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avec la douceur, animer et ménager tout à la fois leur faiblesse, les humilier sans les décourager, être irrépréhensible pour les reprendre utilement...

Les Sœurs ne se lient point par des vœux, mais la charité de Jésus-Christ qui les presse, les doit attacher à leur état par des liens si doux et si forts, qu'elles n'ayent point besoin d'autre engagement pour remplir leurs devoirs.

... Outre l'esprit et les mœurs on examinera leur humeur. Un naturel trop austère ou trop doux, inquiet ou indolent, haut ou pusillanime ne serait nullement propre pour la conduite de tant de filles dont l'esprit, l'humeur et les dispositions si différentes demandent qu'on allie la compassion avec la fermeté, la tranquillité avec la vigilance, l'humilité avec le courage.

Il n'y aura nulle distinction entre les Sœurs et les Filles, ni pour le logement ni pour la nourriture, ni pour la forme de l'habillement, excepté la coëffe de taffetas que les Sœurs portent selon l'usage établi par l'institution.

Une Sœur ne sera point admise dans la Communauté qu'elle n'ait été agréée par le Supérieur, la Supérieure et quatre discrettes; afin que le choix volontaire qu'elles en auront fait, contribue à maintenir entre elles l'union et la paix.

Comme on le verra par les noms des Supérieures qui se succédèrent, ce fut surtout dans la bourgeoisie que se recrutèrent les Sœurs du Bon Pasteur, et il faut reconnaître que si l'œuvre entreprise par Me de Combé était admirable, on ne saurait trop s'incliner devant la vertu des saintes femmes qui eurent le courage d'en poursuivre la réalisation.

En 1700, on comptait trente religieuses affectées ainsi à la Maison du Bon Pasteur, et les locaux étaient de nouveau insuffisants pour le grand nombre de malheureuses filles qui demandaient à s'y retirer, quoique trois autres communautés existassent alors dans Paris à l'imi

tation du Bon Pasteur, et avec le même but charitable(1). La charité privée vint encore au secours de la Communauté du Bon Pasteur qui, par contrat du 14 janvier 1713 passé devant Richard, notaire, put acheter la maison attenant à celle acquise en 1697, — c'était la propriété du sieur François Rolin de Préval, dit aussi Rolin-Priou, successeur et probablement gendre du chirurgien Priou qui la possédait antérieurement.

Enfin nous savons déjà que le 3 août 1713, l'abbé Traullé fit donation à la Communauté de la maison du futur no 36 contigue à l'église du couvent, ce qui permit aux Religieuses de s'agrandir, et surtout leur procura un revenu précieux.

Le 27 septembre 1727, une déclaration régulière de propriété fut faite par Sœur Marguerite-Jeanne Girardin, Supérieure, qui avait succédé à la Soeur Lapostolle, assistée de Sœur Marie-Madeleine Derains, Sœur Françoise Dufour sacristaine, et Soeur Jeanne-Thérèse Creuset. Les déclarantes y donnaient l'indication détaillée des quatre immeubles successivement acquis par la Communauté depuis son origine en 1689, 1697 et 1713 (2).

Le lieutenant général de police surveillait et contrôlait l'administration de tous les asiles de filles repenties, et proclamait hautement l'excellente tenue de la Maison du Bon Pasteur. Aussi, par un arrêt du Conseil du 14 avril 1750, il fut fait attribution spéciale à cette Communauté du tiers des lots non réclamés de la grande loterie des Communautés religieuses, ce qui équivalait à une pension de 3.000 livres environ, et atteignit plus tard, en 1785, jusqu'à 5.891 livres.

(1) Bibl. de l'Arsenal. Archives de la Bastille, 10.182.
(2) Arch. nat. S. 2848. Déclaration du 27 septembre 1727.

Un petit incident de police de 1749 prouve que le Bon Pasteur était aussi vénéré du peuple. Le 20 décembre, vers huit heures du matin, un jeune garçon nommé Binet, serviteur du couvent, était occupé à balayer le devant de la porte, lorsqu'il vit quatre exempts, chargés d'arrêter les mendiants, se saisir un peu brutalement d'une vieille femme et la pousser vers le carrosse de police qui les suivait. Binet murmura peut-être quelques mots que les exempts prirent pour une injure, car, lâchant la vieille mendiante, ils se jetèrent sur lui, et, malgré ses protestations d'innocence, le souffletèrent et le tirèrent par les cheveux en l'entraînant vers leur carrosse. Trois témoins de la scène, un marchand grainier se trouvant sur le seuil de la boutique, un maître serrurier du voisinage, et le cocher de Mme de Béringhen, eurent beau attester que le pauvre garçon n'avait proféré aucune injure et qu'ils le connaissaient pour être toujours d'une douceur exemplaire, les exempts ne voulurent rien entendre. La sœur tourière, accourue au bruit, implora aussi vainement en faveur de Binet. Les exempts furent inflexibles et se mirent en marche escortant le carrosse contenant leur prisonnier. Mais alors ce fut une émeute dans tout le quartier; les quatre exempts, « poursuivis, dirent-ils, par une grande populace qui les injuriait », arrivèrent à grand' peine à la Croix-Rouge où ils trouvèrent du renfort (1).

Les Religieuses du Bon Pasteur étaient non moins aimées des grandes familles du faubourg Saint-Germain, dont plusieurs avaient des tribunes dans l'église du couvent. La princesse de Croy, dont l'hôtel était rue du Regard (no 5 actuel), exprima dans son testament le

(1) Arch. nat. Y. 10.763. Papiers du commissaire Leblanc.

Sté Hue DU VI.

1912.

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