois aussi les esprits purement littéraires prirent part à la lutte, et plusieurs ont su trouver dans le magnétisme un nouvel élément de vie pour leurs conceptions. Là, aussi, les deux camps se sont retrouvés en présence, et nous devons le reconnaître, celui des croyants a triomphé du persifflage de ses adversaires.

Mon père se range parmi les hommes prudents et sérieux convaincu lui-même, par une expérience constante de plus de quarante années, il ne crut toutefois devoir présenter l'ensemble de ses travaux qu'au mo

ment où son œuvre aurait été rendue complète; mais le nombre de ses jours trop tôt comptés à laissé cette œuvre inachevée. Ses laborieuses observations sur le somnambulisme, la catalepsie et le magnétisme m'ont plusieurs fois appelé comme témoin de leurs surprenants effets, et cela me permet d'en présenter une rapide esquisse.

Etranger aux sciences médicales, je dois bannir toute discussion scientifique je ne puis m'ériger en juge; je resterai donc simple narrateur, mais consciencieux et digne de foi, parce que je puis dire : j'ai vu (1).

Vers la fin du mois d'août 1838, se trouvait à Aix-lesBains une dame genevoise. Belle, bonne et gracieuse, tout paraissait lui sourire: son cœur de jeune épouse s'ouvrait aux douces émotions de l'amour maternel, lorsqu'une spéculation commerciale trop hasardée vint détruire ce bonheur. Son mari, M. Désiré S..., fut forcé de s'expatrier; et son enfant, suçant un lait envenimé par le chagrin, s'envola bientôt après vers une autre patrie.

Des coups si rudes, frappant un tempéramment délicat, frèle et nerveux, hâtèrent l'explosion des prédispositions que Me Eugénie S... avait à une maladie du cerveau. Longtemps suspendue entre la vie et la mort, la malade supporta pieusement sa destinée. Une heureuse réaction écarta enfin tout danger sérieux ; toutefois, d'atroces douleurs à la tête résistaient à la science médicale. Depuis trois mois, la paupière de Me Eugénie n'avait accordé qu'à la fatigue de rares instants de sommeil. Des phénomènes étranges commençaient à se produire spontanément. Ce fut alors que je vins à Aix, et que je connus cette intéressante jeune femme.

Les circonstances qui avaient précédé le développement de la maladie et quelques autres observations de mon père lui firent pressentir que le magnétisme pourrait agir ici puissamment. Ses premiers essais procurèrent effectivement un sommeil plus prolongé et plus réparateur, néanmoins il restait presque toujours traversé par des songes pénibles.

Ce demi-succès était déjà beaucoup; un incident particulier donna à mon père l'espérance d'obtenir davantage. Sortie de l'état de somnolence, la malade trouvait un vif plaisir dans la musique: ses contractions nerveuses en devenaient sensiblement moins fortes. Puisque la musique, par elle seule, calmait les souffrances de Mme Eugénie et puisque les passes magnétiques réussissaient à donner le sommeil, n'était-il pas naturel de réunir ces deux moyens? Un jour donc que quelques instants avaient suffi pour endormir la maiade, on mit en jeu une harmonie douce composée de flute et gui

tare.

Me Eugénie, jusqu'alors languissamment étendue sur un lit de repos, se leva brusquement, les yeux fermés. Elle appuya sa tète contre le mur opposé aux musiciens, prêta quelque temps l'oreille, puis, frappant des mains en mesure, elle s'avança vers nous. Sa démarche restait encore maladive, hésitante: mais quel changement dans ses traits! Un bien-être vivement senti était empreint sur son visage et dans tous ses mouvements. Ceux-ci obéissant avec docilité aux pensées de la musique, étaient

(1) Il est à remarquer que, pour apporter plus de rapidité à mon récit, j'ai groupe, dans une seule soirée, les faits dont je fus témoin, bien qu'ils ne se soient produits qu'à diverses époques, et pour quelques-uns même, chez des personnes différentes.

comme elle tour-à-tour souples, gracieux, rompus ou énergiques.

Sur le point de nous atteindre, la malade s'arrêta, promena son bras en cercle autour d'elle, le fixa vers un coin de la chambre et s'avança dans la direction toujours indiquée par son bras étendu. Nous étions impatients de deviner son projet, car de seconde en seconde, ses pas paraissaient plus fermes et plus pressés. Parvenue au but qu'elle indiquait, Me Eugénie tourna avec précaution le bouton d'une armoire. Puis, avant de passer outre, se hata de souffler sur ses doigts, à peu près comme l'aurait fait une personne touchée par un objet brûlant. Nous remarquàmes alors que le bouton était formé de deux métaux. Au point de leur jonction se développait sans doute un courant électrique insensible pour nous, mais que bien souvent, depuis lors, j'ai vu se révéler sous l'exquise sensibilité procurée par le sommeil magnétique.

L'armoire étant ouverte, la malade en tira une longue chaine en or qu'elle posa sur son front, et sa démarche, auparavant chancelante, devint assurée et comme libre de tout effort.

De temps à autre, l'influence des passes magnétiques diminuait: du moins nous le présumâmes à l'expression de souffrance qui, pour quelques instants, semblable à un voile, couvrait les traits de Me Eugénie. Alors celle-ci se rapprochait des musiciens; elle s'appuyait avec délices contre les instruments pour en sentir plus entières toutes les vibrations: ses mains cherchaient à saisir les cordes sonores, à les rouler autour de sa tête; quelquefois elles en formaient comme un invisible faisceau qu'elles déposaient sur la partie du corps la plus endolorie. Une des remarques qui caractérisèrent le mieux cette phase de la crise fut que la malade, musicienne fort ordinaire dans son état normal, nous signalait alors par ses gestes impatients et avec une justesse remarquable, le plus léger désaccord.

L'on n'avait encore joué que des morceaux d'harmonie: une valse se présenta; c'était une composition de Strauss fort répandue. Me Eugénie en écoutala première partie avec une singulière attention; puis, sans doute un souvenir riant s'éveilla dans son coeur, car, le sourire aux lèvres, elle plia sa démarche au rhythme musical, et détachant la chaine d'or, son premier talisman, elle la balança joyeusement devant elle et semblait l'offrir à quelqu'un. Je m'approchai, saisissant l'une des extrémités de la chaîne, et nous fimes quelques tours de valse. Tout-à-coup ma danseuse s'arrête, pousse un soupir et laisse peser sur mon bras le sien enroidi; sa gaité avait fui comme un songe; des pleurs inondaient son visage. C'était la première apparition des crises de catalepsie. Ayant assisté déjà plusieurs fois à des accidents de cette nature, il m'était facile de faire cesser celui-ci. La joie reparut aussitôt et Mme Eugénie, se livrant de nouveau au plaisir, reprit la valse commencée. Jusqu'alors le plus profond silence avait régné entre nous deux ; ma danseuse murmura enfin quelques mots; je ne pus en saisir le sens ni répondre. Etonnée de ce silence, la malade passa lentement sa main à une faible. distance de ma figure sans la toucher et s'écria d'un ton de dépit: « Ce n'est pas lui! Le mouvement qu'elle fit alors pour se séparer de moi fut si brusque, qu'elle oublia entre mes mains la chaîne d'or: sa démarche redevint aussitôt faible et chancelante.

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