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dessus des Chartreux sont légués par Jean Angoulant, laboureur à Notre-Dame-des-Champs. Ce vaste terrain était vraisemblablement situé du côté sud du chemin d'Issy (1).

(1) Archives de l'Assistance publique, liasse 432, pièces 1 à 17. Voici la traduction des plus intéressantes pièces de ce dossier:

Pièce 1. « L'abbé de Saint-Victor reconnaît la vente faite par Eudes de Vernouillet et par Marguerite sa femme à Roger Comin, bourgeois de Paris, d'un clos de vigne appartenant autrefois à Philippe de SaintPaul, et grevé d'un cens annuel de quatre sous, trois oboles, dont deux sont dus à l'abbé de Saint-Victor, pour cent vingt livres. » C'est la pièce la plus ancienne : elle est de mars 1223.

Pièce no 5. << Février 1224 vente pardevant l'official de Paris, par la veuve et le fils de Pierre Vilain, à Roger Comin, bourgeois de Paris, d'une vigne située près de l'orme du Roi, dans la censive de Mme Agnès de Codreello (de Coudraie) et grevée d'un cens annuel de 10 deniers, pour la somme de 24 livres parisis. >>

Les pièces 9, 10 et 11 rappellent des acquisitions faites par la famille Comin.

Pièce no 12. Août 1265. Donation faite pardevant l'official de Paris, par Perrenelle la Vinetière, veuve de Guillaume le Vinetier, à l'Hôtel-Dieu d'un pressoir et de 6 arpents sis en un clos au delà de la porte Gibard, au devant des vignes du Roi notre Sire, dans l'angle vers l'orme, près de la route qui conduit à Vauvert et qui appartinrent à feu Roger Comin, à la condition de fonder une chapelle audit Hôtel-Dieu, pour le repos de son âme.

Pièce no 15. Donation devant l'official de Paris 1297 le dimanche avant la Saint-Denis, par Perrenelle, veuve de Nicolas Erroude, bourgeois de Paris, à l'Hôtel-Dieu, d'un arpent et demi près de Vauvert, à la charge d'une redevance annuelle d'un tonneau de vin bon et pur, recueilli dans le clos. Il est stipulé que le fût sera fourni par Perrenelle. Pièce n° 16. Donation analogue d'un arpent de vigne, près de Vauvert, par Alix Arrode, bourgeoise, 1323.

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Pièce no 17. 12 septembre 1445. Mise en possession faite par les exécuteurs testamentaires de Jean Angoulant, laboureur à Notre-Damedes-Champs, de legs faits à l'Hôtel-Dieu, par Angoulant, comprenant 20 arpents 1/2 de terre assis au terroir d'au-dessus des Chartreux, audessus du lieu dit : longue Roye, de l'autre part du chemin qui va des Chartreux à la croix du Gort, tenant d'une part, c'est à savoir du costé de devers les Chartreux à Me Guillaume de Molins et d'autre part à 7 quartiers de terre appartenant audit hostel Dieu, lesquels ledit défunct tenoit en son vivant, aboutissant du bout d'en bas audit chemin et de l'autre bout audit Me Guillaume de Molins. Item, 5 quartiers de terre

Vers la fin du xve siècle, les Chartreux, déjà pourvus de beaux domaines aux environs de Paris et notamment dans la Brie, s'occupèrent d'arrondir leur enclos. Au commencement du xvi, suivant le témoignage de du Breul, cet enclos couvrait quarante-neuf arpents, y compris vingt arpents acquis en 1525 dans la censive de SaintGermain-des-Prés, et faisant partie des clos de Vignerai et de Saint-Sulpice.

C'est vers cette époque là, sans doute, que les Chartreux annexèrent à leurs propriétés le petit clos séparé du grand par le chemin, situé topographiquement au-dessus du couvent et cédé, peut-être, par l'Hôtel-Dieu. Le petit clos nous intéresse spécialement, puisque c'est dans la partie de ce clos, dénommée clos de la Forge, que s'étendront plus tard les dépendances de l'Hôtel de Vendôme. Les documents des Archives ne nous permettent malheureusement pas de mieux préciser l'histoire du petit clos jusqu'au XVIIe siècle (1).

