Page images
PDF
EPUB

faye la pachèrik, chè dèvan' tsikoun apèla pè lò non dè « mīma » tsikè vyaz kə chè dəvəjèran' dèvan' lóou. Oun zò l'ouna dei fayè l'arguve. La padouch, trèo koumè dè bouè dè fourts, la la chouètoun lò bonzò, lə lə fan' məl kompləmins 12, la la prèjèn'toun' dè lasé, dè flóou, dè kalya, dè pré13, dè bouro, dè chèré1, finkè dè mòta roueit, infin 15 tò chèn' k y avan' è ka lǝ aurè pòchou(k) férè pleiji. Lə fãy l’'a eida èvònãya è rèzouyāy 16 dè chè vèr chǝ byein tratãy è dè tròva dè pavouch dè tan' dè fìk pòr lyè. Oun pavóou l'einvitè a ala aoué luìk fér ouna pròmènarda chou(k) pè lò son dè la moun'tany pò chè pacha lò tein è pò koulyi kakè zèn'tè flóouch ky quran' pòchou la tèn'ta. Lə faya lə partè. La padóouch' dè tsajyourə chè jyon': Ora y è la mouman dè lə zùyè nouðra tòr. Fajein visto boulika dè lasé ; kan' lə vən'drè l'arè chìk. Nò la mètrein lò kòlyóou17 in gòrz è pouè nò lə kòlèrein ouna mèstrāya dè ché lasé bourlèn’. Dèvé lò ta, lə fayǝ l'arouvè è la dèman'dè a beire. La pavo lǝ bạlyè visto lò kòlyóou in gòrz è pouè la

18

de « Même » chaque fois qu'ils parleraient devant elles. Un jour une des fées arrive. Les pâtres, traîtres comme du bois de fourche, lui souhaitent le bonjour, lui font mille compliments, lui offrent du lait, de la crème, du lait caillé, du fromage frais, du beurre, du sérac, jusqu'à du fromage grillé, enfin tout ce qu'ils avaient et qui aurait pu lui faire plaisir. La fée a été étonnée et réjouie de se voir si bien traitée et de trouver des pâtres qui aient tant d'attentions pour elle. Un pâtre l'invite à aller avec lui faire une promenade au sommet de la montagne pour se passer le temps et pour cueillir quelques jolies fleurs. qui auraient pu la tenter. La fée part. Les pâtres du chalet se disent: << Maintenant, c'est le moment de lui jouer notre tour. Faisons vite bouillir du lait; quand elle reviendra, elle aura soif. Nous lui mettrons le couloir dans la bouche et puis nous lui verserons un baquet de ce lait brûlant. » Vers le soir, la fée arrive et demande à boire. Le fromager lui met vite le couloir

le ouizè ouna mèstrāy dè lasé boulikèn'. Lə fãy, là lặchè kaurè lò kòlyóou è lɔ chè mèt a kriya a la fãy dóou Kòvè̟: « Mam' bourlay.» ɣlə 19 dóou Kòvè̟ lə lə rèfon: « Ki ťa bourlāy3 ? » « Mīma 20, » l'ātra lə lə dìt. « Mīma tù lò t é fét, mīma tù lò ouardèré. » Lə fãy3 dè la Niva l'è morta dabò apré è xlǝ dóou kòvè l a eiva bourlay dè la mīma móda èn❜ ouna moun'tany a pa. Lè-j-ātrè făyè kò lè rèstāvoun' in la koumouna, lè-j-anʼ jou pouïr' è lè-j-an' fòtou lò kan èn' Ŏva. Balé lè choun' ala chè fourjyè èmpè dè pèrtuìs kə lè-j-an' fét èmpèr oum'pra. Tchika mi apré 21 chǝ ky avì(k) ché pra lóou-j-a fotou l'ou dèchouk. Adon' lè chè choun' mèchè tòtè a kriya: « va,va. » Lǝ pròpriyètèro dóou pra y a pa balya fik 22 a lóou krik è lóou-j-a dit : « Mè chòrchyère, rèsta lei pyè ei pèrtuìs. » È tò̟tè lè fãyè lei choun' rèstayè èvòƒãyè. Di adon', dei făyè n'èn' ein pa mi aoui dəvəja, ma i jyon' kè lə non dè la vṛla d'Ổva vən' dè xlóou krik dei făyè : ò̟va, ò̟va.

