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propre autorité, s'érigeant en juge d'appel de son lieutenant. Le bailli donne tort au prévôt, rétablit la sentence, mais en revanche défend au lieutenant de rendre la justice, comme il le fait, dans sa propre maison. C'est que la salle d'audience est en si piteux état qu'on ne peut plus s'y tenir quand il pleut. Le bailli promet d'en référer aux religieux de Saint-Germain, et d'obtenir d'eux des réparations à l'auditoire, au greffe et aux prisons de Suresne.

En 1719, le bailli Pélet décide de tenir des assises dans plusieurs justices subalternes de l'Abbaye. Il se rend successivement à Fresne, à Valenton et à VilleneuveSaint-Georges, où il n'y a pas eu d'assises depuis soixante

et onze ans.

A Villeneuve, il constate que l'auditoire et les prisons tombent en ruines, et que les prisonniers, faute de prison sûre, sont toujours envoyés à Paris, à la Conciergerie. Il s'occupe de faire rentrer au greffe des minutes de tabellions décédés, que les familles conservaient comme si elles eussent été leur propriété. Il prend quelques décisions en matière de police et de voirie, fait démolir des murs qui avancent sur la voie publique et convoque au bailliage divers justiciables. A Issy et à Vaugirard, les procureurs fiscaux de ces deux localités s'opposent aux assises, en prétendant qu'elles n'ont pas eu lieu depuis un temps immémorial, mais les prévôts et les greffiers refusent de s'associer à ces protestations (1).

En somme, sans qu'aucune ordonnance l'ait formellement supprimée, la qualité de tribunal d'appel appartenant au bailliage s'éteint et disparaît peu à peu, et dès

(1) Registre d'assises Z2 3640.

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le début du XVIIIe siècle, elle n'existe plus que comme aliment de chicanes et misérable ressource pour les plaideurs avides de procédure.

LE TABELLIONAGE DE L'ABBAYE ET LES NOTAIRES

AU CHATELET.

Le greffier du bailliage est en même temps tabellion; il dresse des procès-verbaux, des contrats et des conventions pour les personnes qui l'en chargent; il est compétent pour les scellés, les réunions de famille, les tutelles et les testaments. On sait que les notaires et tabellions des seigneurs avaient, comme les magistrats des justices seigneuriales, une compétence personnelle et territoriale en ce qui concerne les actes et les conventions. Mais elle ne fut jamais exclusive du droit des notaires royaux. A Paris, la puissante communauté des notaires au Châtelet, jouissant de privilèges anciens et fort étendus, était pour les notaires seigneuriaux une rivale avec qui la lutte était fort inégale et presque impossible. Cependant le tabellion de Saint-Germain des Prés remporte quelquefois des avantages sur quelques points particuliers. En 1439 un arrêt du parlement refuse aux notaires du Châtelet de laisser substituer les scellés du Prévôt de Paris à ceux du bailliage, chez un sieur De Vaux, décédé dans Paris, près le Couvent des Augustins; il décide que l'inventaire sera fait par le tabellion du bailliage. En 1551 un autre arrêt du parlement donne aussi la préférence au greffier tabellion de Saint-Germain des Prés, sur les notaires au Châtelet, pour un inventaire après décès à faire dans le ressort de la justice de l'Abbaye. Mais le 3 décembre 1569, un arrêt rendu

entre la communauté des notaires, celle des commissaires au Châtelet, et plusieurs seigneurs hauts-justiciers, notamment les religieux de l'Abbaye, décide que les notaires au Châtelet ont le droit exclusif dans la ville et les faubourgs de Paris, de recevoir tous contrats, testaments, attestations et autres actes et instruments de la juridiction volontaire, à l'exclusion des hauts justiciers et de leurs officiers, même des greffiers qui ne peuvent les recevoir par forme de jugements, encore que les parties les en requièrent; que pour les enquêtes et examens de témoins, ils seront faits suivant le choix des parties; que les inventaires et partages auront lieu soit par les notaires, soit par les officiers des hauts justiciers (dans le ressort de leur justice) concurremment, et de préférence par ceux qui auront les premiers été appelés pour apposer les scellés ou auront été choisis par les parties; que les partages en justice seront confiés aux commissaires au Châtelet.

