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e, o, a sans accent sont des voyelles moyennes.

> (e renversé) = e sourd (brebis [brǝbi]).

an, in, on, un, sont les voyelles nasales des mots français temps [tan], main [min], rond [ron], lundi [lundi].

in, ün, oun désignent les nasales de i, u, ou, qui ne se trouvent que dans certains patois du Jura bernois et du Valais.

å, voyelle intermédiaire entre a et ò.

ä è très ouvert.

Les diphtongues sont notées ay, èy, òy, aou, àu, etc., ou ya, yè, yò, oua, ua, etc., suivant la nature et le mode de combinaison des éléments qui les composent.

B. CONSONNES

b, p, d, t, j, ch, v, f, s, z, l, m, n, r ont le même son qu'en français,

g représente partout le son dur de goût [gou].

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ly mouillée dans l'ancienne prononciation taille [taly'].

nyn mouillée comme dans vigne [viny'].

y s'emploie comme dans le français yeux [y], fusion [fuzyon], pied [pye].

h = aspiration semblable à celle de l'allemand hoch.

= son du th dur anglais.

d son du th doux anglais.

x = son de l'allemand ich.

C. GÉNÉRALITÉS

Les voyelles particulièrement longues sont surmontées d'un trait horizontal: ā, etc.

Les sons faiblement articulés sont notés en caractères plus petits, par exemple ai, ao, our, etc.

Un petit trait sous une voyelle (a) indique qu'elle porte l'accent tonique.

MÉLANGES BAGNARDS

II. Les expressions servant à rendre l'idée de << pleuvoir » et de « neiger ».

Dans l'ensemble du vocabulaire, un patois local ne saurait aucunement soutenir la comparaison avec la langue française. Le dialecte est particulièrement pauvre en termes généraux et abstraits, ce qui fait qu'une partie des questionnaires du Glossaire romand ont produit un résultat plutôt faible. En revanche, sans même se confiner dans le domaine technique de l'agriculture et des occupations campagnardes, il est facile de trouver des cas où un seul patois, tout imparfait qu'il soit, peut rendre des points à la langue littéraire. Nous aimerions le prouver en énumérant les nombreux termes qui correspondent dans la vallée de Bagnes au mot français pleuvoir ».

Cette multiplicité n'a pas lieu de nous étonner. Tout au plus gênante pour les promeneurs et les badauds, la pluie ne change guère les habitudes citadines, tandis qu'elle fait l'espoir et la fortune, cause le désarroi et le malheur du paysan.

Il est d'abord curieux de constater que le terme propre, le correspondant direct du latin pluere, ou plutôt de son équivalent vulgaire *plovère, c'est-à-dire le verbe plouay 1, n'est plus usité aujourd'hui que par quelques vieillards qui s'en servent rarement. Il en est de même du verbe nay, « neiger », lat. *nivére, qui avait remplacé l'ancien ningere, et qu'on peut désormais considérer comme archaïsme en bagnard. Beaucoup

'Signe de décadence: plusieurs patois romands ont formé un infinitif plyòdzi, qui équivaut à un français «pleuger », sur le modèle de neiger. L'analogie est facilitée par le fait que pluvia donne plyòdza dans nos patois.

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d'habitants de la vallée ne connaissent ni ne comprennent plus cette expression. Ces termes, qui avaient paru commodes et significatifs pendant deux mille ans, sont vieillis, rouillés, relégués au vieux fer1. Cela est d'autant plus surprenant que l'expression qui en triomphe doit nous paraître bien incolore et insignifiante: on dit balyè (dè plòdza, dè nay) 2. Comme le complément de plòdza est généralement supprimé, on se contente de dire: (il) donne 3 pour il pleut. Dans la vie et dans le développement linguistique, les successeurs ne se distinguent pas toujours de leurs prédécesseurs par l'abondance de leurs qualités. Qui donne la pluie? On ne s'en rend pas compte.

Le langage est plus énergique lorsqu'il s'agit de caractériser une pluie forte ou fine. Pour une averse, on se sert volontiers de mots qui signifient battre (cfr. en français: pluie battante). On emprunte les verbes ròlyè5, évouapā, dzərba (dè plòdza) et même étrǝlyè (« étriller » = battre à coups redoublés). Le second de ces termes a le sens de frapper à grands coups et s'emploie par exemple en parlant des batteurs de blé. Le troi

1 Le substantif pluie et les dérivés pluvieux et «pleuvigner » (voir plus loin) ont cependant conservé toute leur force vitale. Les cartes 1034 (pleuvoir), 1035 (il pleut), 1039 (pluie) de l'Atlas linguistique de la France prouvent que le substantif est le mot le plus résistant des trois. Il pleut est souvent remplacé par il tombe de l'eau ou il mouille. L'infinitif manque dans de vastes contrées. Pluie a fait naître le dérivé bagnard plòdziro, grande chute d'eau.