θα.

à la bouche et y vide un baquet rempli de lait bouillant. La fée laisse tomber le couloir et se met à crier à la fée du Cotter: <<< Ils m'ont brûlée. » La fée du Cotter lui répond: « Qui t'a brûlée » — « Même, » lui dit l'autre. « (Puisque) tu te l'es fait toi-même, toi-même le garderas. » La fée de la Niva est morte tout de suite après et celle du Cotter a été brûlée de la même façon dans un alpage voisin. Les autres fées qui résidaient dans la commune ont eu peur et se sont enfuies à Aoste. Làbas, elles sont allées se fourrer dans des trous qu'elles ont faits dans un pré. Un peu plus tard, celui qui possédait ce pré a fait venir l'eau (d'irrigation) sur elles. Alors elles se sont toutes mises à crier : << Ote, ôte. » Le propriétaire du pré n'a pas fait attention à leurs cris et leur a dit : « Mes sorcières, restez-y seulement dans vos trous. » Et toutes les fées y sont restées étouffées. Dès lors, nous n'avons plus entendu parler des fées, mais on dit que le nom de la ville d'Aoste vient de ces cris des fées: Ote! ôte! »

NOTES

Il est facile de reconnaître dans le conte reproduit ci-dessus une variante populaire, strictement localisée, d'un motif de l'antique légende de Polyphème, dont on a déjà relevé de nombreuses versions dans les pays les plus divers. Comme nous nous proposons de signaler ailleurs l'intérêt qu'offre à ce point de vue notre récit, nous ne nous y arrêterons pas ici et nous nous bornerons à mentionner qu'une variante de la même légende a été recueillie dans la vallée voisine d'Anniviers. (V. Archives suisses des Traditions populaires, V, 1901, p. 288). La version que nous donnons nous a été contée en 1900 par M. Jean Pralong, d'Evolène, telle qu'il l'avait entendue luimême dans les veillées. Grâce à l'obligeance de M. P. Gaudin, député, également d'Evolène, nous avons pu contrôler récemment notre première transcription.

Le patois d'Evolène est un des plus archaïques et des plus originaux du Valais. Son système phonique diffère notablement de celui du français. La simplicité de la transcription adoptée pour le Bulletin ne nous permet pas d'en rendre toutes les nuances délicates et nous oblige à nous contenter d'une exactitude approximative. Nous attirons l'attention sur les particularités suivantes :

Le son noté désigne un i d'un timbre particulier, guttural, dont l'impression acoustique oscille entre i et e. Le même son plus réduit a été noté par 2, qui n'est donc pas l'équivalent exact de l'e sourd français.

Le timbre guttural de è, qui donne à la voyelle un caractère mal déterminé, affecte aussi d'autres voyelles. ou bref ou atone est toujours ouvert. Il se rapproche parfois de u et nous l'avons dans ce cas transcrit par ù; è atone tend à un son voisin de l'e sourd français.

ei et óou sont des diphtongues dont le second élément est faible.

Les voyelles nasales an, ein, on, in, oun sont suivies d'un élément consonantique vélaire plus ou moins marqué, sensible surtout dans les voyelles extrêmes in et oun; ein désigne un son plus fermé que le français in.

Les notations an', on', oun', etc., indiquent que l'n doit être

prononcée. Il faut toutefois remarquer que dans ce cas, qui se se présente lorsque l'n était suivie en latin d'une seconde consonne, la nasalisation est en voie de se produire actuellement et qu'on rencontre toute la série des phases intermédiaires, suivant l'intensité plus ou moins grande de la syllabe.

