Page images
PDF
EPUB

même signification, par exemple, dans un passage de Virgile, Georg. II, v. 207-210.

ESTAVANENS, « de stavanens ». Il suffit de rapprocher ce nom du mot estevenante pour se persuader qu'ils ont une origine commune. Or, la livre estevenante est dite ainsi du nom de Stephanus (archevêque de Besançon au XIIIe siècle), que l'on rendait en français par Estienne (Etienne), Estève, Estevène, en allemand par Stephan et Steffen, en anglais par Stephen, en hollandais par Steven. -On dirait que le village d'Estavanens, comme celui de St.-Stephan daus le Simmenthal, fut ainsi nommé en l'honneur de St.-Etienne.

ETIVAZ (vallée et village de l'Etivaz), « communitas vallis de leytivaz, parochie de Oyez », doc. de l'an 1514; « la vault de Leytiva », doc. du 6 mars 1528: dans une charte du 20 août 1478 on lit Lestivaz. Ce nom vient du latin æstiva (neut. pl.), qui servait à désigner tantôt la saison de l'été, æstiva-tempora, tantôt un campement d'été, æstivacastra, ou bien les bestiaux qu'on mettait pendant l'été dans les pâturages, æstiva-pecora, enfin les pâturages d'été, æstivaloca, pascua. Du verbe æstivare nous est venu notre estiver (opposé à hiverner), qui signifie demeurer dans un endroit, à la montagne, pendant l'été, y mettre ou y entretenir le bétail 2. Le nom d'Estiva (Etiva) convenait tout à fait à

1 On lit dans le Complément du dictionnaire de l'Académie « Estevenon ou Estevenant, ancienne monnaie de Bourgogne, au coin du comte Etienne (Estevene). Les dits bourgeois doivent chacun trois sous estevenans. En 1266, Jean, sire de Durne, vendit à Amédée de Montfaucon plusieurs terres pour 80 livres estevenantes. (Histoire des sires de Joux, p. 119, note 1.) Quel qu'ait été le prince au coin duquel fut frappée la monnaie estevenante, il est certain que ce mot vient d'Estevène, qui s'est formé de Stephanus.

En allem. Sömmern, d'où Sömmerung:

[ocr errors]

<< Mihi greges in Apulia

la vallée rude et sauvage en hiver, qu'arrose la Tourneresse, et qui n'était habitable qu'en été pour les pâtres et les troupeaux, qui, dans cette saison, y trouvaient d'excellents pâturages.

FENIL, Fenix, Feny, ne vient pas de fenum, quoiqu'on appelle fenil un lieu où on serre les foins; mais, comme Fin (par exemple, la Fin du Plan »), de finis, limite, fin; au moyen-âge finis et fenis. Fenil est le nom de localités nombreuses. Le prétendu mot allemand Vinelz ou Vingelz, n'est autre chose que le nom mal prononcé ou altéré de Fenil, village près de Cerlier, au lac de Bienne.

FLENDRU. Flandru, Flendruz; rio du Flendru ou Fleindru. On appelle ainsi deux torrents de la châtellenie de Rougemont, dont le plus considérable, qui coule dans la Sarine, au pied du Vanel, est appelé le grand Flendru, et ale Flendru (ou rio) des Crêts ». Flen ou Flein se dit en patois pour le vieux mot roman fléon, qui signifie ruisseau. Ce mot paraît sous la forme de Flon dans le canton de Vaud, où il désigne en particulier un ruisseau ou torrent qui traverse Lausanne: dans les anciennes chartes latines cette eau est nommée fluvius, mot qui vient de fluo, je coule, et se dit de tout ruisseau d'eau vive. Dru, qui signifie vif, fort, gros, indiquerait que le Flendru était un torrent sauvage. Les chroniques et la tradition racontent que ce ruisseau des montagnes (le grand Flendru), grossi par l'orage ou par la fonte des neiges, sortait de ses bords, et entraînait des arbres et des quartiers de rocs dans son cours impétueux.

hibernabant, qui in Reatinis montibus æstivabant » a dit Varron, R. R. 2, 1. Ce passage sert à confirmer l'explication que nous avons donnée du nom de la vallée de l'Etivaz

Le grand Flendru est appelé en allemand Griesbach. Voyez ce mot.

FORCLAZ, contraction de fores clause (porte close), qui servait à désigner un passage entre deux montagnes, un ravin ou chemin creux, un défilé qu'il est facile de garder et de défendre. Voyez au mot Cluse.

GESSENAY. Voy. Sanen, au Glossaire des noms allemands. GRUYÈRE. Voyez page 49 et suivante.

