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M. HENRI BAILLIÈRE

La mort de M. Henri Baillière est pour la Société histo

HENRI BAILLIÈRE.

rique plus qu'une

perte cruelle: c'est une diminution; elle laisse un vide qui ne sera pas comblé, et les études à la fois exactes et pleines de vie, que seul il pouvait écrire, en puisant dans ses souvenirs personnels et dans sa riche collection d'autographes, manqueront à notre Bulletin.

Né à Paris le 12 septembre 1840.

Henri-Paul-Charles Baillière, après de fortes études qu'il conduisit jusqu'à la licence en droit, trouva chez son père,

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l'éminent éditeur J.-B. Baillière, l'emploi de ses grandes facultés. Associé à son frère, dès 1862, juge au tribunal de commerce de 1872 à 1880, il sut augmenter encore l'importance de la maison paternelle. La presse médicale, l'association amicale des commis libraires ont rendu hommage à la vigueur de son esprit, à son ardeur au travail, à la supériorité de son jugement, à toutes ses qualités professionnelles. Si cette partie de la vie de notre collègue nous échappe, du

moins en avons-nous bénéficié par l'honneur qui rejaillissait sur notre Société de sa collaboration et par les souvenirs de ses relations avec les savants qu'il a édités.

Pour nous, M. Henri Baillière a été un président parfait. Toujours prêt à s'effacer devant ses collègues qu'il excitait au travail, toujours prêt aussi à ouvrir ses portefeuilles pleins de notes substantielles sur l'histoire des rues et des maisons de l'arrondissement; il était aussi intéressant à entendre, qu'il se laissât aller à de spirituelles improvisations sur les hommes et sur les choses, ou qu'il lût un travail savamment et laborieusement composé. Rappellerai-je ici la monographie de la Rue Hautefeuille, véritable modèle d'érudition, ses conférences sur les Rues, sur les Maisons, historiques, sur les Enseignes, sur la Crise du Livre, dont nous avons eu la primeur? Tous, nous sommes encore sous le charme de cette parole aisée, fine, qui savait si bien mettre en valeur les détails, et si je puis ainsi dire, là poussière d'histoire que notre Société se fait honneur de recueillir.

Nos réunions du vendredi ont bien vite établi entre ceux qui les fréquentent des liens d'amitié qui en font l'agrément. M. Henri Baillière, plus que personne, a contribué à faire naître et à développer ces sentiments. Il aimait notre Société, à laquelle il avait amené ceux qu'il aimait; il le témoignait de toutes les façons, et notre sympathie répondait à la sienne. Aussi n'essaierai-je pas de dire la douleur que nous cause sa mort imprévue et prématurée : c'est un ami que nous perdons! et notre seule consolation est de penser que son fils, son frère, son neveu qu'il nous a donnés pour collègues perpétueront parmi nous son souvenir qui nous sera toujours cher.

Félix HERBET.

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COBLENTZ (20 juin 1791)

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particulièrement

C'est à l'occasion de la conférence, intéressante, - faite, lors de notre assemblée générale du 19 mars 1904, par notre aimable et savant collègue M. Hustin, secrétaire général de la questure du Sénat (1), qu'un petit débat s'était élevé sur le point de savoir si l'architecte du palais du Luxembourg, Chalgrin, avait ou non accompagné Monsieur, comte de Provence, lorsque ce dernier quitta le Palais, le 20 juin 1791, le soir même où Louis XVI partait de son côté pour s'arrêter à Varennes. On sait, et nous y reviendrons, que Monsieur avait la jouissance, à titre d'apanage, du grand Luxembourg, et comme locataire, du petit Luxembourg.

La « Relation d'un voyage à Bruxelles et à Coblentz 1791», qui a été écrite par Louis XVIII (2) ne laisse au

(1) Le palais du Luxembourg: ses transformatious, son agrandissement, ses architectes, sa décoration, ses décorateurs, par A. HUSTIN. Paris, Mouillot, 1904. M. Hustin a publié depuis, à l'imprimerie du Sénat, le travail dont il avait donné la primeur à notre Société.

(2) Publiée à Paris, chez Domère, en 1823, en petit in-12, avec une dédicace : « à Antoine-Louis-François d'Avaray, son libérateur, Louis-Stanislas-Xavier de France, plein de reconnaissance, Salut. Je sais, mon cher ami..... » Une autre édition, in-8, a paru la même année, chez le Normand, sous ce titre : Relation des derniers événements de la Captivité de Monsieur, frère du roi Louis XVI, et de sa délivrance par M. le comte d'Avaray, le 21 juin 1791: la relation est précédée d'un avertissement de l'éditeur (A. Morin) et d'une « Notice sur la vie du feu duc d'Avaray »; enfin, elle est ornée de deux portraits: celui « du Roi, alors Monsieur,

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alors Monsieur, sous le déguisement à la faveur duquel il échappa à la vigilance de ses geoliers, le 21 Tuin

1791

cun doute le comte de Provence partit avec d'Avaray pour seul compagnon. Nous voulons rechercher ici simplement (1) s'il est possible, dans l'état actuel du palais, de reconstituer les détails de « la fuite de Monsieur », comme on disait alors (2), de « son évasion », comme il disait lui-même dans sa Relation (3).

Cette Relation est jugée sévèrement, au point de vue de la forme, par l'abbé de Mongaillard, dans son histoire de France (4). «... elle est curieuse, dit-il, par la manière dont sont racontées les petites aventures qui le concernent personnellement (le prince); elle est remarquable par la faiblesse, la trivialité du style elle... abonde en puérilités tout à fait indignes du haut rang de l'écrivain..... » La note est forcée, quoique assez vraie, en somme. On a dit de Louis XVIII exilé « qu'il était confit dans la

sous le déguisement à la faveur duquel il échappa à ses geôliers, le 21 juin 1791 », et celui d'« Antoine-Louis-François de Beziade, comte, puis duc d'Avaray, capitaine des gardes du corps du roi, mort à Madère, le 4 juin 1811 », tous deux signés : Mauzin, lith. de Villain. Nous reproduisons ici, grâce à l'obligeance de M. Fromageot, le portrait de Monsieur, en regrettant qu'il ne donne point » le grand chapeau, avec la large cocarde tricolore, qui complétait le costume.

(1) Nous devons témoigner toute notre gratitude à nos collègues, MM. Paul FROMAGEOT, Henri MASSON, MONVAL, et Numa RAFLIN, qui se sont intéressés à la présente étude, et ont mis gracieusement à notre disposition plusieurs des renseignements que nous sommes heureux d'insérer. Enfin, disons que notre généreux collègue, M. Victor DUJARDIN a bien voulu faire, les frais du joli cliché qui permet de reproduire ici les armes de MONSIEUR, extraites de la Passion du jeu, par M. Dussaulx (de l'imprimerie de MONSIEur, 1779.)

(2) Répertoire ou Almanach historique de la Révolution française. Paris, chez Lefort et Montardier. An VI.

(3) Relation, édition petit in-12, p. 4.

(4) L'Histoire de France depuis la fin du règne de Louis XVI, jusqu'à l'année 1825, en 9 volumes: Paris, 1827, tome II, p. 282. Cette publication a été souvent traitée de libelle, et l'on a dit que, sauf quelques passages, elle était l'œuvre de continuateurs posthumes ayant spéculé sur la réputation un peu tapageuse de l'abbé.

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