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Les observations qu'a faites M. Dodard sur les différences de la voix de parole et de la voix de chant dans le même homme, loin de contrarier cette explication, la confirment; car, comme il y a des langues plus ou moins harmonieuses, dont les accens sont plus ou moins musicaux, on remarque aussi dans ces langues que les voix de parole et de chant se rapprochent ou s'éloignent dans la même proportion: ainsi comme la langue italienne est plus musicale que la françoise, la parole s'y éloigne moins du chant ; et il est plus aisé d'y reconnoître au chant l'homme qu'on a entendu parler. Dans une langue qui seroit tout harmonieuse, comme étoit au commencement la langue grecque, la différence de la voix de parole à la voix de chant seroit nulle; on n'auroit que la même voix pour parler et pour chanter: peut-être est-ce encore aujourd'hui le cas des Chinois.

En voilà trop peut-être sur les différens genres de voix : je reviens à la voix de chant, et je m'y bornerai dans le reste de cet article. Chaque individu a sa voix particulière qui se distingue de toute autre voix par quelque différence propre, comme un visage se distingue d'un autre; mais il y a aussi de ces différences qui sont communes à plusieurs, et qui, formant autant d'espèces de voix, demandent pour chacune une dénomination particulière.

Le caractère le plus général qui distingue les voix n'est pas celui qui se tire de leur timbre ou de leur volume, mais du degré qu'occupe ce volume dans le système général des sons.

On distingue donc généralement les voix en deux classes; savoir, les voix aiguës, et les voix graves. La différence commune des unes aux autres est à peu près d'une octave; ce qui fait que les voix aiguës chantent réellement à l'octave des voix graves, quand elles semblent chanter à l'unisson.

Les voix graves sont les plus ordinaires aux hommes faits; les voix aiguës sont celles des femmes les eunuques et les enfans ont aussi à peu près le même diapason de voix que les femmes, tous les hommes en peuvent même approcher en chantant le fausset: mais, de toutes les voix aiguës, il faut convenir, malgré la prévention des Italiens pour les castrati, qu'il n'y en a point d'espèce comparable à celle des femmes ni pour l'étendue ni pour la beauté

du timbre. La voix des enfans a peu de consistance, et n'a point de bas; celle des eunuques, au contraire, n'a d'éclat que dans le haut; et pour le fausset, c'est le plus désagréable de tous les timbres de la voix humaine : il suffit, pour en convenir, d'écouter à Paris les choeurs du concert spirituel, et d'en comparer les dessus avec ceux de l'Opéra.

Tous ces différens diapasons réunis et mis en ordre forment une étendue générale d'à peu près trois octaves, qu'on a divisées en quatre parties, dont trois, appelées haute-contre, taille et basse, appartiennent aux voix graves; et la quatrième seulement, qu'on appelle dessus, est assignée aux voix aiguës: sur quoi voici quelques remarques qui se présentent.

I. Selon la portée des voix ordinaires, qu'on peut fixer à peu près à une dixième majeure, en mettant deux degrés d'intervalle entre chaque espèce de voix et celle qui la suit, ce qui est toute la différence qu'on peut leur donner le système général des voix humaines dans les deux sexes, qu'on fait passer trois octaves, ne devroit enfermer que deux octaves et deux tons: c'étoit en effet à cette étendue que se bornèrent les quatre parties de la musique long-temps après l'invention du contre-point, comme on le voit dans les compositions du quatorzième siècle, où la même clef, sur quatre positions successives, de ligne en ligne, sert pour la basse qu'ils appeloient tenor, pour la taille, qu'ils appeloient contratenor, pour la haute-contre, qu'ils appeloient mottetus, et pour le dessus, qu'ils appeloient triplum. Cette distribution devoit rendre, à la vérité, la composition plus difficile, mais en même temps l'harmonie plus serrée et plus agréable.

