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champs, prés, pâturages, bois, eaux et courants d'eaux, entrées et sorties, chemins et sentiers'.

Les terres connues de nos jours sous les noms de Grave ou Grava, à quelque distance d'Yverdon, ne portent aucune trace d'anciennes habitations et les trois qui s'y trouvent éparses sont de date très-récente; mais les archives de la ville nous apprennent d'une manière certaine qu'autrefois on comprenait également sous cette dénomination tout l'espace renfermé entre le Maréchat de la Plaine, la propriété de M. Roguin et les Valentins. Il nous paraît donc hors de doute que cette chapelle de Grava donnée en propriété à Vodelgise devait se trouver

1 Page 132: « Concessimus... Gravato et Grava, capellam unam >> et Mansos VI. ad unum quemque mansum jujera sexaginta, et >> com omnibus ad eamdem Capellam et ad eosdem mansos jure » aspicientibus, edificiis, Mancipiis utriusque sexus terris, agris, » vineis, campis, pratis, pascuis, silvis, aquis, aquarum decursi» bus, exitibus et regressibus, viis et inviis. >>

2 Nous pourrions le prouver par de nombreuses citations, mais nous nous contenterons de la suivante qui nous semble devoir décider péremptoirement ce point important; nous l'extrayons d'une grosse de reconnaissances déposée aux archives de la ville. « Reco» gnitio Francisci de Curia alias Denysat de Chavornex, » 1498, mai, page 152... « Videlicet quamdam peciam prati sitam in grava << retro et ultra ecclesiam beatae Mariae Virginis, juxta pratum Io>> hanetae uxoris Iohannis de Rupto alias Pomeret quod fuit Ia» quetae filiae quondam Iohannis Buschillod ex occidente, pra» tum Petri Iohannis et Iaqueti Vuillermin alias de Sauges dicti » de Clendier quod fuit heredum Iohannis Pillicierii ex oriente; » pratum Vuillermi et Petri Ioccet quod fuit Humberti Porchet, » terrale aquae balneorum intersito ex borea; et pratum Iacobi >> Corderii ex vento et est sciendum quod a parte venti cursus aquae » vocale Boyron habet transitum suum perdictum pratum. »

près de l'ermitage, là où s'éleva plus tard l'église paroissiale d'Yverdon. Aucun document ne mentionne, à la vérité, le nom de celui ou de ceux qui l'érigèrent, ni l'époque de sa construction, mais elle devait immanquablement exister avant 886, puisqu'elle se trouvait déjà en possession dans ce temps de diverses propriétés qu'elle tenait sans doute de la munificence des souverains du pays ou de la piété des fidèles qui la fréquentaient.

Vodelgise ne conserva pas longtemps les biens qu'il devait à la générosité de l'empereur Charles-le-Gros. L'an 1 du règne de Rodolphe I, roi de la Bourgogne-Transjurane (888), ce personnage se rendit auprès de Hieronimus, évêque de Lausanne, qui se trouvait à Champagne et là, conformément aux idées erronées d'un christianisme déjà altéré, pour assurer son salut, celui de sa femme, de ses filles, aussi bien que celui de l'empereur Charles et du roi Rodolphe, il se dépouilla volontairement de ce qu'il avait reçu en faveur de l'église de Notre-Dame de Lausanne1. C'est ainsi que la chapelle de Grava et une partie du territoire d'Yverdon passèrent au pouvoir des évêques de Lausanne, et que ceux-ci acquirent là des droits qu'ils cédèrent plus tard en partie et à prix d'argent à certains seigneurs temporels, à la communauté d'Yverdon et à quelques congrégations religieuses. A cette époque le cimetière ne se trouvait point encore réuni à la chapelle; l'ancien cimetière, ainsi qu'il est désigné dans les archives de la ville par opposition au cimetière actuel, occupait une partie de l'emplacement, connu de nos jours sous le nom de pré de la cure, et c'est dans les diverses couches

1 Cartulaire du chapitre de Notre-Dame, pages 133 et 134.

de ce terrain qui a été fouillé par les manœuvres employés au chemin de fer, qu'on a découvert des tombes et des antiquités de différents âges, dont les plus récentes remontent au règne de Conrad-le-Salique. C'est sans doute dans ce vieux cimetière que l'on déposait aussi les cadavres de ceux qui succombaient à leurs maux dans un ancien hôpital qui se trouvait à la Plaine1.

La population de la ville continuant à augmenter, la chapelle de Grava ne suffit plus aux exigences du culte et il fallut bientôt la remplacer par un autre édifice plus spacieux. Des documents très-nombreux tirés des archives d'Yverdon, nous indiquent d'une manière précise le lieu où fut construite cette nouvelle église dont il ne reste maintenant aucun vestige2. Dans ces temps de désolation

1 Il est désigné dans les registres du conseil sous le nom du vieil hôpital. Il occupait vraisemblablement le lieu connu sous le nom de Clos Baussan, où l'on a retrouvé au seizième siècle les fondements d'anciennes murailles. Registre du conseil, janvier 1590.

