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l'empreinte du pagus Ogensis ou pays d'Ogo, dont cette localité faisait partie? Plus d'une fois il est question des

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vignes d'Ogoz au Désaley ». Il existait, il y a quelques années, près de St.-Saphorin, une chapelle qui était connue sous le nom de la chapelle d'Ogo, nom qu'elle porte dans des actes de 1528 et 1419'; selon toute apparence elle servait jadis aux moines à l'époque des vendanges. Le beau domaine d'Ogoz», situé sous les vignobles des communes de «St.-Saphorin, de Puidoux et de Chardonne», ne semble-t-il pas indiquer que dans un temps le pays d'Ogo touchait au Léman?

Enfin, ce pagus s'étendait vers le Nord au moins jusqu'à trois lieues en deçà de Berne. Le village de Ruggisberg, entre la Singine et l'Aar, était dans les limites du pays d'Ogo. Une charte du 27 mars 1076 nous apprend que Henri IV, roi des Romains, confirma la donation que noble Luthold, du château de Rümlingen, avait faite à Dieu, aux apôtres St.-Pierre et St.-Paul et à l'abbé Hugues, de l'église de Ruggisberg, ainsi que d'un alleu, pour y fonder un couvent de l'ordre de Cluny, que la dite église était située dans le royaume du roi Henri, dans l'évêché de Lausanne, dans

saune, p. 175 et suiv., p. 178 et suiv. Le texte porte tantôt ojens, tantôt ogens.

1 Près de St.-Saphorin, ou plutôt de Chexbres, est un moulin connu sous le nom de « Moulin de Gruyère». On sait que, dans un temps, la Tour de Marsens, au Désaley, appartint aux comtes de Gruyère.

'Pour Rüdigersberg, ou Rogersberg, qui se présente aussi sous les formes de Roggeresperc, Roggeresberch, et Rucesperc (Cart. du chap. de Laus., p. 25), en latin Mons-Rotgerii, Mont-Roger du génitif Montisrotgerii est venu Montricherius (nom du même lieu dans les Visites pastorales de 1453) ou Montricher. Voyez Abhandlungen, ou Mémoires de la Société d'Histoire de Berne, T. I, p. 288, 363 et suiv.

le pagus dit Vffgow', dans le comté de Bargen. A cette confirmation le prince ajouta le don d'une forêt royale et d'un territoire inculte et désert, dit Guchau 2, pour le défricher 3.

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Le comte de Bargen avait pris ce nom du village de Bar

1 Vfgow, dans le dialecte alamannique, pour Ausgau, qui est l'équivalent de Hochgau, et signifie le haut-pays, le pays-d'enhaut; différent d'un autre Vfgowe qui paraît dans une charte de l'an 1046, publiée par Schöpflin, Hist. Zar.-Bad., T. V, p. 18, et dans lequel était Baden, ville du grandduché de ce nom.

<< In monte Gucha ou Guchau, d'où sont venus Montcuchin (Cartulaire du chap. de Laus., p. 26 et Visit. de 1453), Cucansberg ou Chucansberg (doc. de 1148) et Guggisberg. Voyez Abhandl. ou les Mémoires précités, p. 334, 393 et suiv.

<< Henricus.... Romanorum quartus Rex... jubente matre mea Agnete augusta... (en présence de plusieurs grands dignitaires ecclésiastiques et laïques, parmi lesquels était Bourcard, évêque de Lausanne) notum facere volumus, quod quidam illustris vir Liutholdus nomine de castello Rumelinga... donavit per manum Bertholdi Ducis, (Berthold for de Zæringen, fils de Rodolphe de Rheinfelden qui fut le premier recteur ou duc de la Bourgogne transjurane. Voyez de Gingins, Mém. sur le Rectorat de Bourgogne, dans les Mém. et Docum. de la Société d'Histoire de la Suisse romande, T. Ier, p. 27) filii Rudolphi, patre ipso Duce jubente, in hoc placitu(m) advocati, Ecclesiam de Roggeresperc,... et insuper alodum... Constructam autem ipsam ecclesiam et alodum suum in regno meo, in Lausannensi Episcopatu, in pago nomine VffGow, in comitatu Bargensi etc. Voyez la charte entière dans le Recueil diplomatique de Schöpflin, ibid. No XIII, et l'analyse de ce document, par Stettler, dans la deuxième livraison des Regestes publiés par M. de Mohr, Coire, 1849, p. 10. A l'extrait que je viens de donner j'ajoute un passage intéressant, tiré du Fasciculus temporům, fol. 76, recto de l'édit. de 1481. « Udalricus prior sanctus. natione almanus de ratispona vtile vas in domo domini positus. consumateque religionis monachus cluniacensis. multis clarus miraculis. a sancto hugone ad schuicerorum fines directus. primo monasterium montisrotgerii quod a bernensium oppido quidem duobus miliaribus distat. dono lutoldi de rumlingen nobilis viri fundauit. et secundum in nigra silva (la Forêt-noire) vbi nunc quiescit. Hic primum almanie monasteriis consuetudines cluniacensis ecclesie inuexit. »

gen, situé sur la rive gauche de l'Aar, en aval de sa jonction avec la Sarine, en face d'Aarberg. Ce village figure, sous le nom de Barges, comme paroisse du doyenné d'Avenches, dans le Cartul. du chap. de Lausanne'.

