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il le regardoit même avec un mélange de respect et d'admiration, comme un confesseur appelé par le ciel aux plus hautes destinées. Démodocus étoit presque effrayé du langage inconnu et des vertus incompréhensibles d'Eudore. Les trois vieillards se lèvent avec majesté, comme trois rois, et rentrent au foyer de Lasthénès. Cyrille, après avoir offert pour Eudore le redoutable sacrifice, prend congé de ses hôtes et retourne à Lacédémone. Eudore se retire dans la grotte témoin de sa pénitence. Démodocus, resté seul avec sa fille, la serre tendrement dans ses bras, et lui dit avec un pressentiment triste :

«Fille de Démodocus, tu seras peut-être aussi malheureuse à ton tour, car Jupiter dispose de nos destinées. Mais tu imiteras Eudore. L'adversité a augmenté les vertus de ce jeune homme. Les vertus les plus rares ne sont pas toujours le résultat de cette lente maturité que l'âge amène : la grappe encore verte, tordue par la main du vigneron, et flétrie sur le cep avant l'automne, donne le plus doux vin aux bords de l'Alphée et sur les coteaux de l'Érymanthe. »

D

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Page 21. L'Éternel, qui voyoit les vertus des chrétiens s'affoiblir dans la prospérité, permit aux démons de susciter une persécution nouvelle.

Eusèbe a donné la même raison de la persécution sous Dioclétien. On peut remarquer, au reste, que cette exposition, fort courte et fort simple, contient absolument tout le sujet.

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Page 21. Démodocus étoit le dernier descendant d'une de ces familles Homérides.

J'ai adopté la tradition qui convenoit le mieux à mon sujet : on sait d'ailleurs que les Homérides étoient des Rhapsodes qui récitoient en public des morceaux de l'Iliade et de l'Odyssée. Le nom de Démodocus est emprunté de l'Odyssée. Démodocus étoit un poëte aveugle qui chantoit aux festins d'Alcinoüs: on croit qu'Homère s'est peint sous la figure de ce favori des Muses. Par la fiction de cette

famille d'Homère, j'ai pu faire remonter les mœurs jusqu'aux siècles héroïques sans trop choquer la vraisemblance. Il est assez simple qu'un vieux prêtre d'Homère, dernier descendant de ce poëte, poëte lui-même, et l'esprit tout rempli de l'Iliade et de l'Odyssée, ait gardé, pour ainsi dire, les mœurs de sa famille. On voit dans les montagnes d'Écosse des clans ou tribus qui, depuis des siècles, conservent la langue, le vêtement et les usages de leurs pères. Sans le secours de cette fiction, peut-être assez heureuse en elle-même, j'aurois perdu le charme et les grands traits de la mythologie d'Homère. On m'auroit alors reproché, très justement, d'avoir opposé les mœurs chrétiennes dans toute leur jeunesse et toute leur beauté, aux mœurs païennes dans leur décadence. On voit donc ici une preuve frappante de ma bonne foi, et de la conscience que je mets toujours dans mon travail. Certainement les petits dieux d'Ovide et les usages de la Grèce idolâtre au quatrième siècle n'auroient pu se soutenir un seul moment auprès de la grandeur du christianisme naissant et du tableau des vertus évangéliques. Il ne faut pas d'ailleurs oublier que Cymodocée, représentant les beaux arts de la Grèce, doit sortir de cette famille Homéride, et qu'elle va devenir chrétienne pour remettre à la Muse sainte la lyre d'Homère.

Ive.

Page 21. Du mont Talée, chéri de Mercure.

Montagne de Crète où Mercure étoit honoré. Peut-être avoit-elle pris son nom de Talus, compagnon des travaux de Rhadamanthe, et dont les poëtes ont fait un géant d'airain, qui combattit les Argonautes, et fut tué par les enchantements de Médée. (Voyez PLATON et APOLLONIUS.)

ve

Page 21. Il avoit suivi son épouse à Gortynes, ville bâtie par le fils de Rhadamanthe. au bord du Léthé, non

loin du platane qui couvrit les amours d'Europe et de Jupiter.

Gortynes, une des cent villes de la Crète. Rhadamanthe est devenu, par l'anchantement des poëtes, un des juges des enfers. Le Léthé, petite rivière de Crète, ainsi nommée parce que ce fut sur ses bords qu'Hermione oublia Cadmus. Les Grecs, ayant remarqué le long du Léthé une espèce de platane toujours vert, publièrent que Jupiter avoit fait naître ce platane pour cacher ses amours avec Europe. (Voyez les mythologues, les géographes et les voyageurs, entre autres Tournefort.)

Vie.

Page 21. Les antres des dactyles.

Les dactyles idéens étoient, selon les uns, des prêtres de Cybèle, et, selon les autres, une espèce d'hommes religieux, premiers habitants de la Crète. Ils demeuroient dans les cavernes du mont Ida. (Voyez SOPHOCLE, Strabon, DIODORE DE SICILE, etc.)

VIIe.

Page 21. Épicharis alla visiter ses troupeaux sur le mont Ida. Saisie tout à coup des douleurs maternelles, elle mit au jour Cymodocée.

Σιμοείσιον, ὅν ποτε μήτηρ

Ιδηθεν κατιοῦσα, παρ ̓ ὄχθησιν Σιμόεντος

Γείνατ', ἐπεί ρα τοκεῦσιν ἄμ' ἔσπετο μῆλα ἰδέσθαι.

(Iliad., liv. Iv, v. 474.)

VIIIe.

Page 22. Dans le bois sacré où les trois vieillards de Platon s'étoient assis pour discourir sur les lois.

Allusion à la belle scène qui commence le dialogue sur les lois. «<Clinias: En avançant, nous trouverons dans les

bois consacrés à Jupiter des cyprès d'une hauteur et d'une beauté admirables, et des prairies où nous pourrons nous asseoir et nous délasser.» ( Lois de Platon, liv. ¡er, trad. de M. Grou.)

Ixe.

Page 22. De regarder avec un sourire mêlé de larmes cet astre charmant, etc.

Sourire mêlé de larmes. Andromaque regarde ainsi Astyanax:

Δακρυόεν γελάσασα.

( Iliad., liv. vi, v. 484.)

C'est encore Homère qui compare Astyanax à un bel astre:

ἀλίγκιον ἀστέρι καλώ.

(Iliad., liv. vi, v. 401.)

xe.

Page 22. Or, dans ce temps-là, les habitants de la Messénie faisoient élever un temple à Homère.

Presque toutes les villes qui se disputoient la gloire d'avoir donné naissance à Homère lui élevèrent des temples. Ptolémée-Philopator lui en bâtit un magnifique; Chio célébroit des jeux en l'honneur du plus grand des poëtes; Argos invoquoit Apollon et Homère, etc.

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Page 22. Poussé par un vent favorable, son vaisseau découvre bientôt le promontoire du Ténare, et suivant les côtes d'OEtylos, de Thalames et de Leuctres, il vient jeter l'ancre à l'ombre du bois Chœrius.

Le Ténare, aujourd'hui le cap Matapan, dernier promontoire de la Laconie. On y voyoit un temple de Neptune et un soupirail qui conduisoit aux enfers. OEtylos, Tha

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