PROLOGUE. Le théâtre représente le mont Parnasse; Apollon y paroît sur son trône, et les Muses sont assises autour de lui. SCÈNE I. APOLLON ET LES MUSES. Naissez, divins esprits, naissez, fameux héros; APOLLON. Muses, filles du ciel, que votre gloire est pure! Les plus beaux dons de la nature Sont moins brillants que ceux qu'on tient de vous. Sur ce paisible mont, loin du bruit et des armes, Des innocents plaisirs vous goûtez les douceurs. La fière ambition, l'amour ni ses faux charmes, Ne troublent point vos cœurs. LES MUSES. Non, non, l'amour ni ses faux charmes (On entend une symphonie brillante et douce alternativement.) SCÈNE II. La Gloire et l'Amour descendent du même char. APOLLON, LES MUSES, L'AMOUR, APOLLON. Que vois-je? ô ciel! dois-je le croire? LA GLOIRE. Quelle triste erreur vous séduit! Voyez ce dieu charmant, soutien de mon empire: Il faut lui céder la victoire Quand on veut briller à ma cour: APOLLON. Quoi! mes divins lauriers d'un enfant téméraire L'AMOUR. Tu méprises l'Amour, éprouve sa colère. Va former d'inutiles vœux. Qu'un exemple éclatant montre aux cœurs amoureux APOLLON. Ciel! quel objet charmant se retrace à mon ame! Quelle soudaine flamme Il inspire à mes sens! C'est ton pouvoir, Amour, que je ressens: Je te rendrois heureux! je prétends te punir. APOLLON. Quoi! toujours soupirer sans pouvoir la fléchir! L'AMOUR. C'est la vengeance de l'Amour. LES MUSES. Fuyons un tyran perfide, LA GLOIRE. Pourquoi cet effroi timide? (Il s'en va.) Ah! qu'il est doux, qu'il est charmant de plaire! C'est l'art le plus nécessaire. Ah! qu'il est doux, qu'il est flatteur De savoir parler au cœur! (Les Muses, persuadées par l'Amour, répètent ces quatre vers.) L'AMOUR. Accourez, Jeux et Ris, doux séducteurs des belles; Vous par qui tout cède à l'Amour, Confirmez mon triomphe, et parez ce séjour |