II. Pour pousser le système vocal à l'étendue de trois octaves avec la gradation dont je viens de parler, il faudroit six parties au lieu de quatre; et rien ne seroit plus naturel que cette division, non par rapport à l'harmonie, qui ne comporte pas tant de sons différens, mais par rapport aux voix, qui sont actuellement assez mal distribuées : en effet, pourquoi trois parties dans les voix d'hommes et une seulement dans les voix de femmes, si la totalité de celles-ci renferme une aussi grande étendue que la totalité des autres ? Qu'on mesure l'intervalle des sons les plus aigus des voix fé

On distingue encore les voix par beaucoup d'autres différences que celles du grave à l'aigu. Il y a des voix fortes dont les sons sont forts et bruyans; des voix douces dont les sons sont doux et flûtés; de grandes voix qui ont beaucoup d'étendue; de belles voix dont les sons

minines les plus aiguës aux sons les plus gra- | excellence, elle est déjà bannie de nos opéra ves des voix féminines les plus graves, qu'on où l'on ne veut rien de naturel; et, par la même fasse la même chose pour les voix d'hommes; raison, elle ne tardera pas à l'être de toute la et non-seulement on n'y trouvera pas une dif- musique françoise. férence suffisante pour établir trois parties d'un côté et une seule de l'autre, mais cette différence même, s'il y en a, se réduira à très-peu de chose. Pour juger sainement de cela, il ne faut pas se borner à l'examen des choses telles qu'elles sont, mais voir encore ce qu'elles pourroient être, et considérer que l'u-sont pleins, justes et harmonieux : il y a aussi sage contribue beaucoup à former les voix sur le caractère qu'on veut leur donner. En France, où l'on veut des basses, des hautes-contre, et où l'on ne fait aucun cas des bas-dessus, les voix d'hommes prennent différens caractères, et les voix de femmes n'en gardent qu'un seul : mais en Italie, où l'on fait autant de cas d'un beau bas-dessus que de la voix la plus aiguë, il se trouve parmi les femmes de très-belles voix graves qu'ils appellent contr'alti, et de trèsbelles voix aiguës qu'ils appellent soprani: au contraire, en voix d'hommes récitantes, ils n'ont que des tenori: de sorte que s'il n'y a qu'un caractère de voix de femmes dans nos opéra, dans les leurs il n'y a qu'un caractère de voix d'hommes.

A l'égard des chœurs, si généralement les parties en sont distribuées en Italie comme en France, c'est un usage universel, mais arbitraire, qui n'a point de fondement naturel. D'ailleurs n'admire-t-on pas en plusieurs lieux, et singulièrement à Venise, de très-belles musiques à grand choeur, exécutées uniquement par de jeunes filles?

le contraire de tout cela. Il y a des voix dures et pesantes; il y a des voix flexibles et légères; il y en a dont les beaux sons sont inégalement distribués, aux unes dans le haut, à d'autres dans le medium, à d'autres dans le bas : il ya aussi des voix égales, qui font sentir le même timbre dans toute leur étendue. C'est au compositeur à tirer parti de chaque voix par ce que son caractère a de plus avantageux. En Italie, où chaque fois qu'on remet au théâtre un opéra c'est toujours de nouvelle musique, les compositeurs ont toujours grand soin d'approprier tous les rôles aux voix qui les doivent chanter. Mais en France où la même musique dure des siècles, il faut que chaque rôle serve toujours à toutes les voix de même espèce; et c'est peutêtre une des raisons pourquoi le chant françois, loin d'acquérir aucune perfection, devient de jour en jour plus traînant et plus lourd.

