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maine de l'évêché. Les chènes de la forêt étaient d'une si belle dimension, que l'évêque Jean de Lorraine fit don à la ville du bois nécessaire pour la charpente d'un hôpital en faveur des péstiférés, que les magistrats firent bâtir en 1541, à côté du cimetière de Sainte-Catherine (1).

La rivière d'Anļsence (Alsentia) du Cens avait, dans les temps reculés, un lit plus large et plus profond qu'il ne 'T'est aujourd'hui ; cette opinion résulte de la plantation de bois futaies et de taillis, et de la haute et basse forêt sur la chaîne de collines, à droite et à gauche, depuis sa source jusqu'à l'embouchure (2). Les fouilles opérées, en 1788, pour la reconstruction - des Moulins-Lévesque prouvent que cette rivière a été très-profonde. Après avoir percé à 12 mètres, on à découvert des morceaux de fer oxydés, des fragments de pierre meulière, des débris de meubles et de vaisselles; et enfin, d'autres fouilles, en 1831, au passage de l'Arguillère, pour la construction du pont destiné à remplacer la jetée de pierres druidiques, ont amené, à 2 mètres de profondeur, la découverte de pièces de monnaie en cuivre à l'empreinte effacée. L'on sonda de nouveau à 7 mètres, sans rencontrer le solide, et les pierres druidiques furent renversées dans cette cavité pour asseoir les fondations.

(1) Annales de Nantes, par Meuret, 1837, tome 2, pag. 14. (2) Déclaration des domaines de l'évêché de Nantes pour l'an 1681 et 1683, en dépôt aux archives de la Préfecture, consiguée sur le registre 337.

Si cette rivière n'a pas été navigable, bien que la tradition l'affirme, ses eaux ont, du moins, servi de moteur à de nombreux moulins. On voit encore les vestiges d'étangs et de chaussées, depuis sa source en Vigneux, au Nord du château du Buron, jusqu'à sa jonction à l'Erdre; ‹ les deux moulins près du Buron, quatre en Sautron, moulin Vieux, moulin de Noë, moulin Moret et les moulins Lévesque (1), et deux autres en Orvault, peu loin de la Cholière. Ces moulins auront sans doute été abandonnés ou par la diminution des sources, effet du déboisement des collines et de la destruction des forêts, ou depuis l'établissement de la mouture par les moulins à vent, machines dont le modèle a été rapporté d'Asie par nos ancêtres, à leur retour des croisades, au XIIIe siècle. Le lit du Cens s'est rétréci. La distance entre ces collines s'est changée en prairies baignées d'une eau limpide pendant l'été; et l'hiver, les eaux venant à déborder, présentent l'aspect d'une rivière fangeuse, coulant largement encaissée entre les collines.

Comme les autres communes des environs, Sautron a été aussi le théâtre des guerres de religion entre les catholiques et les calvinistes. On prétend que la maison de la Grande-Noë, édifice quadrangulaire, énorme pavillon très-élevé, a plusieurs fois servi d'asile à ces derniers,

(1) Un titre de 1537 annonce qu'il existait un moulin en ce lieu. Mais les fouilles exécutées à une profondeur de 12 mètres prouvent une antiquité plus reculée. Peut-être cette petite rivière a pu servir aux moulins que Saint-Félix fit construire aux environs de Nantes. A cette époque, la largeur du Cens a du attirer l'attention du prélat.

encore désignés dans la localité sous le nom de Huguenots, et qu'elle a soutenu plusieurs attaques contre les catholiques (1).

A cette époque, Sautron n'était pas un village sans importance, puisqu'il a attiré l'attention d'Antoine de Créquis, évêque de Nantes, et surtout de. Charles IX. Ce monarque, à la requête du prélat, accorda, en 1572, des lettres patentes qui autorisèrent l'établissement de deux foires: l'une le 1. mai et l'autre le 1er juillet, avec un marché chaque semaine (2).

Sautron, parmi ses notables habitants, compte trois propriétaires nommés maires de Nantes (3):

Michel Loriot, seigneur du Fief (4), en 1577;

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Michel Loriot, de la Noue, en 1607. Mais ce magistrat ayant osé protester (chose rare alors) contre les corvées pour réparation des routes; commandées par Sully, grand voyer de Bretagne, et ayant en outre manifesté un avis contraire à un impôt de 3 sols par livre sur les marchandises à l'entrée et à la sortie de Nantes, Henri IV le manda à Paris et le réprimanda sévèrement. On exécuta les corvées et l'impôt fut perçu;

(1) Tradition des habitants.

