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7. rada, s. f. (Valais, passim), propr., crèche';

8. rasarā, s. f., (Neuchâtel), propr., resserrée'; 9. rin, s. m. (Neuchâtel), cf. rintsè̟ta;

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10. retrouns, s. f., aussi retroun.nyur, s. f. (Franches Montagnes), substantif tiré de retroundr resserrer'. On fait les retrouns en resserrant le foin étendu des deux côtés d'un rouleau à faire. La retrouns est un boudin doublé (v. les croquis).

retrouns

Il nous reste à donner la liste des termes que nos matériaux ne permettent pas encore de définir, nos correspondants ne donnant pour toute description que, rouleau de foin'.

réba, s. m. (Vaulion, Vd); roubatè, s. m. (Valais), tiré de rebatā, rouler (cf. reba, s. f., raie, Bridel); rol, s. m. (Valais); rolè (Vd), propr., rouleau'; rouela, s. f. (Evolène, Anniviers, Genève), a probablement le même radical que le mot précédent. Cf. cependant le français rouelle, tranche coupée en rond', diminutif de roue; kornè, s. m. (Leytron, Valais); fayeta, s. f. (Lens, Valais), propr., petite brebis'.

M. Horning a démontré dans une très intéressante étude1 que souvent un nom d'animal a servi à désigner un tas (de foin, de blé ou d'autre chose). Aux exemples cités par M. Horning (bouc, chèvre, cochon, poulain, veau (?), mule), on peut ajouter le nôtre et peut-être petite oie (v. piron, p. 43, n. 6) et cochon (v. p. 44).

1 Zeitschrift für rom. Phil., t. XXVII, p. 149 et suiv.

mètché, s. m.? (mètchlā. v.) (Neuchâtel, Cerneux-Péquignot). Cf. Atlas linguistique de la France, carte 1285: měcho, 140, 162; mecha, 150, en Lorraine, signifiant « tas de fumier > ; rorta, s. f. (Neuchâtel, Val de Travers), sans doute le même mot que ryorta, s. f. lien de fagot', du latin retorta, chose recourbée', puis, lien en osier '1.

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VII. Le tas de foin.

C'est ici que nous trouvons la plus grande variété de termes, conformément à la diversité des habitudes locales. Abstraction faite d'un petit nombre de mots insuffisamment définis, nous pouvons établir deux catégories de tas de foin :

A. Le petit tas qu'on fait le soir du premier jour et qu'on modifie selon le temps qu'il fait: tout petit par le beau fixe (matson, tsoton, tchéynă, etc.), plus grand et plus soigné en cas de pluie menaçante (tchéyon, piron, etc.). Notons qu'on désigne quelquefois ces tas plus gros que d'ordinaire par le mot qui signifietas à charger', en ajoutant le déterminant à la pluie', par ex. valmon à la pluie, moule à la pluie, etc. En français, on dit veillotte ou meulon.

B. Le grand tas prêt à être chargé. On ne le fait ordinairement que le second jour; il est généralement très gros et fait sans aucun soin, puisqu'il sera défait par le bailleur' aussitôt achevé. Nous ne connaissons pas de terme français correspondant.

A.

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Le petit tas pour la nuit. Il n'existe aucun mot pour toute la Suisse romande. Voici trois termes de caractère cantonal :

1. tsiron, s. m., s'emploie essentiellement dans tout le canton de Vaud et dans une partie de ceux de Neuchâtel et de Fribourg. Il s'applique aussi au tas de blé et à n'importe quel

1 On est surpris de voir que trois de ces mots (rorta, kornè, et rouela, si le mot correspond à rouelle) remontent à l'idée de chose recourbée '. Reste à examiner la question de savoir si primitivement ces rouleaux n'eurent pas réellement une forme qui justifierait ces appellations. Cf. schibe, p. 36.

autre tas1. Il a donné naissance à plusieurs verbes: intsirouna, ètsirouna, détsirouna.

2. matson (mouatson, motson), s. m. richement attesté pour tout le Valais, sauf pour le Val d'Entremont et le Val de Bagne. Le matson, forme diminutive de mouatsɔ2, s. f. (Conthey), est un tout petit tas de foin. On trouve les verbes matsonā, inmatsonā, amotsonā. L'origine du mot est inconnue 3.

3. tchéyon (tchion, tchyoun), s. m., répandu dans tout le Jura bernois. On en a fait un diminutif tchéyna, s. m., qui s'applique au regain et un verbe tchéynè, mettre le foin en tchéyon'. Le tchéyon est un tas conique fait avec beaucoup de soin en prévision de la pluie. L'usage des tchéyon tend à disparaître aux Bois. Le Landeron connaît tehiyan pour, tas de fumier' (Atlas ling., carte 1285). Le Vully vaudois dit tsǝlyon (est-ce tsayon?), qui paraît être le même mot.

En dehors de ces trois mots importants, les patois valaisans, particulièrement riches en termes de fenaison, en connaissent d'autres d'un emploi très local:

4. tsoton (tsyoton), s. m. (Val d'Entremont, Val de Bagne); tchotron (Yvorne, Vd). Le mot s'emploie aussi pour un petit tas de terre au sommet des montagnes 5.

5. piron, s. m. (Plaine du Rhône, Valais), désigne une veillotte de 50-60 cm. de haut. Le mot, probablement dérivé de pierre', serait donc à l'origine, petit tas de pierres '6;

Le mot se rattacherait-il, ainsi que tchéyon, no 3, comme le croit M. Gauchat, au radical de cacare?

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2 On trouve aussi matse, s. f. pièces de bois qu'on place sur le fruit à presser' (Evolène).