2 Comparez balye xlouè, « donner (du) soleil », faire un beau temps. 3 Les patois des vallées valaisannes supérieures (p. ex. Anniviers) possèdent encore le verbe dònā, qui prend le même sens.

4 L'expression allemande es giebt Regen n'a certainement exercé aucune influence sur la création de «il donne de la pluie ». Du reste, elle n'a pas la même signification et désigne une pluie à venir, reconnaissable à des symptômes atmosphériques.

5 Signifie battre dans d'autres patois; comp. la tournure populaire : il pleut à la roille. Une rapide revue des matériaux du Glossaire nous fait trouver les autres verbes suivants au sens de battre pris métaphoriquement pour pleuvoir: dralya, averse « drillée » (Le Chenit); rocha, «rossée» (Vaud, Fribourg, Berne); tapè (Berne); chake, «< claquée », (Berne). Cfr. le suisse allemand bratch = fesser et pleuvoir fortement. N'oublions pas de mentionner ona batyoua de plòdza (Bagnes).

sième dérive peut-être de gerbe et rentre dans la même sphère d'idées. Un cinquième verbe dòrdzyè, dans d'autres patois valaisans dradjyè (de dragée, grenaille?), appliqué à une forte averse chassée par le vent, paraît représenter l'idée d'une chose lancée avec force. Les cinq verbes cités ont à peu de chose près une acception identique. Individuellement, l'un peut paraître plus expressif que les autres. A côté des infinitifs, nous avons les substantifs ròlya, évouapāyə, dzərbayə, étralya, dòrdzyą. Il est difficile de dire si les substantifs ou les verbes ont reçu d'abord le sens figuré indiqué. On rencontre parfois aussi ròla, s. f., pour la pluie. Pour la formation et l'absence de la mouillure devant final, on peut rapprocher le couple molyè et a molǝ mouiller mouille, avec le sens général de pleuvoir et pluie. On dit ainsi sa yan n in pròu dè mòlə, cette année est pluvieuse. Le terme est rare. De même bala, tiré de balyè susmentionné: on tin vraya su a balǝ, un temps enclin à la pluie.

Lorsqu'au lieu d'une forte ondée on n'a affaire qu'à une bruine légère et bénigne, le patois ne manque pas de ressources. Voici d'abord plusieurs diminutifs qui rendent cette idée : plovanyè ou plònyè, selon la tendance individuelle ou locale de conserver ou de supprimer le v intervocalique. En français suisse on dit également « pleuvigner1». Plònyè a engendré un sous-diminutif plònyatsyè, qui désigne une pluie encore moins abondante. Avec le même élément formal ont été constitués les verbes à peu près synonymes gòtǝnyè et rəzənyè2. Ils sont plutôt inférieurs en force à plònyè, grâce à leur origine: gota, goutte et le radical du mot rosée. L'appellation moderne balyè a occasionné la formation du diminutif balyatsyè 3, qui se rapporte à une pluie peu importante et passagère.

1

Non content des treize verbes cités jusqu'ici, le patois

Comp. l'italien piovigginare. Tous nos patois connaissent le mot; dans le canton de Berne, l'n n'est pas mouillée.

2 Substantits gòtənya, rəzənya.

3 Cfr. dònoutsè du val d'Anniviers.

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bagnard possède encore les expressions konplèyè ou tsarmasyè pour une pluie intermittente pendant une certaine période de temps, avec de rares éclaircies de soleil (juin 1909!), d'origine obscure. Substantifs konpli, m., et tsarmasèri, f. Enfin une bruine froide plus ou moins abondante, tombant de travers et souvent accompagnée de neige, est désignée par le vocable dzafrasyè, qui est susceptible de s'appliquer à la neige seule. Son compagnon obligé est le substantif dzafrasya. Le suffixe verbal est -aceare, le radical probablement apparenté à celui du français givre.

Pour neiger, le Bagnard s'est montré moins inventif. Aussi la saison morte est-elle moins importante pour le paysan. Cependant, l'intérêt dont il accompagne la chute de la neige est suffisamment attesté par les verbes nèoutsyè, à peine connu au Val de Bagnes1; sandrèyè, neiger en flocons ténus et peu pressés; grizayè et blantsi, qui désignent différents degrés de couverture de la terre par la neige; bardouă, tacheter, qui s'applique à une étendue enneigée, mouchetée de taches noires où la neige a disparu. Tarana se dit enfin du sol en voie de se débarrasser de sa couche blanche; quand il è tarin (= terrain), le moment est venu où recommencent les joies et les labeurs de la vie agricole.

M. GABBUD et L. GAUCHAT.

1 Existant dans la vallée du Rhône.

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