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constamment intervenir dans nos actions les plus indifférentes pour les régler et les régir. Tout acte innocent en soi doit être, non-seulement toléré, mais protégé, dans une démocratie, contre la violence de ceux qui voudraient l'empêcher. Et cela doit se faire, bien entendu, autant dans l'intérêt des cultes dissidents que du culte catholique. La Constitution ne s'est pas bornée à proclamer la liberté de conscience; elle a voulu de plus, par l'art. 8 du préambule, que la République protégeât le citoyen dans sa religion.

D'après ces principes, la police intérieure du culte devrait exclusivement appartenir au clergé ; l'autorité municipale ne devrait avoir le droit d'intervenir que dans la police extérieure, mais sans pouvoir jamais attenter à la liberté du culte. Et même sur la police extérieure, nous avons émis l'opinion qu'elle ne dépendît pas entièrement de l'État et qu'elle fût l'objet d'un règlement fait par l'autorité municipale, conformément à l'avis d'un comité institué à cet effet, et composé de conseillers de fabrique et de conseillers municipaux, réunis en nombre égal. Ces deux catégories de citoyens, représentant, l'une l'autorité civile et l'autre l'autorité religieuse, leurs délibérations seraient impartiales et il n'en pourrait sortir que des mesures de conciliation. On se conformerait de la sorte à ce principe, que nous considérons comme fondamental, que le pouvoir civil ne peut pas régler les matières mixtes sans le concours du pouvoir religieux.

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M. pense qu'il ne faut pas gêner les cérémonies extérieures du culte, que la plus grande liberté doit être laissée à cet égard; mais à une condition, c'est que, de leur côté, les catholiques ne voudront pas contraindre les cultes dissidents, et généralement les citoyens qui ne sont pas animés de la même ferveur que les fidèles, à faire des démonstrations qui ne seraient point dans leurs convictions, et à par

En cas de partage, la voix du président serait prépondérante. Le maire serait président, et comme il fait partie des deux conseils, son impartialité ne saurait être mise en doute.

ticiper au luxe déployé en pareille circonstance par la piété des croyants.

M. ....... est d'avis que l'autorité municipale doit, dans l'intérêt de la sécurité publique, donner son avis sur l'opportunité des cérémonies extérieures. Ce serait ensuite au gouvernement à prendre en définitive une décision. Il redoute les petites passions de localité, et il ne voudrait pas livrer le culte à ces passions.

M........ n'éprouve pas les mêmes appréhensions. Selon lui la police locale est la plus propre à déterminer ce qu'il convient de faire dans l'intérêt de la paix publique.

M. ....... voudrait que l'autorité municipale pût empêcher les processions, au cas d'une agitation accidentelle ; mais quand il s'agirait de prendre une mesure générale s'appliquant à plusieurs lieux et à plusieurs temps, ce serait au gouvernement à décider.

M. ....... voudrait dans tous les cas le recours au gouvernement. Les cultes dissidents pourraient être en majorité dans une commune, le maire pourrait être protestant ou hostile à la religion catholique, il est donc convenable que la décision sur ces matières n'appartienne pas en dernier ressort à l'autorité locale.

M. ....... voudrait le maintien de l'art. 45. Il n'y aura, selon lui, qu'incertitude et arbitraire, si on ne limite, et si on ne définit pas les cas où la police pourra s'opposer à la sortie des processions. Il pense en conséquence qu'elles devraient être interdites dans les lieux où il y a des temples appartenant à des cultes dissidents, et pas ailleurs. La police des rues appartenant à l'autorité municipale, il voudrait en outre que le clergé se soumît à cette police dans les cérémonies extérieures du culte.

M........ croit au contraire que la voie publique appartient à tout le monde. Il n'y a pas que les processions qui parcourent les rues; les voitures publiques, les troupes, les voyageurs, les convois de toute sorte les occupent habituellement; pourquoi, pour satisfaire à leur piété, les

fidèles ne le pourraient-ils pas à des intervalles beaucoup plus rares?

M. le directeur des cultes, appelé au sein du comité, a été invité à donner son avis sur cette question. Il a dit que l'administration agit, toutes les fois qu'il s'élève des différends à cet égard, en vertu de l'art. 1er du Concordat, qui donne au gouvernement la police extérieure des cultes. L'art. 45 de la loi organique n'en est que l'application. Il ne pense pas au surplus que ce dernier article donne au gouvernement la police intérieure du culte. Il n'intervient dans les cérémonies qui se passent dans les églises que pour les faire respecter si elles venaient à être troublées. Là se borne son action. L'art. 45 et généralement la législation de 1802 marquent une époque de transition. Cette législation est aussi libérale qu'elle pouvait l'être à une époque où il eût été peut-être imprudent de passer de l'interdiction absolue à la liberté absolue. Le gouvernement agit alors dans de bonnes vues et pour rétablir l'harmonie.