Le titre de comté avait passé soit au château, soit au village de Bargen, comme il passa, au milieu de l'anarchie féodale, des territoires à de simples villes, bourgs et chàteau forts. Il indique une juridiction. Könitz, Ruggisberg, Lengnau ou Longeau" étaient du ressort de ce comitat ou comté. Il ne s'étendait que sur une partie du Hochgau, dont une autre portion, notamment Château-d'OEx, ressortissait au comté de Vaud . Le Hochgau était un pays ou territoire qui dépendait, on le voit, de plusieurs juridictions. Compris dans le comté de Bourgogne (Landgrafschaft Burgund), qui constituait le diocèse de Lausanne, il était limité par l'Aar. Cette rivière séparait le comté de Bourgogne du duché de ce nom, et l'évêché de Lausanne de celui de Constance.

D'une étendue beaucoup moins considérable que l'évêché de Lausanne, le Hochgau ou pays d'Ogo était un pagus minor ou petit pays par opposition au pagus maior, qui répondait au territoire de la cité ou du diocèse, et il formait une subdivision diocésaine de cet évêché.

'Page 14. Cp. Mém. et Doc. de la Soc. d'hist. et d'archéol, de Genève, T. VII, p. 221, note 90.

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Guérard, Prolég. du Pol. d'Irm., § 22.

<< Chunicis in comitatu Bargensi.» Annal. Heremi, p. 130.

<< In comitatu Bargen in villa Lanha » charte de 1040. Regestes publ. par M. de Mohr, Ire livraison, p. 6. Voyez le Geschichtforscher, T. XI, p. 42, n.

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<< In comitatu Valdense in loco qui vocatur Osgo. « Ch. de 1040, citée ci-dessus, p. 53. Le comitatus Waldensis» est déjà mentionné dans une charte de l'an 885. Voyez le Cartul, du chap. de Lausanne, p. 132.

Chaque diocèse était subdivisé en archidiaconés et en doyennés. Les premiers, dont l'institution paraît dater du temps de Charlemagne, ont été composés en grande partie avec les pagi minores, dont ils représentent assez généralement l'ancienne circonscription romaine ; les seconds se sont formés de territoires qui s'étendaient sur une moindre fraction du diocèse.

Les archidiaconés du diocèse de Lausanne sont inconnus. J'incline à penser que le pays d'Ogo en était un, bien qu'il ne pût représenter la circonscription d'un territoire cultivé et administré autrefois par les Romains. Le Cartulaire du chapitre de Lausanne, de l'an 1228, nous apprend que le diocèse de ce nom était subdivisé en neuf doyennés, dont l'un était le doyenné d'Ogo. Or, celui-ci ne comprenait pas tout le territoire du Hochgau. Une partie de ce territoire, détachée du pagus par une église-mère, avait servi à former un autre doyenné, sans cesser pour cela, je le présume, d'appartenir à l'archidiaconé.

Le doyenné d'Ogo comprenait au commencement du XIIIe siècle, l'abbaye de Marsens, les prieurés de Rougemont, de Broc, de Pont-la-Ville, d'Avril-devant-Pont et de Farvagny; les églises de Bulle, Riaz, Grandvillars, Albeuve, Château-d'OEx, Gessenay, Bellegarde, Charmey, Villars-Volar, Hauteville-de-Corbières, Vuippens, Treyvaux, Vuisternens-devant-Pont, Autigny, Estavayé-le-Gibloux, Orsonens, Villa-St.-Pierre, Berlens, Vuisternens vers Romont, Sales près Vaulruz, Echarlens, Mézières vers Romont, Villarimboud.

1 Guérard, ibid., $ 21.

V. le Cartulaire du chapitre de Lausanne, ou la Chronique de ce car

Toutes ces paroisses, à l'exception de Château-d'OEx, de Rougemont et de Gessenay, sont situées dans la partie du comté de Gruyère qui fut incorporée au canton de Fribourg. Elles forment un rayon qui ne répond pas à l'ancienne circonscription du Hochgau. A une époque indéterminée, lorsque la population des Alpes bernoises se fut accrue, il fallut y élever des chapelles et des églises, puis instituer un nouveau doyenné, et, dans ce but, détacher une portion du Hochgau. L'église de Ruggisberg qui, suivant la charte de 1076, fut construite dans le pays d'Ogo, figure un siècle et demi plus tard dans le doyenné de Berne. Celui-ci comprenait en outre le prieuré de Dærstetten, les églises de Wimmis, d'Erlenbach, de Boltigen, d'Oberwil, de Zweisimmen, et d'autres, dans le Simmenthal, qui dépendait plus ou moins des anciens comtes de Gruyère ou d'Ogo.

Faute de renseignements plus complets, nous bornons ici nos recherches sur l'Ogo.

tulaire et la carte publiées par M. Matile. Il faut observer que Farvagny et Sales (au N. d'Arconciel?), qui étaient compris dans le doyenné d'Ogo, et apparemment dans le pagus de ce nom, furent confisqués avec les autres possessions de Rodolphe de Rheinfelden, qui disputait l'empire à Henri IV, et donnés par celui-ci, en 1082, à l'un de ses fidèles, avec Arconciel et les dépendances des dits lieux. Il est probable qu'Illens, qui, dans les chartes accompagne ordinairement Arconciel, fut compris dans cette donation, quoiqu'il n'y soit pas nommé :.. « castrum Arconciacum cum ipsa villa posita in pago qui dicitur ontlanden (Uchtland) in comitatu tirensi et villam favernie et salam cum universis appendenciis, etc.» Pièce tirée des archives d'Hauterive (mihi). La charte originale de cette donation est perdue. La copie de ce document est le seul acte connu qui fasse mention du mystérieux comté de Tir, qui, du reste, signifie non un territoire mais une juridiction. Voyez de Gingins, Mém. et Doc. de la Société d'hist. de la Suisse romande. T. Ier, p. 32, 36, 44. Kopp, Geschichte der eidgen. Bünde L. IV, p. 64.

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