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l'Armallier et un Serex [sérac] qu'il dérobat» (Cour de Vevey, 1682). Vient peut-être de pulvis; cfr. l'allemand sich aus dem Staub machen.

53. sén cé qu'on reve, comparez le vers 104: cen slia que besa, où sen a le sens de: le diable emporte celui qu'on revit, etc., ce qui équivaut à une forte négation. Je suppose que c'est un juron abrégé. On rencontre parfois une forme plus complète: de (ne) sin que; cfr. 149 de ne cén lo mén d'on bon pot d'eguarzen =pas moins de, etc.

54. viaudzo, espèce de serpe très forte à lame d'abord droite, puis recourbée à son extrémité; sert à tailler les haies et à couper des bran

ches pour en faire des fagots. Du mot celtique viduvium, fr. vouge.

On ne voit pas très bien pourquoi le père s'arme de cet outil. Voulait-il se prémunir contre un mauvais coup du « galant >?

63. mortay, grande pierre de grès creusée, dans laquelle on met les braises de la cuisine, après les repas, et servant de brasier. On l'emploie encore dans des lieux écartés. Même origine que le fr. mortier.

66. gueliétta, petit cône de poudre humectée et broyée que les enfants s'amusent à fabriquer. 68. folèyi, rad. de fou + idiare.

69. voilaye, de l'allemand wallen?

81. poevo, a pris la terminaison de la première conjugaison. On trouve aussi volavo, de vouloir, mais pas ici; cfr. volié au vers suivant.

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83. tiautre, probablement pour kiautre, lat. eccum hic ultra, doublet éteint de chautre ecce hic ultra, qui existe encore dans la composition pèchautre, dans nos parages.

95. novien, aveugle, de non vedentem.

99. danser et sauter sont ici employés comme transitifs. 100. mola, embrasser, proprement émoudre, probablement à cause de la ressemblance du bruit. notta, note air air de danse

danse.

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116. On appelle catzeman non seulement un manchon, mais

aussi l'ouverture, de chaque côté d'une jupe, qui correspond aux poches que portaient les femmes.

125. recor signifie ordinairement le regain, ce qui ne va pas ici, à moins de comprendre tas de regain. Mon sujet d'Escherin m'a indiqué le sens de tertre, mais cette assertion mériterait d'être contrôlée.

129. batacu, de betacu, par assimilation de voyelles, formé des mêmes éléments que le français culbute, mais dans l'ordre inverse. 150. eguarzen, du latin aquam ardentem; cfr. Jeanjaquet, Bulletin du Glossaire, III, p. 36.

169. cheurtzo robe, de l'allemand Schürze; comparez cette indication du Vocabulaire du Recueil Corbaz: cheurtzo, espèce de vêtement de femme, comme qui dirait une robe de chambre, un surtout. Le mot existe encore en Valais, par exemple à Evolène: choutso robe en drap du pays, corsage et jupe d'une pièce, ainsi que dans les patois de l'Est de la France. Voir aussi Salvioni, Romania XXVIII, 106.

171. lèy a de l'unyon il y a anguille sous roche.

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184. voizu, lat. vacivus, vide, stérile. Comp. le proverbe an tardu ne fu djamé vouazu.

190. malapanaye est composé de mala mauvais, et de panaye, du verbe pana essuyer, frotter.

192. détiendre = éteindre, de de extinguere.

210. recouilli, signifie ramasser le blé à mesure que le moissonneur le fauche; l'ouvrière qui fait cette opération s'appelle la recouillauza. C'est une spécialisation du sens de recueillir. Se recouilli a le sens de rentrer. Comparez se ramasser de quelque part, se réduire chez soi, etc.

sonica ne signifie pas, comme l'indique le Vocabulaire du Recueil de Corbaz, suivi par Favrat, gai, content, mais dormir; comparez les passages suivants: on pao sonica et mimameint ronclliá à se n'ése, on peut dormir et même ronfler à son aise (Conteur vaudois, 1899, No 18); ne vollieint étrè lévá dévant que l'aussè botsi dè sonica = nous voulons être levés avant qu'il ait cessé de dorinir (Conteur vaudois, 1884, N° 15). Ce verbe, qui se retrouve encore plusieurs fois dans le Conteur, est formé plaisamment, au moyen du suffixe -ikā, du radical de sonno, sommeil.

L. GAUCHAT.

FRAGMENT

D'UN GLOSSAIRE DE L'AJOIE

(JURA BERNOIS)

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[La rédaction du Glossaire des Patois romands a eu la bonne fortune de trouver en M. Fridelance, professeur à Porrentruy, un collaborateur des plus compétents, qui s'occupe depuis plusieurs années à recueillir le vocabulaire complet du patois de l'Ajoie. Ce travail de premier ordre sera bientôt achevé, et nous en reproduisons ci-dessous le début, à titre de spécimen et de modèle à suivre par nos correspondants. Le patois plus spécialement représenté est celui de Charmoille.]

ā, s. m. Voyelle et première lettre de l'alphabet. nɔ sèvoè ni a nib ne savoir ni a, ni b, être complètement ignorant, illettré.

