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conduit à la maison de M. Buttin. Cette rue n'était pas couverte comme les autres, et dans les comptes de la ville, elle portait le nom de tournelle, de même qu'une rotonde ou guérite en pierre, garnie de meurtrières, que l'on voyait sur la muraille qui sert de clôture au jardin de la seconde cure.

La seconde entrée de la ville, ou porte de la rue du lac, porte de derrière le lac, porte du Port, car les archives lui donnent ces différentes dénominations, était également surmontée d'une tour et se trouvait vis-à-vis, mais à quelque distance, du pont-levis de Gleyre.

Derrière l'ancien collége, en dehors de la muraille qui, depuis la porte de Gleyre, s'avançait jusqu'à la porte des boucheries, on avait élevé en 1474 un boulevard, espèce de tour demi-circulaire, destinée à défendre le pont et l'abord de la ville. Construit primitivement en madriers de chêne 1, sur le modèle d'un boulevard ou rempart qui existait à Grandson, il fut remplacé plus tard par de la maçonnerie. La partie inférieure de ce petit fort, autrefois muni de canons, fait saillie sur la rivière et forme une jolie terrasse qui est une dépendance de la maison de M. Pavid, commissionnaire. On voit encore derrière les maisons de la rue du collége quelques restes du mur crénelé qui longeait la rivière des moulins.

Tout le faubourg de l'hôpital était entouré d'une forte muraille flanquée de tours maintenant démolies ; les

1 << 1474. In belluardo de Glery facto de quercubus.» « Libravit >> Visincio Iuhan qui fuit missus per consilium apud Grandissonum » pro visitando belluardum dicti loci Grandissoni pro faciendo » illum de Glery quem facere volebat in tachium. »>

2 << 4 mars 1713. Proposé qu'on devait démolir la tour qui est derrière la grange de l'hôpital. »

murs dont on aperçoit encore quelques restes ont été construits au seizième siècle. On entrait dans cette espèce de citadelle par trois portes: 1o La porte de Cheminet en face du pont-levis de ce nom; 20 la porte des moulins dont un fragment que l'on peut encore apercevoir, atteste la solidité de sa construction. Elle était défendue par un boulevard ou rempart, percé de meurtrières, qui est encore debout et qui fut achevé en 1513 1. Cette porte ne fut établie qu'à la fin du quinzième siècle; avant cette époque, l'entrée du faubourg était défendue par une forte palissade et la porte qu'on y avait enchassée, était formée de grosses pièces de bois dur, croisées de bandes de fer 2; 3o la porte des boucheries située du côté de la ville, et près du pont dit Bachiez. Elle mettait en communication le faubourg de l'hôpital avec la cité; mais, de nuit, la herse dont elle était munie était abaissée et l'on hissait le pont-levis 3.

Les murailles qui, à partir de la porte des boucheries, s'étendaient derrière la rue du Four pour se relier au

1 « 1543. Guillermo Poncet pro sua domo in qua villa Yverduni » fecit fieri unum belluardum in borgellis molendinorum. »

2 « 1473. Libravit die Jovis post festum sancti Dionisii Jacobo » Pernin, sarralario Yverduni pro una clave per ipsum facta por» tae pontis ville existentis versus molendina Yverduni. »

3 La municipalité vient de faire démolir cette porte construite en 1561 par les Bernois sur les ruines d'une plus ancienne. Elle a décidé toutefois de conserver comme souvenir la vieille horloge, la cloche et la pierre sur laquelle est gravée cette inscription tirée du livre des Proverbes (Chap. XVIII, v. 10):

Est sanctum Domini nomen fortissima turris
Confugiens ad eam tutus inermis erit.

château, n'étaient pas aussi élevées, ni aussi fortes que celles que nous venons de mentionner. Cependant elles étaient munies à chacune de leurs extrémités de deux boulevards, et le centre était occupé par une tourelle garnie de meurtrières 2. Un petit bras de la Thièle, ainsi que nous l'avons rapporté plus haut, baignait le pied de ces murailles. Plus tard, les Bernois remédièrent à la faiblesse comparative de cette partie de l'enceinte de la ville, en élevant, au dix-septième siècle, un boulevard ou rempart en terre d'une grande hauteur qui occupait toute l'étendue des Jordils 3. Pour terminer cet article, nous ajouterons que, primitivement, on montait sur les murailles au moyen d'échelles que l'on dressait dans un chemin de ronde que l'on avait pratiqué au bas du mur d'enceinte du côté de la rue du Lac; mais ce moyen étant incommode et dangereux, l'on établit par la suite, près du château et du boulevard de Gleyre, des degrés en pierre qui permettaient aux sentinelles et aux défenseurs de la cité de se rendre plus facilement aux postes qui leur étaient assignés. Les deux rivières étaient fermées, près de la ville, par des palissades garnies de chaînes de fer et munies de portes que les comptes de ville désignent sous le nom de tournafods'.

