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place. Il y prètait soit par le contraste de sa modestie apparente et de son ambition, soit par un louable souci d'économie, que les courtisans fastueux traitaient

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LE CARDINAL DE FLEURY.

(Gravure de Chéreau, d après Hyacinthe Rigaud

volontiers de mesquinerie. Avec cela, un certain désir de représentation, un

secret plaisir à recevoir des hommages.

D'Argenson se moque de son petit coucher. « Chaque soir, dit-il, la cour entière, gentilshommes et roturiers, oisifs et gens d'affaires, attendent à leur poste. Son Éminence rentre en son cabinet; puis on ouvre la porte et vous

assistez à sa toilette de nuit tout entière.

« Vous lui voyez passer sa chemise de nuit, puis une assez médiocre robe

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de chambre, peigner ses cheveux blancs que l'àge a fort éclaircis. Vous l'entendez raconter quelques nouvelles du jour, assaisonnées de plaisanteries bonnes ou mauvaises, auxquelles l'assistance ne manque pas d'applaudir.

« L'abbé de Pomponne, qui a beaucoup de crédit sur l'esprit du cardinal, lui en a fait, dit-on, des remontrances, lui répétant quelques-unes des plaisanteries qui courent à ce sujet. Son Éminence n'en a pas cru devoir tenir compte, imaginant apparemment que le public a grande impatience de sa vue, et qu'il

ne lui serait pas possible de céder en tout autre instant à ce désir, sans faire tort aux grandes affaires dont

elle est chargée. »>

Mais ces railleries comptent pour peu de chose au prix de l'éloge si simple, mais si enviable, que Duclos fait en deux lignes du cardinal Fleury : « Jamais ministre, dit-il, ne fut si désintéressé.... Sa succession eût à peine été celle d'un médiocre. bourgeois.

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LE GATEAU DES ROIS (PARTAGE DE LA POLOGNE. Bibliothèque nationale.)

<< S'il y a jamais eu quelqu'un d'heureux sur la terre, dit-il', c'était sans doute le cardinal de Fleury. On le regarda comme un homme des plus aimables et de la société la plus délicieuse jusqu'à l'âge de soixante et treize ans; et, lorsqu'à cet âge, où tant de vieillards se retirent du monde, il eut pris en main le gouvernement, il fut regardé comme un des plus sages. Depuis 1726 jusqu'à 1742, tout lui prospéra. Il conserva jusqu'à près de quatre-vingt-dix ans une tête saine, libre, et capable d'affaires.

<< Si sa grandeur fut singulière, en ce que, ayant commencé si tard, elle dura si longtemps, sans aucun nuage, sa modération et la douceur de ses moeurs ne le furent pas moins: il fut simple et économe en tout, sans jamais se démentir.

1. Précis du siècle de Louis XV, chap. 11.

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LES DROITS DE L'ANGLETERRE SAUVEGARDÉS OU L'AMBITION FRANÇAISE EST CONTENUE.
(Gravure satirique du temps. Bibliothèque nationale.)

L'élévation manquait à son caractère. Ce défaut tenait à des vertus qui sont la douceur, l'égalité, l'amour de l'ordre et de la paix : il prouva que les esprits doux et conciliants sont faits pour gouverner les autres.

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« Il ne prit point le titre de premier ministre, et se contenta d'ètre absolu. Son administration fut moins contestée et moins enviée que celle de Richelieu et de Mazarin dans les temps les plus heureux de leurs ministères.

<< I haïssait tout système, parce que son esprit était heureusement borné, ne comprenant absolument rien à une affaire de finances, exigeant seulement des sous-ministres la plus sévère économie : incapable d'ètre commis d'un bureau, et capable de gouverner l'État.

« Il laissa tranquillement la France réparer ses pertes et s'enrichir par un commerce immense, sans faire aucune innovation, traitant l'État comme un corps puissant et robuste qui se rétablit de lui-même. »

Les mérites du cardinal de Fleury, il est vrai, étaient de ceux qui conviennent mieux à l'état de paix et de recueillement qu'aux complications que la

I

guerre fait naître avec elle. On peut bien dire qu'il manqua de décision lorsqu'éclata l'affaire de la succession de Pologne, et les débuts de la guerre de la succession d'Autriche démontrèrent l'insuffisance inévitable de ce vieillard de quatre-vingt-sept ans. Il mourut à quatre-vingt-dix, laissant, dit Voltaire, « les affaires de la guerre, de la marine, de la finance et de la politique dans une crise qui altéra la gloire de son ministère, et non la tranquillité de son àme ».

Il n'entre pas

dans notre plan de raconter ici les vicissitudes de la guerre de la Succession d'Autriche et de la guerre de Sept Ans, et si quelque beau fait d'armes mérite, dans l'une ou dans l'autre, de retenir l'attention, nous y reviendrons un peu plus loin. Mais, après les déceptions de la première et les amères tristesses de la seconde, on est heureux de voir enfin aux affaires un homme qui

eut quelques parties

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d'un grand ministre, quoique ses contemporains aient, sans aucun doute, exagéré ses mérites.

Appelé aux affaires étrangères en 1758 par le crédit de Mme de Pompadour, Choiseul y joignit le portefeuille de la guerre en 1761, et, pendant quelque temps, fut encore ministre de la marine; et, quoiqu'il eût peu de goût pour les détails arides de l'administration, il remit dans l'armée plus d'ordre et donna à la marine épuisée une vie nouvelle. Il avait pour cela, dit un contemporain', trouvé mille secours dans l'enthousiasme qu'il avait su inspirer à beaucoup de ses collaborateurs personne en effet n'a peut-être possédé autant que lui l'art de séduire. Il y faut ajouter encore une sorte d'à-propos dans la destinée, qui le favorisa

1. BESENVAL, Mémoires.

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