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le suif et le coton et fait sa chandelle. Pendant le siège, cette chandelle est achetée 16 s. les 20 livres ; en 1471, elle valait un sou la livre (1).

Le bois, pris à Troissereux, se vendait 2 s. le moncel et la façon se payait 10 s. pour 10 monceaux.

On avait les bourrées à 12 d. le demi-quarteron et 8 s le cent; pour leur façon, on donnait 3 s. par cent.

Les fagots étaient à 6 s. les trois quarterons; le charbon à 6 s. la somme en 1472, et à 2 s. 8 d. les deux sommes, l'année suivante.

Notons enfin la perte d'argent que causait à l'Hôpital la dépréciation monétaire de certaines espèces ayant cours à Beauvais, telles que les monnaies anglaises, flamandes et bourguignonnes. Ainsi, en 1472, un plâtrier, à qui l'Hôtel-Dieu devait 42 s. en monnaie royale, reçut 47 s. 3 d. « en monnoie de Beauvais, c'est-à-dire, en espèces ayant cours en cette ville, car il n'y avait plus ici d'atelier monétaire, mais seulement un ancien Hôtel de la Monnaie. De même, le receveur du bailliage de Senlis, auquel les religieux devaient 40 1. parisis, reçut 45 1. en paiement.

Au milieu du xv° siècle, comme à la fin du XIV° siècle, les monnaies trouvées aux troncs des églises ou mentionnées dans les Comptes (2) sont: des lions d'or et des oboles d'or, des saluts, des Philippes et « pietres » de Bourgogne, des grands et des petits blancs de France, des patars de Flandre, des patars d'Utrecht et autres barrés (3), des deniers de Paris, des grands blancs de

(1) En 1472, on emploie 100 livres de suif, deux livres et un quarteron de coton pour faire 225 livres de chandelle. En 1473, on a acheté 115 1. de sun pour faire 343 1. de chandelle.

(2) Notamment à la cathédrale et dans les Comptes de SaintEtienne de Saint-Martin et de Saint-Laurent.

(3) Pour une livre tournois, il fallait, en 1473, 16 virelens ou patars. (Collection de Bretizel, carton XV, 193.)

Savoie et des petits bretons, des liards, des « testars » d'Angleterre dont chacun valait 2 sous, des plaques de Flandre, des angelots, des oboles du Rhin, etc.

CONCLUSION

En résumé, l'Hôtel-Dieu de Beauvais, très menacé par sa situation le long des remparts, au point même où devait se porter l'une des attaques les plus vives des Bourguignons, en subit de grands dommages.

A l'approche de l'ennemi, plusieurs religieux avaient parcouru les domaines de l'Hôpital afin d'y recueillir l'argent des cens et des redevances; les blés étaient ramenés et emmagasinés dans les greniers.

Le 16 juin, dix jours avant l'arrivée des Bourguignons, un frère emporte l'argent qu'il confie aux religieux de l'Hôtel-Dieu de Paris; un local est loué afin d'y mettre certain bétail en sûreté jusqu'au mois de novembre, pendant que les vaches sont emmenées auprès de Gisors. Par deux autres fois, on revient porter à Paris d'autres biens, notamment les registres, les chartes et les livres.

Le maître lui-même, qui a quitté sa Maison, y rentrera le 17 juillet, cinq jours avant la levée du siège. Les Bourguignons n'avaient pas pu, heureusement, occuper la Porte de Paris et encercler totalement Beauvais c'est par cette porte que les secours du roi purent pénétrer et prêter main-forte aux habitants assiégés.

Le 24 avril suivant, on se croira assez en sécurité pour rapporter de Paris l'argent, les cartulaires, les titres de propriété et les registres de comptes.

Dès le début du siège, on relègue les malades au réfectoire de la communauté ; des verrous et des ferrures sont mis à la dépense et aux fenêtres de la maison des accouchées; on ferme la chambre et le lardier. Celliers des vins maçonnés, portes des étables fermées à clefs,

planches clouées aux soupiraux des chambres prenant leur jour sur le rempart tout est mis en œuvre pour éviter pillage et incendie.

Sur les toitures on répand du sable, par crainte du feu; sur les remparts, afin de renforcer la muraille, on porte vieux lits, tonneaux et futailles; tout cet amas d'obstacles, on le consolide avec des pavés arrachés de la cour.