(2) Déclaration du domaine de l'évêché de Nantes pour 1681 et 1683, déposée aux archives de la Préfecture, à Nantes, cotée volume 337.

(3) Le Boyer, Notice sur le département de la Loire-Inferieure, tome 2; Meuret, Annales de Nantes, tome 2; Camille Melliget, la Commune et la Milice de Nantes, 1840.

(4) Petit château avec une tourelle conique, surmontée de girouettes, construction du'xv. siècle.

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Et enfin, Jacques Fremon du Bouffay, conseiller au Présidial de Nantes, propriétaire des Croix, en 1679.

Un rôle rentier de l'évêché, pour Sautron, de l'an 1710, renfermant 174 articles, constate que les contributions foncières s'élevaient à la somme de 437 livres 6 sols. On percevait alors le dixième du revenu (1).

La population, en 1778, était de 500 âmes. Ce chiffre ne supposerait que cent feux ou maisons, en comptant cinq personnes par famille, ce qui est le terme ordinaire (2).

Jusqu'en 1789, Sautron relevait en partie de la juridiction de la Cour des Regaires de Nantes pour 28 fiefs appartenant à l'Évêché, et en partie de la juridiction de Notre-Dame-de-Bongarand, de Saint-Cyr et SainteJulite, fief érigé en prieuré, qui dépendait des domaines de l'Abbaye des Filles-de-Sainte-Marie-de-la-Charité, ou de Notre-Dame-du-Ronceray (3) d'Angers, vulgairement connue sous le nom de Notre-Dame-l'Angevine. Ces diverses prestations et rentes se payaient en deux termes, à la mi-août et à Noël, en avoine, argent et volailles.

La cure de Sautron, dotée de 400 livres de rente, était présentée par le chapitre de l'église cathédrale en

(1) Les contributions de 1842, montent à 7003 fraucs 62 c. (2) Ogée, Dictionnaire Géographique et Historique de Bretagne, tome 4, page 402, 1.re édition.

(3) Nommée ainsi d'une vierge trouvée parmi les ronces. Fondée en 950 par. Foulques Leben, reconstruite en 1119 par Foulques Nerra, comte d'Anjou, et consacrée par le pape Calixte II. (L'Anjou et ses Monuments, par M. Godart-Gaultrier, avocat; Angers, 1839.)

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commun. L'Évêque, avait conservé les droits et le rang de Seigneur spirituel et temporel de la paroisse (1).

Déjà la féodalité s'était anéantie pour toujours au sein de l'Assemblée Constituante, et l'Assemblée Législative venait de prononcer l'abolition de la royauté. Le gonvernement républicain, proclamé par la Convention Nationale sur tous les points du territoire, allait rencontrer de formidables ét de nombreux adversaires dans les landes de la Bretagne et dans les champs de la Vendée. Tout-à-coup éclata l'insurrection générale. Sous l'influence du Clergé et de la Noblesse, les populations se ruèrent sur les villes.

Les premiers coups de feu, préludes de ces guerres longues et meurtrières, furent tirés en mars 1793, entre un détachement de la garde nationale de Nantes et les insurgés réunis au passage de Sautron. Dans la mêlée, it resta de part et d'autre plusieurs morts et beaucoup de blessés. Les réactions agitèrent vivement la commune. Plusieurs notables habitants périrent victimes: l'un fut sabré mortellement en plein jour, par des hussards en maraude; et l'autre, citoyen irréprochable dans la vie privée et dans la vie publique, fut assassiné, le nuit, par une bande de chouans.

Pendant trois ans, les chouans répandirent la terreur dans l'arrondissement, au Nord de Nantes, entre l'Erdre et la Loire.

Les incendies, les meurtres et les pillages ne cessèrent qu'en 1795, après l'arrivée de Hoche dans l'Ouest. Ce général, revêtu du commandement de trois corps.

(1) Vieux pouillé manuscrit du diocèse de Nantes.

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