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bien décidément perdu tout respect des choses de la religion. Parmi les fêtes qui attiraient les Parisiens hors de chez eux, il n'en était pas de plus respectueusement suivies que les processions

A lire les récits que nous en ont laissés les chroniqueurs, on voit que la polémique et les sarcasmes des philosophes n'avaient guère entamé la foi populaire. Le bourgeois de Paris n'a pas, en temps de disette ou de sécheresse, perdu sa confiance dans l'efficacité de la procession de la châsse de sainte Geneviève.

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Tous les ans, la Fête-Dieu ramène les mêmes dévotions, le même empressement du gouvernement, de la municipalité, des paroisses et des habitants, à faire le plus belles possible, à force de draperies, de fleurs et d'ornements d'orfèvrerie, les rues par lesquelles les processions passeront, et le plus somptueux possible les reposoirs où elles s'arrêteront.

Même ardeur et même luxe dans les processions extraordinaires, celle par exemple d'avril 1751, à l'occasion du jubilé la foule et la confusion y sont telles que plusieurs personnes sont blessées dans le trajet de Notre-Dame à Sainte-Geneviève.

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FEU D'ARTIFICE TIRE DEVANT LE PALAIS ÉPISCOPAL, A STRASBOURG, A L'OCCASION DU VOYAGE DU ROI (1744). (Bibliothèque nationale.)

Croirait-on qu'à des intervalles espacés, Paris voyait encore, au XVIIe siècle, des processions d'anciens captifs rachetés aux pirates d'Alger par les Pères de la Merci? La dernière est du mois d'octobre 1785.

Le passage du roi à travers les rues de la ville, les obsèques princières, donnent encore lieu de temps en temps à de magnifiques cortèges.

Les entrées d'ambassadeurs étrangers attirent également un grand concours

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ILLUMINATIONS DE LA RUE DE LA FERRONNERIE, A L'OCCASION DU MARIAGE
DE MADAME PREMIÈRE DE FRANCE ET DE L'INFANT D'ESPAGNE (1739).

(Reproduction d'une gravure ancienne.)

de peuple, surtout quand il s'agit d'envoyés orientaux. Alors tout Paris se porte sur le passage du cortège, et ce sont toujours les chevaux, surtout ceux que l'envoyé apporte au roi en présent, qu'on admire le plus.

On serait tenté de croire que les visites de souverains, quand il s'en produisit, durent paraître plus intéressantes encore à la population parisienne. Mais, sous Louis XVI, le bon ton, parmi les souverains, paraissait consister, en dehors des affaires politiques, à s'effacer plutôt qu'à s'afficher. Quand Joseph II, puis Gustave III, vinrent à Paris, en 1777 et en 1784, ils prirent le nom, le premier de comte de Falkenstein, le second de comte de Haga, et affectèrent

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FÊTE DONNÉE A MEUDON POUR L'ANNIVERSAIRE DE LA NAISSANCE DU DAUPHIN (1735) (D'après une gravure de la Bibliothèque nationale.)

de se mêler à la vie parisienne en grands seigneurs sans doute, mais non avec la pompe d'un monarque.

Tout autre s'était montré jadis, sous la Régence, le czar Pierre le Grand, lors de son voyage à Paris. Celui-là tenait à ce que son rang fût respecté, et, au régent même, il sut montrer qu'entre eux il n'y avait point égalité. Il refusa d'aller rendre visite aux femmes de la famille royale; et, quant à Mme de Maintenon, comme il passait dans sa chambre, en visitant Saint-Cyr, il alla tirer les rideaux des fenêtres, puis ceux du lit où elle était couchée, la considéra attentivement et sortit sans lui dire un mot.

Mais avec tout cela son attirail était des plus simples, et il étonna les Parisiens par ses allures de barbare et de despote de génie plutôt qu'il ne les charma et ne les éblouit.

Au plaisir d'ailleurs qu'on pouvait prendre à voir passer de beaux cortèges, il faut joindre l'allégresse plus vivante des divertissements proprement populaires.

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