Au commencement du xvII° siècle, deux événements modifièrent l'enclos des Chartreux.

D'abord en 1617, les moines voulant réunir le petit clos au grand demandèrent au roi la suppression du chemin. qui séparait les deux parties de la propriété. Louis XIII,

ayant les mêmes tenants. Item, 2 arpents de terre au lieu dit la folie tenant d'une part et aboutissant d'un bout audit hôtel Dieu, de l'autre à Jehan Magdalaine. Item, 7 quartiers que tenait le défunct près du lieu dit la Gouchière.

(1) Le plan de Georges Braun (1530) figure un enclos des Chartreux, en apparence, tout entier du même côté du chemin d'Issy. Je n'ai en somme trouvé que très peu de renseignements sur l'origine du petit clos et du clos de la Forge des Chartreux. Peut-être l'examen du carton des Archives nationales, L. 939, donnerait-il un meilleur résultat. Ce carton contient divers registres de la comptabilité des Chartreux au xve siècle et

au xvi.

par lettres patentes de 1617 et du 8 février 1618, y consentit, dans l'intérêt de la commodité publique. Les Chartreux, d'autre part, pour l'embellissement de leur maison, s'engagèrent à créer une avenue en droite ligne, au travers du petit clos, jusqu'à la nouvelle rue d'Enfer.

Le Roi leur donna le chemin de Vauvert, aussi bien la section qui traversait la propriété du couvent que la section mitoyenne entre le petit clos et la ferme de l'HôtelDieu. L'antique voie inférieure devint un chemin privé (1).

La seconde opération fut encore plus importante. Vers 1625, Marie de Médicis résolut d'acquérir la partie du clos qui lui était nécessaire pour compléter et régulariser le jardin du Luxembourg.

Les Chartreux se refusèrent à toute transaction (2).

(1) Les Chartreux dressèrent un plan à cette occasion. Le plan sur parchemin et soigneusement dessiné est aux Archives nationales. Il fixe d'une façon assez précise la disposition générale du couvent et les emplacements du petit clos, du chemin d'Issy (Archives national., S. 3960). Pour compléter la présente notice, j'ai tracé la superposition au Luxembourg actuel de la Chartreuse au xvir siècle. Le dessin met en évidence certains détails relatifs à l'histoire antérieure du couvent; les emplacements de l'Orme du Roi, de la Ferme de l'Hôtel-Dieu, du petit Clos, du Clos de la Forge, etc. Je me suis servi des plans de Verniquet, de Delagrive, du plan dressé en 1796, par ordre du curé de Saint-Sulpice, du plan des Chartreux, enfin du plan archéologique de Paris, encore inachevé. J'ai trouvé, auprès de M. Marcel Poëte et de son collaborateur M. Beaurepaire, à la Bibliothèque historique de Paris, une complaisance très grande que je ne puis oublier.

(2) Archives nationales, L. 937, p. 3. Lettre du prieur de la Chartreuse à la Reine Régente, mère du Roi : « Madame, les Religieux prieur et couvent, Notre-Dame de Vauver lez Paris, ordre de Chartreux, vous remonstrent très humblement que..... personne ne saurait suffisamment estimer, Madame, combien vos jardins amenez si près de notre église traverseront le service divin par le grand bruit qui ne se peult esloigner des maisons royalles et qui ne se doist pas espérer moindre icy qu'au jardin des Thuilleries, de sorte qu'alors qu'au plus profond silence de la nuict, nous chanterons les louanges de Dieu, nous nous trouverons interrompus par des voix séculières, dont les unes feront retentir l'air de

