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contentement. Il ne faut pas

détruire cette

métropole, par cela seul qu'elle est la capitale de la France; laissons cette grande ville dominer le reste du corps politique. La réaction d'ailleurs est établie, et il serait dangereux de l'interrompre. »,

Nous laissons à nos lecteurs les réflexions. à faire sur les deux opinions de M. Mereier, qui ne prévoyait pas en 1788 la révolution française de 1789,

PHYSIONOMIE DE LA GRANDE VILLE

EN 1782

» VOULEZ-VOUS juger Paris physi quement? Montez sur les tours de NotreDame. La ville est ronde comme une citrouille, le plâtre qui forme les deux tiers. matériels de la ville, et qui est tout à la fois. blane et noir, annonce qu'elle est bâție de eraie, et qu'elle repose sur la craie. La fu mée éternelle, qui s'élève de ces chemi→ nées innombrables, dérobe à l'œil le som→ met pointu des clochers; on voit comme

an nuage qui se forme au-dessus de tant de maisons, et la transpiration de cette ville est pour ainsi dire sensible.

» La rivière qui la partage, la coupe presque régulièrement en deux portions égales; mais les édifices se portent depuis quelques années du côté du nord.

» Je passerai sous silence sa position topographique, ainsi que la description de ses édifices, de ses monumens, de ses curiosités en tout genre, parce que je fais plus de cas du tableau de l'esprit et du caractère de ses habitans, que de toutes ces nomenclatures qu'on trouvera dans les Etrennes mignones. C'est au moral que je me suis attaché : il ne faut que des yeux pour voir le reste.

» Je dois seulement considérer que son ciel en général est sujet à la plus grande inconstance, et beaucoup plus humide que froid. L'eau de la Seine est légèrement purgative et l'on dit proverbialement, qu'elle sort de la cuisse d'un ange. La fibre

y est molle et détendue; l'épaisseur de l'athmosphère en relâche le ton, et les couleurs vives sont rares sur les visages.

» Le quartier le plus sain est le faubourg Saint-Jacques, habité par le petit peuple ; et le quartier le plus mal-sain est celui de la Cité.

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» POUR bâtir Paris dans son origine, il a fallu prendre la pierre dans les environs; la consommation n'en a pas été mince. Paris s'agrandissant, on a bâti insensiblement les faubourgs sur les anciennes carrières; de sorte que tout ce qu'on voit en dehors, manque, essentiellement dans la terre aux fondemens de la ville: de là les concavités effrayantes qui se trouvent aujourd'hui sous les maisons de plusieurs quartiers; elles portent sur des abymes. Il ne faudrait pas un choc bien considérable, pour ramener les pierres au point d'où on les a enlevées

avec

avec tant d'effort; huit personnes ensevelies dans un gouffre de cent cinquante pieds de profondeur, et quelques autres accidens moins connus, ont excité enfin la vigilance de la police et du gouvernement; et de fait, on a étayé en silence les édifices de plusieurs quartiers, en leur donnant dans ces obscurs souterrains un appui qu'ils n'avaient

pas.

» Tout le faubourg St.-Jacques, la rue de la Harpe, et même la rue de Tournon, portent sur d'anciennes carrières, et l'on a bâti des pilastres pour soutenir le poids des maisons. Que de matière à réflexions, en considérant cette grande ville formée, soutenue par des moyens absolument contraires! ces tours ces clochers, ces voûtes des temples, autant de signes qui disent à l'oeil : ce que nous voyons sous nos pieds. »

en l'air manque

Tome I.

E

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Où est le Gouvernement féodal?

M. Mercier dit :

«La noblesse qui vivait il y a deux cents ans dans ses châteaux, répugnait à venir dans la grande ville: aussi que n'a-t-on pas fait en France pour lui faire déserter les donjons épars qu'elle habitait dans les campagnes? De là elle bravait souvent des órdres arbitraires : elle avait un rang; mais lorsque les graces du souverain ne se sont plus manifestées que dans tel bureau; lorsqu'un point unique, attractif et central s'est établi, où tout ce qui était dans le cercle devait aboutir, il a fallu quitter les antiques châteaux : ils sont tombés en ruine, et avec eux la force des seigneurs. On les a étourdis avec toute la pompe qui environne les cours : on a institué des fêtes pour les amollir; les femmes, qui vivaient dans la solitude et dans les devoirs de l'économie domestique, se sont trouvé flattées d'attirer les regards; leur coquetterie, leur ambition

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