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retombe à la même place; son activité même nem tend qu'à le ramener à celle dont la force des choses le tire; et, s'il n'était poussé que pat sorze. plus constant désir, il resterait toujours immo: bile. Enfin, jamais il n'exista d'être plus sensible à l'émotion et moins formé pour l'action.

Jean-Jacques n'a pas toujours fui les hommes mais il a toujours aimé la solitude. Il se plaisai avec les amis qu'il croyait avoir, mais il se plai sait encore plus avec lui-même. Il chérissait leu société; mais il avait quelquefois besoin de s recueillir, et peut-êt e eût-il encore mieux aim vivre toujours seul que toujours avec eux. So affection pour le roman de Robinson m'a fait juge qu'il ne se fût pas cru si malheureux que lui confiné dans son ile déserte. Pour un homm sensible, sans ambition et sans vanité, il es moins cruel et moins difficile de vivre seul dan un désert que seul parmi ses semblables. Du reste quoique cette inclination pour la vie retirée e solitaire n'ait certainement rien de méchant et d misanthrope, elle est néanmoins si singulière que j ne l'ai jamais trouvée à ce point qu'en lui seul, e qu'il en fallait absolument démêler la cause pré cise, ou renoncer à bien connaitre l'homme dan lequel je la remarquais.

J'ai bien vu d'abord que la mesure des société ordinaires où règne une familiarité apparente e une réserve réelle ne pouvait lui convenir, Lim possibilité de flatter son langage et de cacher le

ité même ne la force da

mouvemens de son cœur mettait de son côté un disavantage énorme vis-à-vis du reste des homque pa se mes, qui, sachant cacher ce qu'ils sentent et ce jours imnquils sont, se montrent uniquement comme il plus sensile leur convient qu'on les voie. Il n'y avait qu'une

ion.

intimité parfaite qui pût entre eux et lui rétablir les hommes égalité. Mais quand il l'y a mise, ils n'en ont mis Il se pasux que l'apparence; elle était de sa part une imais il se pla prudence, et de la leur une embûche; et cette hérissait le tromperie, dont il fut la victime, une fois sentie, besoin de sa di pour jamais le tenir éloigné d'eux.

e mieux aine

run home

anité, il est

Mais enfin perdant les douceurs de la société vec eux. Saumaine qu'a-t-il substitué qui pût l'en dédomm'a fait jugermager et lui faire préférer ce nouvel état à l'autre eux que lui malgré ses inconvéniens? Je sais que le bruit du monde ellarouche les cœurs aimans et tendres, quis se resserrent et se compriment dans la vre seul dan fle, qu'ils se dilatent et s'épauchent entre eux, les. Du reste quil n'y a de véritable effusion que dans le tête-àie retirée tête. qu'enfin cette intimité délicieuse qui fait la échant et véritable jouissance de l'amitié ne peut guère se gulière quer former et se nourrir que dans la retraite; mais je n lui seul, sais aussi qu'une solitude absolue est un état triste et contraire à la nature; les sentimens affechomme dans theux nourrissent l'âme, la communication des es avive l'esprit. Notre plus douce existence relative et collective, et notre vrai moi n'est tout entier en nous. Enfin telle est la constivenir, Lison de l'homme en cette vie qu'on n'y parvient jamais à bien jouir de soi sans le concours d'au

