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la place où l'on avait établi le vieux pressoir'. L'administration de cet hôpital paraît avoir appartenu d'abord au clergé, car, à dater de 1388, jusqu'au milieu du quinzième siècle, les comptes ne mentionnent que des prêtres comme recteurs de cet établissement de charité. Des laïcs, connus sous le nom d'hôpitaliers et nommés par le conseil de ville, obtinrent ensuite cette gestion.

L'hôpital, à son origine, était peu considérable; il ne consistait guère alors qu'en un bâtiment de médiocre grandeur, qui renfermait une chapelle surmontée d'un clocher 2 et dédiée à la Vierge Marie, dont on peut encore reconnaître en partie la forme, malgré les mutilations qu'elle a subies, et quelques chambres réservées aux pèlerins, aux malades et aux pauvres de la ville. Ce vieil hospice qui porte encore sur sa façade l'écusson de la ville et dont trois lettres initiales 3 nous font connaître la destination, ne tarda pas avec l'accroissement de la population à devenir insuffisant, et il fallut élever de nouvelles constructions. Les dons et les legs faits à l'hôpital d'Yverdon et à sa chapelle permirent en effet de bâtir dans le courant du quatorzième siècle un vaste édifice en face du premier, lequel fut dès lors désigné dans les archives de la ville sous le nom de maison neuve de

1 1388. Hôpital. Computus Dompni Aymonis de Clendiez : » Item libravit anno quo supra clerico domini Comitis de Monte» bellicardo pro censu sibi dicto Comiti debito pro platea veteris >> torquilaris. >>

2 La cloche fut enlevée le 13 octobre 1609.

3 H. D. Y. (hospital de Yverduno).

l'hôpital. Ce nouveau bâtiment reçut une double destination. Non seulement il servit à loger une partie

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des pauvres et des malades de la ville, mais, de plus, une portion du bas de l'édifice fut réservée pour devenir l'arsenal de la cité, et l'une des salles de l'étage supérieur 3 fut consacrée exclusivement aux séances du conseil d'Yverdon. Cette circonstance lui fit donner le nom de maison de ville. Les archives de l'hôpital et celles de la ville, déposées dans un coffre garni de barres de fer et muni de deux serrures 5, continuèrent toutefois à être placées dans le chœur de la chapelle du vieil hôpital. Quelques-uns de ces vieux documents ont échappé aux ravages du temps, et ils sont maintenant conservés avec soin à l'hôtel de ville d'Yverdon, non plus dans un coffre, mais dans une petite chambre à trois portes dont une

1 « 1388. Libravit lathomis qui fecerunt mellos retro domum » novam dicti hospitalis, 28 s. »

2 « 1468. Camera artillerie hospitalis Yverduni. » En 1474 l'arsenal contenait 40 fustes remplies de viretons ou traits d'arbalètes, de la poudre et les pierres des canons.

31483. In stupa superiori domus dicti hospitalis pro negociis » villae et hospitalis dicti loci Yverduni. » « 1502. In stupa domus >> hospitalis Yverduni sitae ante dictum hospital a parte Jurae pro >> negociis ipsius villae. »

41443. Item recepit a relicta Ulrici Marin unam balistam » quam posuit in domo ville cum ceteris rebus ville. >>

5 « 1477. Libravit Iohanni Bonvespis qui fecit duas claves in >> duabus sarruris unius archac existentis in choro hospitalis et » levavit et reposuit duas seras et etiam allocavit sparretas sera» rum in qua nonnullae litterae ville et hospitalis sunt reconditae, » 3 s. »

6 4444 Qui quaesiverunt in archa hospitalis de mandato con» silii papirum canonum et ballistarum. »

en fer, et dans laquelle on ne peut pénétrer qu'avec l'assentiment des autorités municipales, et en réunissant les dépositaires des trois clés. Nous allons communiquer quelques renseignements que nous y avons puisés sur l'hôpital et sur l'ancienne administration de la ville.

Un service religieux était célébré chaque jour, au son de la cloche, dans la chapelle de l'hôpital, et des indulgences étaient promises à ceux qui y assistaient'. Le prêtre qui officiait recevait, en 1388, dix livres par année pour sa messe quotidienne. Certains dons particuliers étaient exclusivement affectés à l'entretien de la lampe, à l'achat des cierges placés autour de l'autel et à la célébration des messes.