ă, forme de l'article combiné avec à ou en. a tyætchi: au jardin. à bontan: au printemps. à fua! au feu. ā lon: à côté (de). cf. an, é.

ā, s. m. Ail. ïn-n ā, déz ā: un ail, des aulx. in-n' kòf dã: une gousse d'ail. in-n' yan-n' d'a: une glane, une chaîne d'aulx. to pu léz a tu pues l'ail.

ā, āt', ou avec aspiration ha, hāt', adj. Haut, élevé. sta poutch n'a p' prou al': cette porte n'est pas assez haute. s'a tro ā, in' sarò èpondr': c'est trop haut, je ne saurais. atteindre. mon pin n'a dyèr veni à mon pain n'a guère levé (litt. n'est guère venu haut). an-n n on dj' vu dè chi hā klu : on en a déjà vu d'aussi haut placés que lui. Adv. è n' fă p'tyudī patè pu hà k lò tyu: il ne faut pas vouloir péter plus haut que le C.., c'est-à-dire vivre au delà de ses moyens. | S. m. Partie supérieure, haut, sommet. èl é nadji chỉ lẻ hã:

il a neigé sur les hauteurs. lò ha d Mont'bra: le haut, le point culminant de Montbreux. è fã brègè lò hã è pɔ dmorè din 1 bé il faut vanter le haut (la montagne, et demeurer dans le bas (la vallée, la plaine). si tchinbon san lo ha d lè tyach': ce jambon sent le « haut de la cuisse » (le faisandé).

abèdj, s. m. Chanson d'amour qui se chantait le soir. Les abèdj ont disparu du Jura, mais se chantent encore dans les villages du Doubs. tyin lé boub in tiri à sor, è vin tchintè léz abèdj è pɔ dinsi pè lé mājon: quand les conscrits ont tiré au sort, ils vont chanter les abèdj et danser de maison en maison.

abén', s. f. Aubaine.

abésé, s. m. Alphabet, abécédaire. kél èn! è n sè pi p'ankò l'abésé: quel âne! il ne sait pas même encore l'alphabet. èpar l'abésé: apprendre l'abc. C'était autrefois un petit livret dont la première page présentait l'image de saint Nicolas bénissant les petits enfants dans le saloir de la légende. èl é to dévou rè son-n abésé: il a tout déchiré son abécédaire. On collait aussi le tableau des lettres sur une « palette. » Cf. palat'.

abi, s. m. Ne s'emploie qu'avec l'adjectif « libre, » dans la locution évoè son libr abi: avoir son libre arbitre, sa liberté d'action, de décision.

ābil, adj. Habile, expéditif. è n'a dyèr abil: il est peu habile, il a peu de savoir-faire. voz éť' abil: vous êtes expéditif, vous avez vite eu fait. || Prompt, agile. è n fœ p' prou abil: il ne fut pas assez leste, assez agile.

ablatr', s. m. Arbalète. tiri an l'ablatr: tirer à l'arbalète. ||Fig. Malotru, escogriffe. tyu à si pa-l-àblātr? quel est ce vilain merle, ce malotru?

ablétri', s. m. Arbalétrier. || Sagittaire, signe du zodiaque. abnet', s. f. Mot vieilli pour abni', eau bénite, păr d l'abnet:

prendre de l'eau bénite avec les doigts dans le petit bénitier suspendu dans la chambre et se signer. abnèt', it pran, | d trã tchōz mə défan : | d l'in-n’mi, d lè serpan, | d métchinn djan | d mæri de mou sōbiťman: Eau bénite, je te prends, De trois choses me défends: De l'ennemi (du démon), du serpent, De méchantes gens, De mourir de mort subite(ment). Prière en prenant de l'eau bénite le matin en se levant. Cf. abni.

abnéti, s. m. Grand bénitier fixe d'église. || Nom du cardère (Dipsacus sylvestris), dont les feuilles forment bénitier autour de la tige et recueillent l'eau de pluie. Cette eau passe pour rendre beau qui s'en lave la figure et rajeunir les vieux.

abnètir, s. f. Bénitier, petit bénitier domestique. è y è bïn in-n abnèti'r an yöt poèy', min èll a tot' satch, è n'y é ran d'din: il y a bien un petit bénitier dans leur chambre, mais il est complètement à sec, il n'y a rien dedans. Quand il commence à grêler, on met quelques grêlons dans le bénitier pour arrêter la grêle. Cf. tchādrať.

àbni3, s. f. Eau bénite. par d l'abni: prendre de l'eau bénite (pour se signer). fri ou tchinpè l'abni: asperger d'eau bénite avec le goupillon ou un rameau de buis. A l'office du samedi saint, le prêtre prépare une cuve d'eau bénite et chacun en emporte une provision. On en asperge les vergers, car on lui attribue la vertu de détruire la vermine. Certaines paysannes ne laissent pas sortir de leur maison une goutte de lait sans y avoir jeté un peu d'eau bénite, afin de prévenir les maléfices. || Par plaisanterie, eau-de-vie. vin păr l'abni: viens boire la « goutte ». alè an l'àbni: aller chercher de l'eau-de-vie (avec une bouteille cachée sous la blouse). Cf. la variante abnè?'.

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