la cause pr

des sociétés

pparente d

le cacher la

tel connu, estimé, chéri dans ces sociétés d'élite, y vit, avec tout ce qui les composé, dans un commerce de confiance, d'attachement, de familiarité, qu'il y trouve à son choix des amnis sûrs, des maîtresses fidèles, de tendres et solides amis, qui valent peut-être encore mieux : pensez-vous que la moitié de chaque jour ainsi passée ne rachèterait pas bien les peines de l'autre moitié? Le souvenir toujours présent d'une si douce vie et l'espoir assuré de son prochain retour n'adoucirait-il pas bien encore l'amertume du reste du temps? et croyez-vous qu'à tout prendre l'homme le plus heureux de la terre compte dans le même espace, plus de momens aussi doux? Pour moi, je pense, et vous penserez, je m'assure, que cet homme pourrait se flatter, malgré ses peines, de passer de cette manière une vie aussi pleine de bonheur et de jouissance que tel autre mortel que ce soit. Hé bien! monsieur, tel est l'état de Jean-Jacques au milieu de ses afflictions et de ses fictions, de ce Jean-Jacques si cruellement, si obstinément, si indignement noirci, flétri, diffamé, et qu'avec des soucis, des soins, des frais énormes, ses adroits, ses puissans persécuteurs travaillent depuis si longtemps sans relâche à rendre le plus malheureux des êtres. Au milieu de tous leurs succès, il leur échappe; et, se réfugiant dans les régions éthérées, il y vit heureux en dépit d'eux : jamais, avec toutes leurs machines, ils ne le poursuivront jusque-la.

iétés d'élite. Les hommes, livrés à l'amour-propre et à son ans un com triste cortège, ne connaissent plus le charme et de familia effet de l'imagination. Ils pervertissent l'usage de nis sûrs, des cette faculté consolatrice au lieu de s'en servir les amis, qui pour adoucir le sentiment de leurs maux, ils ne Sez-vous que sen servent que pour l'irriter. Plus occupés des ne rachète objets qui les blessent que de ceux qui les flattent, tie? Le se ils voient partout quelque sujet de peine, ils gare vie et les dent toujours quelque souvenir attristant, et, adoucirait-il quand ensuite ils méditent dans la solitude sur ce e du temps qui les a le plus affectés, leurs cœurs ulcérés remmme le plus pissent leur imagination de mille objets funestes. nème espace Lesconcurrences, les préférences, les jalousies, les oi, je pense, rivalités, les offenses, les vengeances, les méconcet homme tentemens de toute espèce, l'ambition, les désirs, s, de passer les projets, les moyens, les obstacles, remplissent de bonheur de pensées inquiétantes les heures de leurs courts que ce soit. basis; et, si quelque image agréable osc y paraître avec lespérance, elle en est effacée ou obscurcie fictions, de par cent images pénibles que le doute du succès tinément.si vient bientôt y substituer.

ean-Jacques

qu'avec de Mais celui qui, franchissant l'étroite prison de adroits, ses intérêt personnel et des petites passions terquis si longstres, s'élève sur les ailes de l'imagination aumalheureux dessus des vapeurs de notre atmosphère, celui ccès, il ler, sans épuiser sa force et ses facultés à lutter gions éthé contre la fortune et la destinée, sait s'élancer amais, avec dans les régions éthérées, y planer, et s'y soutenir par de sublimes contemplations, peut de là braver les coups du sort et des insensés jugemens

ivront jus

des hommes. Il est au-dessus de leurs atteintes, n'a pas besoin de leur suffrage pour être sage, de leur faveur pour être heureux. Enfin tel est e nous l'empire de l'imagination, et telle en e l'influence, que d'elle naissent, non-seuleme les vertus et les vices, mais les biens et les mat de la vie humaine, et que c'est principalement ' manière dont on s'y livre qui rend les homm bons ou méchans, heureux ou malheureux i

bas.

Un cœur actif et un naturel paresseux doive inspirer le goût de la rêverie. Ce goût perce devient une passion très-vive, pour peu qu'il so secondé par l'imagination. C'est ce qui arri très-fréquemment aux Orientaux; c'est ce qui arrivé à Jean-Jacques, qui leur ressemble à bi des égards. Trop soumis à ses sens pour pouvo dans les jeux de la sienne, en secouer le joug, ne s'élèverait pas sans peine à des méditation purement abstraites, et ne s'y soutiendrai p long-temps. Mais cette faiblesse d'entendeme lui est peut-être plus avantageuse que ne sera une tête plus philosophique. Le concours des ol jets sensibles rend ses méditations moins sèche plus douces, plus illusoires, plus appropriées à h tout entier. La nature s'habille pour lui des form les plus charmantes, se peint à ses yeux des co leurs les plus vives, se peuple pour son usa d'êtres selon son cœur : et lequel est le plus cons lant, dans l'infortune, de profondes conception

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