1 Derrière la maison de M. l'avocat Jayet et derrière l'ancienne maison de ville (la maison du pensionnat Ranck).

2 Derrière la maison de la petite école.

3 On peut en voir un reste dans le jardin de M. de Guimps. 4 « 1459. Libravit Vulliermo Galey qui adduxit octo concissas » quercus a nemore de Espiney apud Yverdunum plantando eis >> tornafo telarum Yverduni versus castrum et retro domum Iohan»nis Porterii et fuit sibi datum in tachium per consilium in domo >> Petri Jocet, 32 s. »

Nous avons achevé notre description des anciennes dépendances de la ville et nous avons fait connaître ses moyens de défense: entrons maintenant dans cette petite cité dont un historien du seizième siècle dépeint l'aspect dans les termes naïfs suivants : « La première et la prin>> cipale forteresse que le duc de Savoye eust deça les >> monts, c'estoit la ville d'Yverdon situee au bout d'ung » lac, au pres de Grançon, forte et plaisante petite ville, » toute ronde, n'ayant que deux grandes portes, avec » ung grand et fort chasteau; la ville et le chasteau envyronnés de grandes eaues, car d'ung cousté est le lac » et de l'aultre de grandz marecages de deux lieues de >> lonc, la riviere qu'on appelle la Teyle passe au de» dans; et la peulvent mettre à leur playzir tout à l'en >> tour1.

XIII. Le Faubourg des Moulins, le Faubourg de Cheminet, l'Hôpital et la Chapelle des pauvres de la bienheureuse Vierge Marie, la maison de Ville et la maison de Bionnens.

Nous avons signalé le faubourg de l'hôpital comme la partie la plus ancienne de la ville actuelle; ce sera aussi de ce quartier que nous nous occuperons en premier lieu.

Au moyen âge, cette localité ne portait pas le nom sous

Les actes et gestes merveilleux de la cité de Genève, etc. par Antoine Fromment. Mis en lumière par Gustave Revilliod. A Genève, imprimé par Jules Guillaume Fick, 1854, page 220.

lequel elle est connue de nos jours. Elle renfermait deux rues distinctes, séparées par celle qui s'avance de la porte des boucheries vers l'hôpital neuf. Les maisons qui, à partir de l'habitation Pavid, se dirigent vers le pont qui conduit aux usines d'Yverdon, formaient le faubourg des Moulins'; celles qui, à main droite, occupaient tout l'emplacement où ont été élevés plus tard, sous les Bernois, les grands magasins de l'Etat, étaient désignées sous le nom de faubourg de Cheminet ou de Gleyre. Ces deux petits faubourgs possédaient et possèdent encore quelques anciens édifices sur lesquels nous communiquerons à nos lecteurs les renseignements que nous avons puisés dans les archives d'Yverdon; et d'abord l'hôpital.

L'hôpital actuel d'Yverdon, désigné dans les comptes de ville sous le nom de l'Hôpital des pauvres de la bienheureuse Vierge Marie 3, était, sans doute, primitivement destiné à recevoir et à loger les pèlerins pauvres ou malades qui traversaient Yverdon en passant sur le plus ancien pont de la ville, le pont de Cheminet. Quoique aucun document ne nous fasse connaître la date précise de sa création, il est à présumer qu'il fut fondé au temps des croisades. Ce qui est certain, c'est qu'il existait déjà du temps des sires de Montfaucon, puisque cet hospice devait encore payer en 1388 à leurs successeurs, les comtes de Montbéliard, une rente pour la jouissance de

1 Borgelli molendinorum, gîte de l'année 1424. Primus Borgellus de molendinis, gîte de 1447.

2 Secundus Borgellus (1417), Borgellus de Gleritz (1424), Borgelli de Chemineto (1454).

3 Hospital pauperum beatae Mariae Virginis Yverduni.

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