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Les pauvres femmes qui résidaient à l'hôpital étaient vêtues d'étoffes grossières et s'occupaient à filer le chanvre avec lequel on faisait confectionner le linge nécessaire à l'établissement, et c'étaient elles qui préparaient ordinairement les miches de pain que la confrérie du Saint-Esprit faisait distribuer aux habitants nécessiteux de la ville. Au dehors, on accordait des remèdes aux malades indigents, des aumônes en nature aux

11418. Pro indulgentiis impetratis et impetrandis concessis >> hospitali Yverduni per dominum nostrum Papam. >>

21388. Panni grossi pro vestiendo pauperes mulieres dicti >> hospitalis. >>

3 « 1485. Libravit Huberto Peclard alias Bayet textori telarum » Yverduni qui fecit pecias tele pro dicto hospitali de filo filato per » mulieres existentes in dicto hospitali, 28 s. »

4 1477. Mulieribus facientibus michas pro dicta confratria, » 7 s. 6 d. »

5 & 1485. Libravit pro certis medecis per ipsum emptis in domo.

pauvres, et l'on prenait soin des femmes en couche, lorsqu'elles se trouvaient dans le besoin'.

Nous avons cherché en vain les noms des premiers fondateurs de l'hôpital d'Yverdon; toutefois, si nos perquisitions sous ce rapport ont été infructueuses, nous pouvons citer quelques personnages qui ont été les bienfaiteurs de cet établissement dans la seconde période du moyen âge.

Au nombre de ces généreux donateurs se trouve, en premier lieu, le comte Louis II de Savoie qui légua à l'hospice une rente de 26 sols 2. Anthonie, fille du seigneur Louis de Bière, chevalier, et femme de noble Jean de Neuchâtel, seigneur de Vaumarcus 3, lui fit également un legs de quatre muids de blé qui, transformés en miches, devaient être distribués aux pauvres chaque année en son nom, à la fête de St. Jean-Baptiste. Vuillerme de Baulmes, seigneur du dit lieu et d'Essert-Pittet, lui laissa 80 livres de revenus assignées sur ses terres. Henri Currat, fondateur de la chapelle de St. Michel, lui fit don d'une vigne à Fiez-Pittet. Prissona, fille de Johannod Simonet, fondateur des chapelles de Marie-Madelaine et de St. Barthélemi lui légua 12 livres; Prod Challiod, 60 livres, dont la rente devait être distribuée

» Johis Robin quam in domo Johis Pontet pro medendo prisso>> nam dictam Ballanchy, 4 s. 3 d. »

« 4388. Libravit relictae Roleti Morel de plana pro ipsam rele» vando quod tunc jacebat in puerperio. »

2 Comptes de 1460.

3 Reconnaissance de l'hôpital, Grosse C, 13 mai 1349, page 300. 4 1513.

5 1430.

6 1513.

chaque année à vingt-un pauvres à la fête de la conception de la Vierge Marie. Octhonette Lambert, fille de Vuillerme Lambert, donzel de Champvent, et veuve de noble Jacques Mestral, ancien bourgeois d'Yverdon, lui laissa par son testament, daté du 3 février 1511, et instrumenté par Henri Auberjonois, les fonds nécessaires, pour que l'on donnât chaque année et perpétuellement à dîner à treize pauvres auxquels on devait laver les pieds en souvenir de la passion de notre Seigneur Jésus-Christ, et à chacun desquels on devait distribuer un quart de sol lausannois 1; etc., etc.

L'hôpital, devenu avec le temps possesseur de forêts, de champs, de vignes et de jardins, fut obligé d'affermer une partie de ses domaines et de faire cultiver ses terres. Comme on lui payait le plus souvent les cens en nature, il se vit dans la nécessité d'ajouter de vastes dépendances, écuries, granges, greniers, caves, pressoirs, huilerie, etc., à la nouvelle maison qu'il avait fait construire. L'hôpitalier faisait sa résidence dans cette dernière demeure; il était chargé de surveiller les travaux, d'acheter ou de vendre le bétail nécessaire à l'exploitation des terres, en un mot, de toute l'administration intérieure et extérieure du grand établissement confié à ses soins. Il devait, chaque année, rendre compte de sa gestion au conseil d'Yverdon qui, ne possédant point encore d'hôtel de ville proprement dit, tenait ses séances, ainsi que nous l'avons dit, à l'étage supérieur de la nouvelle maison. Nous ne quitterons pas cet édifice, sans dire quelques mots de cet ancien corps municipal qui, dès les

Reconnaissance de l'hôpital, Grosse C, page 166.

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