2 Les extraits des archives de Lausanne et d'Yverdon, que nous allons rapporter, nous paraissent ne devoir laisser aucun doute sur le véritable emplacement de cette première église paroissiale d'Yverdon dont la situation exacte a donné souvent matière à controverse. Dans la layette 169 des archives cantonales (inventaire des titres, parchemins et papiers concernant le bailliage d'Yverdon) se trouvent déposés les « titres du Prieuré de Lutry pour un vivier de pois» sons, proche la vieille Thielle devant l'église paroissiale de Notre» Dame d'Yverdon. » Un de ces parchemins, de l'année 1368, désigne de la manière suivante la situation du vivier et, par conséquent, celle de l'église de Notre-Dame : « Unam piscinam prope de>> componens versus veterem thelam seu aqua veteris Thelae, in » quodam arali versus ecclesiam Mariae Virginis prochialem villae » Yverduni extra cursum dictae aquae Thelae...» Or une grosse de 1499 nous apprend que ce vivier, appartenant alors à noble Jean

où le pays avait sans cesse à redouter de nouvelles invasions de barbares, on devait nécessairement rechercher

Donat de Vuillerens, se trouvait près de la vieille Thiele et des Chaî

nettes.

Comptes de ville.« 1459... qua die portaverunt lapides a portu >> telae versus Dominam Nostram ante portale factum per Petrum >> Micey in introitu Cumisterii. » « 1486. Libravit dicto Guillielmo >> et Ludovico Raclet die Mercurii qua die fecerunt repositum plan>> chiam fossalis retro Dominam nostram quam aquae induxerant. >> « Id. Pro duabus cormez alias fretis positis super tectum domus » reclusi..... predicto tectu reclusagii ductis a thioleria ad dictum >> heremum. »

Registres du conseil. - -1543. Vendredi 24 septembre. Le gou» verneur a mys en advant comme la couverture de l'Esglise an» cienne appelée Grande Madame est plusieurs lieux bien caduque >> tellement que par le temps de pluie il consume l'édifice et mesme » sur la chapelle nommée la chapelle des thestes et d'autres; à » quoy a esté advisé de maintenir l'église et ramurer icelle susdite » et semblablement l'ermitage affin que se survenoit quelque danger de peste pour retirer les infantz et aussy de parler es prestres >> qui tiennent le revenu desdites chapelles pour debvoir maintenir » c'est qui leur appartiendra desdites chapelles.» «< 7 Juin 1588. » A esté ordonné que l'on debvra fayre reffaire le toict du portail » (du cimetière) de notre Dame et faire coupper certaines bran>>ches de noyer qui sont cause le faire pourrir. » « 4 Juillet 1594. » A esté ordonné que le gouverneur doibve dire à l'amyable à ho>> norable De Douton qu'il aye a desclore une certaine closture et » haye qu'il a faicte en ung morsel de pré vers notre Dame liant es >> chenettes d'autant que par cy devant l'on n'a heu accoutumé de >> le clore ains a ladite place tousiours fut de chemin publicq. >> << 11 Juillet 1593. A esté ordonné que l'hospitalier fasse recouvrir >> et raccoustrer la chapelle du cimetière (la chapelle des têtes) de >> cest lieu comme aussi les murailles du cimetière qu'il soit cy » apres bien fermé. » « 27 Février 1596. A esté ordonné que le » gouverneur fasse planter des paulx en chesne a la charriere vers

de préférence les lieux les plus sûrs et le mieux fortifiés pour y abriter les établissements religieux. Une partie des murailles de l'ancien Castrum étaient encore debout et pouvaient offrir dans l'occasion les moyens de résister aux attaques d'ennemis acharnés. Ce fut sans doute cette considération qui fit choisir cet emplacement pour y élever, sur les fondements de la chapelle démolie et en face de l'ermitage, l'église qui fut dès lors connue sous le nom d'église de la bienheureuse Vierge Marie. On déblaya les alentours du nouvel édifice, et ce terrain dans lequel on n'a pas cessé de recueillir jusqu'à nos jours d'antiques débris, fut converti en un cimetière qui remplaça l'ancien et qui fut désormais connu sous le nom de cimetière de l'église de Notre-Dame.

Il est impossible de déterminer la date précise de l'érection de cette église qui devint le temple paroissial d'Yverdon. Elle existait évidemment avant la fondation de la ville actuelle, fondation dont on peut fixer l'époque dans le courant du douzième siècle, car on ne l'aurait certainement pas construite dans un lieu aussi éloigné des

» notre Dame l'endroit contre le pré de gravaz a ce que les chars » n'y puissent passer plus outre. » « 21 Juin 1604. Sur la requeste » qu'auroit esté faite de la part d'Andréaz Bachiez, ordonné de luy >> accorder ung petit carré qu'elle desire sur la charriere du Buron » vers son cloz de Notre Dame. » « 3 Août 1720. A la requeste de >> M. Gaspard Martin, architecte, bourgeois de ce lieu, on lui ac» corde de pouvoir démolir la chapelle du cimetière où on jette » les os qui se trouvent en faisant les fosses et d'en ramasser et >> emmener les pierres de même que les autres qui se trouvent dans >> l'enceinte du cimetière pour s'en servir à son propre usage à >> condition qu'il fasse une fosse où il fera jetter tous les os qui s'y

» trouvent. >>

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