3 Le mot semble se rattacher à l'adjectif matchyo

légèrement mouillé' (Evolène). C'est le cas du matson dont le foin n'est pas

encore sec.

La Vallée de Joux connaît tsǝlyou, s. m. morceau de pain'.

5 On ne trouve nulle part tsaton,petit chat' qui conviendrait pour le sens.

6 Il faut toutefois remarquer que petronem donnerait *peron, comme en français, cf. neva; piron serait donc refait sur pira, forme très répandue, surtout dans le Haut-Valais, et qui pouvait l'être autrefois

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6. katson, s. m. (Val d'Illiez, Trient). C'est peut-être le mot

cochon' qu'on trouve à Evolène sous la forme katson. Pour les métaphores tirées des noms d'animaux, v. p. 41.

La Suisse allemande a deux termes principaux pour le petit tas qu'on fait le soir: schöchli et birlig, que l'Idiotikon fait venir de bern, porter'. Le birlig serait à l'origine ce que peut porter un homme. Cf. note. Les Grisons disent en outre höckerli.

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dans la plaine du Rhône (voir cependant Gauchat, Dompierre, p. 23, qui considère pyèra comme indigène). Le fait est que, aujourd'hui, Evionnaz (V) et Le Châtel (Vd) disent pyera et pyero, Pierre' (Zimmerli). Aussi ne connaissons-nous pas piron, au sens de ̧tas de pierre'. Pour ces raisons, on ne peut considérer cette étymologie comme tout à fait assurée. Il y a peut-être autre chose. Le bas-latin connaît un pyra tas (v. Idiotikon, IV, col. 1503, où il doit rendre avec acervus et congeries l'idée de ̧tas de foin' (doc. de 1662); Du Cange le donne deux fois : 1. pirra, f., «cumulus », terme général, 2. pirra, f., « pila, structura erecta in modum columnæ », etc. Ce mot, sans aucun doute emprunté au grec пvá, rogus, bûcher', revit en anc. français pire, encore chez Scarron, et en italien pira, toujours au sens de bûcher servant de torture. A côté de cette signification technique et historique, le mot peut fort bien avoir été employé dans la langue vulgaire au sens général qu'indiquent Du Cange et le document de l'Idiotikon; de là à piron petit tas de foin' en Valais, il n'y a pas loin. Le birling de la Suisse allemande, que l'Idiotikon rattache à bërn porter', mais qu'en réalité on ne porte guère, n'aurait-il vraiment rien à voir là dedans ? – Pour les autres mots romans qui présentent le radical pir-, je crois qu'il faut les écarter ici. On trouve piron, s. m., jeune oie (Saintonge, Littré); pirote, s. f., oie femelle (Sachs-Villatte, Suppl.); piron, s. m., batteur en grange maladroit (S.-V.), tous probablement dérivés de Pierre, cf. cependant it. piro, poussin, et pira, poule. Un autre groupe étymologique est formé par le fr. piron, s. m., « Spur-Zapfen », terme de mécanique (S.-V13.), sans doute identique à l'italien pirone, levier, cheville; ferro de clavicembali', dente cilindrico' (Petrocchi), et probablement apparenté avec pirouette, s. f. (aussi pirouet s. m.), disque que traverse un pivot', jouet d'enfant, toton, et piruolo, cheville', famille dont l'origine est fort controversée. (v. Körting, etc.). Il y a enfin un troisième piron = fourchette, au Nord-Est de l'Italie (lomb.-vénitien, ladin), que M. Flechia démontre être emprunté au grec moderne πειρούνιον.

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B. Le tas à charger1. Il n'y a pas non plus de terme général suisse-romand. Celui qui est le plus répandu et qui peut-être a occupé autrefois tout le territoire de la Suisse. romande, c'est:

1. valamon (voualamon, volamon, voamon, valmon, volmon), s. m., usité aujourd'hui dans tout le Valais et dans tout le Jura bernois, en outre dans une partie du canton de Vaud, surtout dans les Alpes, et sporadiquement dans la région de Lavaux. Le mot désigne tantôt le tas pour la pluie, tantôt le tas à charger, tantôt la meule de foin qu'on laisse dehors plusieurs mois (Evolène). C'est toujours un très gros tas (de 1 m. de hauteur et de 80 cm. de diamètre à Trient, par ex.).

Quant à l'origine de ce mot important, certaines formes phonétiques font songer à un radical germanique commençant par w. Le mot existe, c'est le walm, wälmli de la Suisse allemande. D'après les matériaux de l'Idiotikon, que M. Bachmann, rédacteur en chef, a mis obligeamment à ma disposition, le mot, fort répandu, a entre autres les significations suivantes : 1. rouleau de foin, Berne (Gampelen, Anet, Büren), Soleure (Läberberg);

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2. meule de foin, Berne (Lützelflüh);

3. petit tas (allongé ?) de terre, qu'on fait en plantant les pommes de terre (Morat);

4. emplacement dans la grange destiné au foin et au blé (Thurgovie).

Bien que walm ne se trouve nulle part dans le sens précis de, tas à charger', il résulte de ces données que le mot s'applique à diverses formations de foin parmi lesquelles celle d'un tas est doublement attestée. Il n'y a pas de doute sur la nature germanique de walm, qu'on rattache au radical de wölben voûter'. L'intercalation d'un a entre deux consonnes se retrouve dans les mots français d'origine germanique, canif, emprunté du nordique knifr; chaloupe, du néerl. sloep, canapsa,

1 En suisse-allemand lad-schoche ou hufe.

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