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Quel malheur, s'écrie le roi, si cet homme vient à mourir! Comment consoler la veuve et l'enfant?

Ah! Sire, reprend la dauphine, en les tirant de la misère ce sera du moins adoucir la cruauté de leur sort.

« Le roi promet une pension, et ordonne que son premier chirurgien aille

tous les jours visiter le blessé. Le paysan fut rappelé à la vie pour bénir son auguste bienfaitrice. »>

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Il n'est pas difficile, après tout cela, de comprendre pourquoi, lorsque la dauphine devint reine de France, sa popularité fut si vive. Jamais commencement de règne n'excita de témoignages d'amour et d'attachement plus unanimes. Un bijoutier fit une grande fortune en vendant, au lendemain de la mort de Louis XV, des tabatières de deuil, où le portrait de la jeune reine, placé dans une boîte noire, faite de chagrin, amenait ce calembour : « La consolation dans le chagrin. >>

La cour surtout cut de quoi se réjouir. La jeune reine, sans être elle-même une habile artiste, aimait les arts, et surtout la musique, qu'elle cultivait avec intelligence car elle ne se soucia jamais de jouer très bien ni de la harpe, ni du clavecin; mais elle était arrivée à déchiffrer à livre ouvert comme le meilleur professeur.

Surtout elle était passionnée pour le théâtre, et l'on put prévoir que l'on ne

serait plus à Versailles obligé, comme aux jours les plus brillants du règne précédent, d'opter entre l'austérité d'une Marie Leczinska et les charmes sédui

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sants d'une marquise de Pompadour : aussi gaie que vertueuse, la jeune reine allait redonner un éclat plus vif et de meilleur aloi aux divertissements de la

cour et particulièrement à ces représentations dramatiques qui avaient eu tant de succès du temps de la marquise.

Le théâtre à la cour n'était pas une innovation du xvIII° siècle. On sait combien Louis XIV, au moins pendant la période la plus brillante de son règne, était épris de ballets et de comédies. Toutes les comédies de Molière furent

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représentées devant lui, et plus d'un tiers d'entre elles furent composées expressément pour lui.

Louis XV n'avait donc fait, en offrant fréquemment à sa cour le plaisir des représentations théâtrales, que suivre les traditions de son grand prédécesseur. Ces représentations avaient lieu dans les différents châteaux royaux, à Choisy, à Marly, à Versailles, à Fontainebleau.

Dans cette dernière résidence surtout, c'était une grande affaire que de les organiser. Elles avaient lieu en effet environ trois fois par semaine, pendant cinq semaines; elles commençaient en général un peu avant le 10 octobre pour se terminer un peu après le 10 novembre. Comédie, tragédie, opéra, ballet, elles comportaient tous les genres. Un soir d'octobre 1762, par exemple, on donne l'Écossaise, de Voltaire, avec l'Amour médecin, de Molière, et c'est la première des deux pièces qui a le plus de succès. Le surlendemain, succès médiocre pour la Zelmire, de De Belloy. Au contraire, le roi est enchanté, la semaine suivante, de

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GRAVURE ALLEGORIQUE DE C.-N. COCHIN POUR L'AVÈNEMENT DE LOUIS XVI ET DE MARIE-ANTOINETTE.

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