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tiser1»; bèdi « bailler, donner » ; konpènyi « compagnie » ; fèri

«

[je] ferai »; malèdi « maladie »; mèfi « fatigué »; unpèts « empêché »; rèmīra « ramure »; travèdī « travailler »; tsèdi «< chaloir »; chèdi « saillir, sortir ». On voit que la règle y est maintenue plus pure, mais M. Cornu nous avertit que << nur alte Weiber, welche auch desswegen von den jungen Leuten verspottet werden, lassen diese Annäherung der Laute häufig hören ». Il s'agit du patois de Cuves. M. Cornu a même recueilli des cas d'apophonie où l'action d'i s'étend à deux syllabes précédentes: mèlèdi, trèvèdī.

Quelques rares formes apophoniques se sont répandues au delà de leur domaine premier : on voit apparaître krètsī « cracher », à Blonay ; rèvi ou rɔvi « proverbe », se dit dans tout le canton de Vaud, mais Juste Olivier atteste que c'est un mot qui provient des Alpes vaudoises.

Notre petite loi phonétique rend compte des anomalies apparentes de certains vocables, qui, dans Bridel, ne figurent que sous des formes altérées; ainsi le rapport d'ennesi « jeune porc d'un an», avec annus devient clair, et béthi « diguer », apparaît comme simple variante du verbe bâtir.

L. GAUCHAT.

1 C'est à tort que j'ai considéré comme suspecte cette forme dans ma Trilogie da la vie (Bulletin IX, p. 16).

RITOURNELLE PATOISE

SUR LES NOMS DES JOURS DE LA SEMAINE

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Le refrain populaire patois ci-dessous nous a été communiqué en 1904 par un correspondant du Glossaire, M. R. Chassot, qui l'avait noté à Villargiroud, dans le district fribourgeois de la Glâne:

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Lé rakontra Marianna dǝmikrou, J'ai rencontré Marianne mercredi,

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Lé rakontra Marian-na dəvindrou, J'ai rencontré Marianne vendredi, Ka pòrtavè a vandr on chindzou. Qui portait à vendre un singe. Vendredi, un singe, etc.

Devindrou, on chindzou, etc.

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Lérakontra Marianna dǝmindza,

6.

J'ai rencontré Marianne samedi,
Qui portait à vendre du lard.

Samedi, du lard, etc.

7.

J'ai rencontré Marianne dimanche,

Ka portave a vandra din frindzè Qui portait à vendre des franges.

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Cette petite composition appartient à un genre bien connu dans la littérature populaire orale, celui des énumérations en série progressive, à laquelle une formule constante quelconque sert chaque fois d'introduction. Ici ce sont les noms des jours de la semaine, accouplés chacun à un autre mot formant assonance, qui constituent la kyrielle croissante. Nous ne saurions dire, faute de moyens d'information suffisants, si cette ritournelle a été signalée ailleurs qu'en Suisse. Ce qui est certain, c'est qu'elle n'a pas pu être empruntée au français ni se répandre par son intermédiaire, puisque la terminaison uniforme du français lundi, mardi, etc., détruirait la base même de l'agencement de notre texte patois. Son origine doit être cherchée dans la partie du domaine gallo-roman qui a adopté le type de formation dies lunae au lieu de lunae dies pour les jours de la semaine. On sait qu'en Suisse romande les patois du Jura bernois sont seuls d'accord à cet égard avec le français. Partout ailleurs on a dǝlon, dǝmar, etc.

La chanson sur les jours de la semaine paraît particulièrement répandue dans le canton de Fribourg. M. J. Reichlen l'a publiée

avec la mélodie dans ses Chants et coraules de la Gruyère, p. 72-73, et un ancien correspondant du Glossaire, M. le Dr Nicolet, l'a aussi recueillie à Farvagny. Abstraction faite des particularités de dialecte, ces deux textes diffèrent fort peu de celui de Villargiroud. Ils s'accordent à donner pour assonance à dəmi̟krou, dou trịdzou « du triège », au lieu de on krəvīyou, et la variante gruyérienne a pour refrain Tinka Madǝlon « Voilà M. », qui sert aussi de titre. Mais à côté de la version fribourgeoise, le hasard des recherches nous a fait connaître deux autres rédactions patoises, qui attestent que cette chanson n'a pas seulement un caractère local et qu'elle est ancienne dans le pays.

Nous tenons de M. le Dr H. Stauffer, à Neuchâtel, une variante neuchâteloise que sa mère aimait encore à répéter, et qui, paraît-il, faisait la joie des veillées de fileuses aux Verrières vers 1840. Le texte est très voisin de celui de Villargiroud; quant au patois tel qu'il nous a été prononcé, il est passablement francisé.

I.

Dlon i rankontrāv ma mi,

Ki portiv vindr d l'ònyon,

Dlon d l'ònyon.

1.

Lundi je rencontrais ma mie
Qui portait vendre de l'ognon.
Lundi de l'ognon.

Atsī vò2, ma mī, jukank3 a dəman! Adieu, ma mie, jusqu'à demain !

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1 Forme inexacte pour portāv, par confusion avec les imparfaits des verbes

en i.

2 Formule de salutation, contractée de A Dieu soyez-vous !

3 Contamination de jusqu'à et tant qu'à, qui avait le même sens.

Dmindz dé mindz,

Dsand' dé sandr1,

Dvindr dé dind,

Djœ dé-j-œ,

Dmekr kouvěky,

Dmoué du byé,

Dlon d l'ònyon.

Dimanche des manches,

Samedi des cendres,

Vendredi des dindes,

Jeudi des œufs,
Mercredi couvercle,
Mardi du blé,

Lundi de l'ognon.

Atsī vò, ma mī, jukank' a dəman! Adieu, ma mie, jusqu'à demain !

La version valaisanne que nous a transmise M. Maurice Gabbud, à Lourtier, a été recueillie par lui à Verbier (Bagnes), où elle est courante. Le texte est altéré, des formes étrangères au patois local trahissent l'importation et la plupart des mots en rime n'ont plus aucune signification. Mais le sens joue un rôle si secondaire dans les productions de ce genre que sa disparition ne nuit pas au succès. On se contente du cliquetis des assonances. On y prend même tant de plaisir que le jeu a paru trop court et qu'on l'a prolongé par l'addition de nouveaux couplets sur les mots « semaine », « mois », « an» et « siècle ». A remarquer aussi que la première syllabe de dǝlon, dɔmā, etc., disparaît dans le refrain.

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1 Forme française amenée par la rime.

2 Surnom donné aux libéraux dans les luttes politiques du Valais et qui

signifie proprement accrocheur.

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