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en 1550, la porte est réouverte, les maisons se construisent. Aussi trouve-t-on, à la date du 22 janvier 1560 (1), un bail à cens consenti par les Religieux de Saint-Germain à Jacques Ganeron, probablement le fils du précédent propriétaire, pour un petit terrain de 4 toises de longueur sur 1 pied et demi de largeur, « à prendre au-devant de la maison que ledit Ganeron, a assise sur la rue qui est sur les fossés... » Dès lors la maison d'encoignure existe; elle sera de nouveau mentionnée en 1593. Ce Jacques Ganeron, premier constructeur, se qualifiait, dans l'acte de 1560: marchand chapelier bourgeois de Paris, et désignait sa propriété comme « joignant celle de Messire Pierre Foucault en laquelle demeure Jehan de Pracontal, barbier et valet de chambre ordinaire du roi. >>

Cent ans après, en 1658 et 1661, la même maison, formant le coin de la rue de Buci et de la nouvelle rue dite des Fossés, est désignée comme ayant eu pour enseigne le Mortier d'or. Elle comprend alors deux corps de logis, avec trois étages sur la rue de Buci et quatre sur la rue des Fossés. Au rez-de-chaussée sont trois boutiques, la première occupée par la veuve d'un apothicaire, ce qui explique l'enseigne du Mortier d'or, la deuxième occupée par un marchand gantier et la troisième par un maître potier d'étain. La propriété en est échue à trois frères Pijauld qui en font cession, par voie d'échange, le 16 mai 1658, à Pierre Boivin apothicaire, demeurant rue Saint-André-des-Arts, dont la mère occupe la principale boutique. Trois ans après, par acte notarié du 9 août 1661, Pierre Boivin la revend, moyennant 1900 livres de rente rachetable au denier 20, soit 38.000 livres, à messire Denis de Saint

(1) Arch. nat., S. 2972.

Sté Hque DU VI. 1903

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Genis, conseiller du roi, maître ordinaire à la Chambre des comptes. En 1678 et 1693, ce sont les fils de SaintGenis, qui font la déclaration de propriété pour le cens à payer à l'Abbaye, en observant que le principal corps de logis est occupé par Me Pierre Bigot, notaire, dont les panonceaux ont sans doute pris la place du Mortier d'or.

Le 1er septembre 1723, la maison est vendue par une dame Vve Dutellier, héritière des Saint-Genis, à Jean Préaudeau avocat au Parlement, moyennant 50.000 livres, ce qui fait une augmentation de 12.000 livres, soit plus de 30 pour cent, sur le prix de 38.000 livres de 1661. Cette progression considérable se ralentit d'ailleurs. En effet, en 1763, quarante ans plus tard, après la mort d'un dernier Préaudeau, sa succession étant déclarée vacante, un expert déclare que cette maison, située « dans une situation avantageuse, sur un des beaux carrefours de Paris »>, doit être évaluée seulement, à raison il est vrai des réparations à faire, 48.000 livres. En définitive, elle est adjugée en vente publique le 6 avril 1764, moyennant 54.000 livres au Sr Jules Rudemare, riche marchand boucher du quartier, déjà propriétaire de huit étaux de boucherie aux environs.

La propriété reste dans la famille Rudemare pendant plus de 70 ans, de 1764 à 1835. Vers 1820, on remarque parmi les co-propriétaires descendants des Rudemare le nom de Guérin-Boutron, connu dans le commerce parisien.

A partir de 1780, la principale boutique est occupée par un marchand de vin ou liquoriste, et, en 1824, le titulaire de ce fonds de commerce devient même locataire de la totalité de l'immeuble moyennant un loyer de 4.600 francs.

En 1816, une chronique parisienne (1) signalait au pu(1) Petite Chronique de Paris, 1816-1817.

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blic un assez curieux tableau servant d'enseigne placé, paraît-il, sur cette maison d'encoignure. On y voyait, disait-on, au premier plan le portrait en pied d'une maîtresse sage-femme portant dans ses bras un nouveau-né, et, dans le fond, une jeune femme qui, aidée par un élégant cavalier, montait furtivement dans un fiacre. Le chroniqueur remarquait malicieusement que la destination charitable de cet établissement était très clairement indiquée par ce tableau au bas duquel on lisait cette inscription: On prend des pensionnaires.

Vers la même époque, une autre enseigne plus innocente attirait encore les regards sur la même maison. Elle est décrite ainsi par Clément de Ris (1): « Mes souvenirs d'enfant me rappellent encore trois grands polichinelles en bois découpé et peint, qui servaient d'enseigne à un magasin de nouveautés formant le coin de la rue de Buci et de la rue de l'Ancienne-Comédie. »

En 1835, la propriété fut vendue par les héritiers Rudemare moyennant 94.300 francs à Mme Vve Badin qui la céda elle-même en 1844 à M. Ancelot. Cette vieille maison tombait de vétusté. Elle ne pouvait être consolidée, car elle était sujette à reculement en exécution de l'ordonnance de 1827. Elle dut donc, en 1853, être entièrement démolie et reconstruite à l'alignement prescrit. Ainsi a disparu l'antique habitation de Jacques Ganeron, du xvi° siècle, remplacée par une maison moderne à pan coupé.

Enfin, en 1893, M. Blanche, propriétaire actuel, en a fait l'acquisition.

Depuis une cinquantaine d'années, se sont succédé là,

(1) Les Enseignes de Paris, par le comte Clément de Ris, 1876, p. 51.

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