Quant à l'administration actuelle, elle ne met en usage les mesures de précaution qu'elle trouve dans la loi organique, que dans un intérêt d'ordre public. Elle évite à cet égard toute tracasserie. Elle ne reconnaît pas aux cultes dissidents le droit d'empêcher les processions. L'art. 45 est une arme que le législateur a mise entre ses mains, et non entre celles des protestants, et elle en use avec la plus grande modération. Toutefois, M. le directeur ne s'oppose pas à ce que la rédaction de l'art. 45 soit modifiée, de manière à présenter un sens restrictif moins absolu.

M........ profite de la présence de M. le directeur des cultes pour se plaindre de la manière dont l'administration intervient quelquefois dans les enterrements des personnes auxquelles l'Église refuse la sépulture ecclésiastique.

M. le directeur répond que sous son administration le gouvernement n'est intervenu que pour blâmer les autorités locales de vouloir violenter la conscience du clergé. Un cas s'est présenté où l'autorité centrale a été consultée, et on a répondu que si on était croyant, il n'y avait qu'à se soumettre

aux lois et aux usages de l'Église; et que si on ne croyait pas, il n'était pas décent d'exiger les prières d'une religion dont on méconnaissait l'autorité. M. le directeur ajoute que si des cas de cette nature venaient encore à se présenter, il se garderait bien d'en appeler comme d'abus. Il pense que, dans cette circonstance, l'administration doit se déclarer incompétente. Revenant à la question des processions, M. le directeur dit qu'à son avis l'administration ne doit agir que dans un esprit large et libéral, qu'elle doit les autoriser, nonobstant les légères émotions qu'elles pourraient occasionner, et ne les empêcher que dans les cas où, ayant à appréhender des troubles sérieux, l'autorité ne se sentirait pas en mesure de les réprimer facilement et sans scandale.

Le comité, après ces observations, est d'avis qu'il suffit de donner à l'État, d'une manière générale, la police extérieure des cultes, et qu'à cet égard l'art. 1o du Concordat, modifié par le comité, est suffisant. L'art. 45 de la loi organique, en interdisant toute procession dans les lieux où il y a des temples destinés aux cultes dissidents, pose une restriction contraire à la liberté des cultes. En principe, toutes les cérémonies extérieures doivent être permises et même protégées, qu'elles aient lieu dans des pays protestants ou non. La police ne devrait intervenir que dans les cas extrêmes d'agitation et sauf recours à l'autorité supérieure. Le comité pense en conséquence que l'art. 45 doit être, sinon entièrement supprimé, du moins considérablement modifié.

Sur l'art. 46, portant que le même temple ne pourra être consacré à plusieurs cultes, on a été d'avis de conserver cette disposition, sauf à modifier la rédaction de l'article, à raison de ce qui se pratique dans plusieurs diocèses, où le même temple est consacré à plusieurs cultes. On a fait observer sur l'art. 47 que les autorités civiles et militaires ne devraient avoir une place distinguée dans les églises que les jours de fêtes légales.

Sur l'art. 48, relatif à la sonnerie des cloches, on s'en est tenu à la jurisprudence et aux usages relatifs à cet objet.

Les art. 49, 50, 51 seraient conservés, sauf rédaction. Sur l'art. 52, on a dit que les curés ne pourraient, dans leurs instructions, se permettre aucune inculpation directe ou indirecte contre les personnes, mais qu'il y avait lieu à modifier la seconde partie de l'article, interdisant les inculpations contre les autres cultes autorisés par l'État. On a trouvé ces expressions trop générales, et on a craint qu'elles ne fussent une entrave pour la liberté de la prédication. Cette partie de l'article devrait être rédigée de manière à garantir cette liberté.

L'art. 58, portant qu'il y aura en France dix archevêchés et cinquante évêchés, avait été modifié par la convention du 14 juin 1817, conclue entre le gouvernement et le SaintSiége. Cette convention élevait à quatre-vingt-douze le nombre des siéges épiscopaux. Mais ce concordat n'ayant pas été sanctionné par les Chambres, est demeuré sans exécution. L'art. 58 a été définitivement modifié par l'ordonnance du 31 octobre 1822, ainsi conçue 1:

31 Octobre.

Ordonnance du Roi, qui approuve la publication de la bulle de circonscription des quatre-vingts diocèses de France.

Louis, etc.

Sur le rapport de notre garde des sceaux, ministre secrétaire d'État au département de la justice.

Vu l'art. 2 de la loi du 4 juillet 1821;

Notre conseil d'État entendu,

Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :

Art. 1er. La bulle donnée à Rome, le 10 octobre 1822, concernant la circonscription des diocèses, est reçue et sera publiée dans le royaume.

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Voyez, au surplus, la première note du Concordat, p. 90, et le chap. V, de la circonscription des diocèses.

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