Un arrêt du 26 mai 1612, concernant l'inventaire d'une succession ouverte dans Paris, rue Hautefeuille, donne la préférence aux notaires au Châtelet sur le tabellion de Saint-Germain, qui s'est laissé prévenir, mais commet les sergents du bailliage pour la prisée et la vente des meubles (1).

Un autre arrêt du 22 novembre 1659 exclut aussi le bailliage du règlement d'une succession ouverte dans le faubourg et en charge les notaires au Châtelet qui s'étaient présentés les premiers.

En 1680, il n'existe encore aucun notaire installé dans le faubourg, alors qu'il s'y trouve de nombreuses études de procureurs au Parlement et de procureurs au Châ

(1) Langloix, Traité des droits et fonctions des notaires.

telet. Mais l'institution du Châtelet de la rive gauche, vers cette époque, et le développement de plus en plus grand du faubourg,. virtuellement réuni à Paris, incitent alors les notaires à venir s'y installer. En 1681, la communauté modifie ses statuts. Elle était jusque-là divisée en trois groupes immuables, ayant chacun un syndic, et correspondant aux trois grandes divisions topographiques de Paris : les Halles, la Grève et l'Université. Elle supprime ces trois groupes et institue à leur place trois colonnes (qui existent encore aujourd'hui), suivant l'ancienneté de ses membres, et sans avoir égard à l'emplacement de leurs études. Elle cesse de s'astreindre à choisir un syndic dans chaque quartier.

Dans les vingt dernières années du xvII° siècle, les notaires au Châtelet commencent à transporter leurs études dans le faubourg. C'est d'abord Christofle Loyer (1) qui vient s'installer rue des Fossés-Saint-Germain, puis Charles (2) qui transporte son étude au coin de la rue des Boucheries et de la rue Neuve-Saint-Lambert, enfin Navarre (3) et Lorry (4) qui viennent rue de Bussy,

En 1702, quand le faubourg est rattaché administrativement à Paris, il y a déjà cinq notaires rue de Bussy, et quatre rue Neuve-Saint-Lambert.

De Savigny, successeur de Loyer, reçoit au commencement du XVIIIe siècle, les déclarations au terrier de l'Abbaye. Un autre notaire au Châtelet, Nicolas Duport (5), en dresse aussi. Quant au greffier tabellion de

(1) Titulaire actuel M° Lesguillier.

(2) Titulaire actuel M° Ader.

(3) Titulaire actuel M° Rafin.

(4) Titulaire actuel M° Albert Girardin.
(5) Titulaire actuel M° Maurice Demanche.

l'Abbaye, on en trouve aussi dans ses minutes, mais en plus petit nombre.

En revanche, on rencontre, dans les minutes du greffe au cours du xvIIe siècle, les inventaires des successions de quatre abbés, savoir :

Le Cardinal de Furstenberg, 10 avril 1704,

Le Cardinal d'Estrées, 18 décembre 1714,
Le Cardinal de Bissy, 26 juillet 1737,

Et le Cardinal de La Roche Aymon, 27 octobre 1777. Dans cette période, les notaires chargés des affaires de l'Abbaye sont principalement Cordier (1) Gasche (2), Bonnomet (3), Meunier (4), et Robineau (5). C'est donc dans ces études que les historiens du quartier ont, semble-t-il, le plus de chances de rencontrer des documents les intéressant.

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LA POLICE DU BAILLI.

De 1563 à 1674, sans interruption, le bailli est seul chargé de la police du grand territoire de l'Abbaye. Ce sont là, en réalité, ses attributions les plus importantes. Elles s'étendent aux questions de voirie, de roulage, de nettoyage et d'alignement, à la surveillance des corporations et communautés, aux affaires de mœurs, aux duels, aux querelles sur la voie publique, aux marchés, à la Foire Saint-Germain, etc.

En ce qui concerne la voirie dans le faubourg, un arrêt du Parlement du 24 mars 1611, la maintient à

(1) Titulaire actuel de son étude M° Barillier.

(2) Titulaire actuel M° Rafin.

(3) Titulaire actuel M° Fauchey.

(4) Titulaire actuel M° Lejeune.

(5) Titulaire actuel M° Maurice Demanche.

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