Mais on leur fit comprendre que le contrat offert par la Reine était avantageux. Marie de Médicis, en échange de seize arpents et soixante perches, donnait une somme de quinze cents livres, deux maisons et vingt arpents de terres, au delà du vieux chemin et attenant aux terrains qui appartenaient déjà aux religieux. Le contrat devint définitif le 16 juin 1627 et, vers le milieu de 1628, les Chartreux entraient en possession des terrains achetés soit à l'Hôtel-Dieu, soit à divers propriétaires, en bordure de la nouvelle rue d'Enfer. L'acquisition d'une bande de terrains appartenant au Pressoir noya entièrement, en 1633, le vieux chemin d'Issy dans la propriété des Chartreux (1).

Les deux opérations dont je viens de parler fixèrent au Clos des Chartreux la forme et l'importance qu'il conserva, sans modification, jusqu'à la Révolution. On le voit en comparant le clos d'après le plan de Verniquet, par exemple, au clos, suivant le petit plan de 1650 dû à Jean Boisseau.

A la Révolution, l'immeuble des Chartreux occupait un immense espace triangulaire dont les sommets étaient respectivement le premier en un point à peu près déter

cris incommodes, peut-être de blasphèmes, ou de parolles infâmes (quoy que contre le dessin de Votre Majesté), les autres faisans sonner les instrumens, feront résonner des airs prophanes dont ils croyent (dit un prophète) avoir l'usage légitime aussy bien que David duquel ils troubleront en noz bouches et en noz âmes la céleste musicque dont le son ne ravit pas tant les oreilles comme le sens ravit les cœurs en dévotion..... >

Vers 1780, le comte de Provence forma aussi le projet d'agrandir le Luxembourg au détriment de la Chartreuse, mais on ne put vaincre la résistance des religieux. Bulletin de la Société Historique du VI° Arr. Année 1900, p. 70: « Les Chartreux et le comte de Provence », par A. Bruel.

(1) Archives de l'Ass. publique, liasse 433, contrat de vente du 30 mars

Sté que DU VI.

1908.

12

miné par l'extrémité nord de la façade de l'École des Mines, le second en un point que peut représenter le coude de la rue Duguay-Trouin. Enfin, le troisième sommet n'est autre que l'intersection de la rue Denfert-Rochereau et du boulevard de Port-Royal. L'enclos proprement dit couvrait 76 arpents et 297 toises. En ajoutant à cette superficie celle des immeubles de la rue d'Enfer et des divers terrains loués à des maraîchers entre le mur du clos et la rue Notre-Dame-des-Champs, on approche d'une centaine d'arpents ou 341.900 mètres carrés, pour l'ensemble de la propriété des Chartreux dans le quartier du Luxembourg.

L'enclos était presque public, à l'exclusion des femmes, chacun pouvait s'y promener et constater que le travail le plus assidu et l'économie la plus parfaite y entretenaient, avec avantage pour la maison, tous les genres de cultures potagères, fructuaires et légumières, que le sol assez ingrat, mais très bien exposé, pouvait permettre (1). Les revenus du Couvent montaient, en 1790, à 155.471 livres 5 sous et 7 deniers. Ils provenaient surtout du revenu des maisons, soit 72.515 livres (2), ensuite du revenu de l'enclos pour 6.000 livres, enfin des fermages en Brie et en Normandie et des censives. Les charges atteignaient 51.530 livres, y compris les rentes à acquitter, les frais du culte, les réparations immobilières, etc.

Suivant les commissaires de la ville, la maison était

(1) Archives nationales, T 514. Inventaire de la Chartreuse de Paris fait par les Commissaires du Conseil de cette ville, en exécution du décret de l'Assemblée Nationale des 20 février, 19 et 20 mars 1790.

(2) Les Chartreux possédaient à Paris un nombre important de maisons, rue Saint-Martin (maison de la Corne de Cerf), rue Saint-Jacques (à l'image de Saint-Jacques),rue Hautefeuille, rue Serpente, etc. Arch. Nat. s. 349 et s. 3359.

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