La voix la plus étendue, la plus flexible, la plus douce, la plus harmonieuse qui peut-être ait jamais existé, paroit avoir été celle du chevalier Balthasar Ferri, Pérousin, dans le siècle dernier, chanteur unique et prodigieux, que III. Le trop grand éloignement des voix en- s'arrachoient tour à tour les souverains de l'Eutre elles, qui leur fait à toutes excéder leur rope, qui fut comblé de biens et d'honneurs portée, oblige souvent d'en subdiviser plu- durant sa vie, et dont toutes les muses d'Italie sieurs c'est ainsi qu'on divise les basses en célébrèrent à l'envi les talens et la gloire après basses-contre et basses-tailles; les tailles en sa mort. Tous les écrits faits à la louange de ce hautes-tailles et concordans, les dessus en pre- musicien célèbre respirent le ravissement, l'enmiers et seconds; mais dans tout cela on n'a- thousiasme, et l'accord de tous ses contempoperçoit rien de fixe, rien de réglé sur quelque rains montre qu'un talent si parfait et si rare principe. L'esprit général des compositeurs étoit même au-dessus de l'envie. Rien, disentfrançois est toujours de forcer les voix pour les ils, ne peut exprimer l'éclat de sa voix ni les faire crier plutôt que chanter : c'est pour cela grâces de son chant; il avoit au plus haut dequ'on paroît aujourd'hui se borner aux basses gré tous les caractères de perfection dans tous et hautes-contre qui sont dans les deux extrê- les genres; il étoit gai, fier, grave, tendre à mes. A l'égard de la taille, partie si naturelle sa volonté, et les cœurs se fondoient à son paà l'homme qu'on l'appelle voix humaine parthétique. Parmi l'infinité de tours de force qu'il

faisoit de sa voix, je n'en citerai qu'un seul : il montoit et redescendoit tout d'une haleine deux octaves pleines par un trille continuel marqué sur tous les degrés chromatiques, avec tant de justesse, quoique sans accompagnement, que si l'on venoit à frapper brusquement cet accompagnement sous la note où il se trouvoit, soit bémol, soit dièse, on sentoit à l'instant l'accord d'une justesse à surprendre tous les auditeurs.

On appelle encore voix les parties vocales et récitantes pour lesquelles une pièce de musique est composée; ainsi l'on dit un mottet à voix seule, au lieu de dire un mottet en récit; une cantate à deux voix, au lieu de dire une cantate en duo ou à deux parties, etc. (Voyez DUO, TRIO, etc.)

VOLTE, s. f. Sorte d'air à trois temps propre à une danse de même nom, laquelle est composée de beaucoup de tours et retours, d'où lui est venu le nom de volte : cette danse étoit une espèce de gaillarde, et n'est plus en usage depuis long-temps.

VOLUME. Le volume d'une voix est l'étendue ou l'intervalle qui est entre le son le plus aigu et le son le plus grave qu'elle peut rendre. Le volume des voix les plus ordinaires est d'environ huit à neuf tons; les plus grandes voix ne passent guère les deux octaves en sons bien justes et bien pleins.

UPINGE. Sorte de chanson consacrée à Diane parmi les Grecs. (Voyez CHANSON.)

UT. La première des six syllabes de la gamme de l'Arétin, laquelle répond à la lettre C. Par la méthode des transpositions on appelle toujours ut la tonique des modes majeurs et la médiante des modes mineurs. (Voyez GAMME, TRANSPOSITION.)

Les Italiens trouvant cette syllabe ut trop sourde, lui substituent, en solfiant, la syllabe do.

Z.

ZA. Syllabe par laquelle on distingue, dans le plain-chant, le si bémol du si naturel, auquel on laisse le nom de si.

T.III.

FIN DU TROISIÈME VOLume.

35

AVIS AU RELIEUR.

Placer ici la feuille des planches de musique.

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Fig. 1.

Cadence rompue. Cadences interrompues évitées. Pleine sans liaison A. Evitée avec liaison B.

A. Renversement de la Sixte ajoutée.

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Fig. 7.

Septieme.

Sixte ajoutée

Fig. 13.

Bâtons de quatre mesures. Baton de deux Trente-une mesures

Procédé de E. DUVERGER.

mesures.

à compter.

Carillon consonnant à neuf timbres.

B. F. de M. Rameau. Véritable B. F.

Notes ascendantes de tierce en tierce.

Fig. 8.

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Fig. 11. B fa si mi la

Fig. 10.

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