HUMILIMONT, humilis mons. Ce monastère était situé, suivant l'expression d'un document de 1289 en la Fosse d'Ogoz ». Il a tiré son nom de sa situation dans une vallée solitaire, à une demi-lieue de Marsens, d'où vient qu'on l'a souvent appelé « l'abbaye de Marsens. »

JOGNE, Jonia (dans des chartes lat.), Jôn et Joune (dans plusieurs doc. all.), Youn, et Yonn (sur la carte de Samuel Loup), noms du torrent qui traverse la vallée de Charmey. Les Suisses de langue allemaude donnent le nom de Jaun au torrent et, de plus, au village et au château de Bellegarde. J'incline à penser que les vocables Jogne et Jaun ou Jôn, Jön ne sont que deux prononciations différentes (l'une romane, l'autre tudesque) d'un même mot, et qu'ils ont une origine commune que je crois découvrir dans le mot roman ivoue, iauve, yaue, eauve, qui signifie eau. A mon sens, on aurait donné au torrent qui traverse le val de Charmey le nom d'Eau, tout comme on a donné le nom de GrandeEau à celui qui traverse le val d'Ormont.

LESSOC, autrement Le Soc, Le Sol, Lessoz (doc. de 1237), et souvent Lessot. Je suis tenté de croire que le vrai nom de ce village est l'Essot. Ce mot, dont j'ignore la signification, existait autrefois. On lit dans une charte de l'an 1223: < terram.. apud Liniers (Lignières, canton de Neuchâtel),

MEM. ET DOCUM. IX. 1.

9

iugerum unum apud fontem Essot. »

Kopp, Gesch.. der eidgen. Bünde, L. IVe, p. 58, note 5. On a pu écrire

Lessot pour l'Essot, tout comme on a écrit Lesser (dans les Ext. de Château-d'OEx) pour l'Essert, et Leytivaz pour l'Etivaz.

[ocr errors]

MARIVE (la) signifie la mère eau, soit l'eau principale, ou le plus grand ruisseau de la commune d'Albeuve. MOCAUSA. Le mot Mockawsa ou Mackawsa D a dit l'auteur du Conservateur suisse (T. IVe, p. 170), « signifie en celtique le pré de l'eau, de moc, mog, ou mac, mag, un pré, une plaine, et aude, aü, aüw, de l'eau » 2. On lit dans l'ouvrage d'Alb. Schott, sur les colonies allemandes du Piémont, p. 68, que mac est l'équivalent de bach (ruisseau) et signifie en celtique une grande eau 5. Comment concilier deux opinions si diverses?

D

« Au delà du hameau dit Flendru, bien avant dans les Alpes de Rougemont, du côté de la Dent de Brenleire, à l'extrémité de la vallée de Vertchamp, est « un bel alpage> d'environ mille pas de long sur une largeur de quatre à

1 « La mar ive », selon M. Moratel.

"Il est vrai que au, en roman, signifie de l'eau. En voici la preuve. Le village de Lengnau (entre Bienne et Soleure), que Hartmann (Annal. Heremi, p. 130) appelle Lanha, paraît ailleurs sous les dénominations de

Lengo », de « Longa aqua », (dans les Visites pastor. de 1453. Voyez Abhandlungen ou Mém. de la Société d'histoire de Berne, T. Ier, p. 291, 365) et de Longieuua» (dans le Cart. du chap. de Lausanne, p, 15), d'où est venu « Lougeau », qui est le nom français ou roman de ce village.

Alb. Schott a dit que « le lac de Saas est appelé mac-mar ». Or, le lac qu'il appelle du nom de Saas est à quatre lieues au-dessus de ce village, où toute végétation cesse, et il porte avec raison le nom allemand de Matt-march, qui signifie la limite des prés ou des pâturages, où commencent les glaciers — Je dois cette remarque à mon collègue, M. le prof. H. Wiener, qui a visité la contrée du Mont-Rose en 1849.

cinq cents. On l'appelle aujourd'hui la Verda, nom qui a remplacé celui de Mocausa. Chaque printemps, à la fonte des neiges et quelquefois après de longues pluies, cette plaine se transforme en un lac de cinq à six pieds de profondeur, qui n'existe qu'environ quinze jours; les eaux s'en écoulent par un grand nombre de conduits souterrains, et il se change alors en vertes prairies qui donnent sous la faux un pâturage abondant. >

Voilà, à peu près, ce qu'on lit dans des ouvrages modernes, concernant Mocausa.

[ocr errors]

La tradition prétend que jadis ce lac n'était pas temporaire mais permanent. Sur la carte de Sl. Loup, de Rougemont, publiée en 1755, figure non une plaine, mais un lac Mocausa, à l'extrémité de la vallée de « Verchamp Dans les Extentes ou les vieux rôles-censiers de Châteaud'OEx on lit: « ad montem de mocousa » << in monte de mocausav, « in monte de moscousa » (bis). Ainsi, les anciens documents appellent de ce nom une montagne, c'est-à-dire une alpe, un alpage, soit un pâturage plus ou moins élevé. Dans des actes plus récents, par exemple dans les Délimitations de 1663 et de 1727 », il est question de la montagne et des siernes (prés qu'on ne fauche qu'une fois) de Mocausaz, ou de Maquausa et Maucausaz. Ce nom servit donc autrefois à désigner un pâturage à mi-côte, au moins; il s'étendit apparemment au lac temporaire et aux belles prairies qui le remplacent, lesquelles paraissent avoir été appelées les « siernes de Mocausa ».

Quoi qu'il en soit, un connaisseur des patois romans,

1 V. le Conservateur Suisse, T. IVe, et les Dictionnaires géograph. de Levade et de Leresche.

« PreviousContinue »