Le v intervocal est en général faible et parfois à peine perceptible. Il est bilabial.

Le k parasite et les consonnes finales autres que et n ne sont articulées distinctement qu'en pause ou devant voyelle. Dans la prononciation rapide devant consonne, ils s'affaiblissent ou disparaissent complètement.

1 chès, pluriel de ché, rocher, du latin saxum. Les nombreuses formes spéciales de pluriels en s ou ch constituent une des particularités les plus caractéristiques du patois d'Evolène. Sans entrer dans les développements que réclamerait l'étude de cette question, constatons seulement que l's de flexion s'est maintenue toutes les fois qu'elle était appuyée par une consonne précédente. Après les voyelles nasales ou r, elle se présente sous la forme ch: la man, ‘la main', plur. lè manch; lə tòr, ' la tour', pl. lè toch; après les consonnes t, n, l, l mouillée, on a en revanches; la pra, le pré', pl. la pras; la moulèt, 'le mulet', pl. la moulès; la dèn', 'la dent', pl. lè dins; l'óoujé, 'l'oiseau', pl. lǝ-j-óoujès ; l'ouèl, ' l'œil', pl. la-j-ouès. Ces faits ne sont que l'application des lois générales de conservation des consonnes finales dans le patois d'Evolène; mais il existe aussi bon nombre de cas spéciaux, parmi lesquels il faut faire rentrer le couple ché, chès, où l'état de choses primitif a été troublé par l'action de l'analogie.

2 mouro dè rùvina, amas de terre et de pierres formé par un éboulement.

3 èn Òlein-na, forme réduite, plus courante que la forme pleine èn Èouòlein-na.

pareis dè ché, la forme isolée du mot est parik, mais dans la prononciation liée, le k s'efface et on perçoit la diphtongue.

5 lò tsātein, forme du cas régime, de règle pour les déterminations de temps. On sait qu'un assez grand nombre de patois valaisans ont conservé pour l'article défini la distinction de

l'ancien français entre cas sujet et cas régime. A Evolène, les formes de l'article défini sont les suivantes :

[blocks in formation]

On dit donc lǝ moulèt y è vèn'douk, lǝ vats l'è vèn'doucha, mais fó vèn'drè lò moulèt, la vats.

6 daouè dè lóou lè-j-alāvoun. La reprise par un pronom personnel du sujet déjà exprimé par un nom est un fait à peu près constant de la syntaxe des patois de la région.

7 pavou, pl. pavouch, est le terme général pour désigner tous les employés d'un alpage, tandis que pavo ne s'applique qu'à celui qui dirige l'exploitation.

[ocr errors]

8 moun'tany, est toujours équivalent de alpe, alpage', mots. qui sont inconnus au patois.

9 redout, versant exposé au soleil, par opposition à rèvè.

10 auran, forme dérivée du plus-que-parfait de l'indicatif latin habuerant, mais qui a pris la valeur d'un conditionnel. Ce temps se conjugue ainsi :

y ouro, l'aure, y cure, n'ouran, y ouras, y auran'.

Il ne subsiste que dans les verbes être, avoir et savoir. 11 kankòna, terme d'injure 'mégère, sorcière'.

12 komplamins. Dans les mots terminés en -an', -èn', -on', où I'n se fait encore légèrement sentir, le pluriel a des formes. presque complètement nasalisées: -ans, -ins, -ons.

13 kalya, pré. Le kalya est du lait caillé, mais dont les parties caséeuses ne sont pas encore séparées du petit lait, tandis que le pré est la pâte du fromage prêt à être retiré de la chaudière. 14 chèré, sérac, fromage blanc qu'on obtient en faisant cailler le petit lait.

15 infin, vieille forme généralement remplacée aujourd'hui par anfein.

16 rèzouyay, devient dans la prononciation courante rèzouyèy.

« PreviousContinue »