Le siège levé et l'ennemi chassé, il faut réparer les dommages. La chapelle a beaucoup souffert les portes en sont détruites et les cloches brisées, le clocher tombe en ruine. On restaure la charpente de la grande. salle des malades et, pour en refaire les couvertures, 18 milliers de tuile sont nécessaires avec chaux et sable, lattes et chevrons un couvreur et ses deux valets y besogneront pendant un an. C'est encore 38 toises de pavage à refaire dans la cour; les lits et les futailles à remplacer, les verrières de la chapelle, de la chambre du maître et du réfectoire à remettre à neuf, avec les grillages de leurs fenêtres.

Les années suivantes jusqu'en 1483, les travaux se continueront aux murs de l'Hôpital et de l'Hôtel de Breteuil, aux bergeries, à la cuisine, au dortoir des

sœurs.

A de nombreux censitaires, on accorde des remises de cens ou de loyers pour des maisons, des jardins ou des terres, ruinés par la guerre ou délaissés par leurs locataires. Les uns demandent un délai de paiement; certains réclament une diminution des cens ; d'autres enfin seront poursuivis en des procès interminables.

Les dépenses de 1473 furent si lourdes et les recettes d'argent si faibles que le compte a donné un déficit de 7 livres 8 sous.

:

Joignez que la récolte de blé et d'avoine fut très mauvaise de 179 muids de blé et 105 d'avoine recueillis en 1471, elle descendit à 87 muids de blé et 58 d'avoine; et ce blé qui valait 2 s. la mine en 1471, s'est vendu 4 s. en

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1472 et 1473 et même 6 s. en 1474; l'avoine qui se payait 2 s. la mine en 1471, est montée, en 1474, à 4 s. 4 d. Et des taxes nouvelles et extraordinaires, telles la taille pour les fortifications et les droits sur les vins, s'ajoutent à de multiples procès, à de grands frais de procédure, sans omettre la perte que donne une foule de monnaies étrangères dépréciées (anglaises, flamandes et bourguignonnes), que l'Hôpital convertit en monnaie royale afin de payer les impôts, les employés ou les agents du fisc. Et ce roi, Louis XI, venu deux fois à Beauvais après le siège, n'a pas laissé la moindre aumône aux religieux qui avaient tant souffert pour sa cause. Ajoutons que seule la récolte des vins n'a pas été sensiblement diminuée; le vignoble qui s'étageait sur le coteau nord de la ville paraît avoir été respecté : il semble que les vignes, avec leurs ceps et leurs échalats, opposèrent çà et là une sorte de palissade aux approches et à la pénétration de l'ennemi.

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LA CHEVAUCHÉE D'ÉDOUARD III

à travers le Beauvaisis

du Jeudi 17 au Samedi 19 Août 1346

MANUSCRITS

1o Histoire de l'abbaye royale de Saint-Lucien, près Beauvais, par D. Placide Porcheron, Bellovaci, anno 1681, à la Bibl. nationale, Saint-Germain-des-Prés, fonds français,

no 1871, p. 105-106, ch. 38. Ce manuscrit a été utilisé par MM. Deladreue et Mathon dans leur << Histoire de l'abbaye de Saint-Lucien », 1874 (tirage à part).

2o God. Hermant. Histoire Ecclésiastique et Civile de la Ville et Diocèse de Beauvais, 5 vol. in-fo à la Bibl nat., mss fr. nos 8579 à 8583, p. 954-955 et passim.

3o Obituaire de l'abbaye de Saint-Quentin de Beauvais, copie de G. Hermant dans la collection de M. le marquis de Luppé, au château de Beaurepaire (Oise).

4o Conservation Bucquet-Auxcousteaux, vol. 31, p. 316; vol. 43, p. 603, 604, 606, 607 et 608; vol. 19, p. 70 et passim, (à l'Hôtel-de-Ville, à Beauvais).

5o Répertoire ou Sommier des Titres du chapitre de Gerberoy, vol. II, fo 83, aux Archives Départementales de l'Oise. 6o Cartulaire de l'Hôtel-Dieu de Beauvais, copie Robert de Gynès de 1677, fo 209, vo.

70 Notes diverses d'Etienne de Nully dans « Mélanges-Troussures », aujourd'hui Collection de M. le docteur Leblond.

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