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Les cas d'abus sont : l'usurpation ou l'excès de pouvoir 1, la contravention aux lois et règlements de la république, l'infraction des règles consacrées par les canons reçus en France, l'attentat aux libertés, franchises et coutumes de l'Église gallicane, et toute entreprise ou tout procédé qui, dans l'exercice du culte, peut compromettre l'honneur des citoyens, troubler arbitrairement leur conscience, dégénérer contre eux en oppression ou en injure, ou en scandale public 2.

■ Aux termes de l'art. 6 de la loi du 18 germinal an X, il n'y a lieu au recours comme d'abus que contre les actes qui émanent exclusivement des supérieurs ecclésiastiques; le refus du roi d'agréer une nomination faite par l'évêque, et l'agrément donné à une seconde nomination, sont des actes qui appartiennent à l'exercice des droits de la couronne, et qui ne peuvent être attaqués par la voie contentieuse. (Arrêt du conseil d'Etat, 16 février 1826.) Les desservants sont révocables par l'évêque diocésain. Cette révocation ne peut donner lieu à un appel comme d'abus. (28 octobre 1829, arrêt du conseil d'Etat. Sirey, 80, 2, 40.)

• Le délit de diffamation commis par un prêtre dans l'exercice de ses fonctions, par exemple, en chaire, est réputé abus de fonctions ecclésiastiques. (Arrêt de la C. de cass., du 28 mars 1828.)

La diffamation commise par un prêtre dans une allocution par lui adressée de la barrière du choeur à ses paroissiens, à l'occasion de ses fonctions, et immédiatement après la bénédiction de l'eau et la procession qui précèdent la célébration de la messe, est réputée abus de fonctions ecclésiastiques. La bénédiction et la procession font partie de l'office divin. (Arrêt de la Cour de Rouen, du 17 octobre 1828. Sirey, tom. 28, part. 2, pag. 333.)

Il y a abus dans le mandement d'un évêque qui ordonne la lecture et la publication d'un bref du pape, sans l'autorisation préalable du gouvernement. (Arrêt du conseil d'Etat, du 26 octobre 1820.)

Il peut y avoir abus dans la lettre pastorale d'un évêque, qui contiendrait des dispositions contraires aux lois du royaume.

Les évêques n'ont point le droit de proposer au gouvernement, par la voie des lettres pastorales, les innovations ou changements qu'ils croient utiles à la religion. (Arrêt du conseil d'Etat, du 10 juillet 1824.)

Le refus d'administrer le baptême à un enfant, sur le motif que la conduite de la personne par qui il est présenté est contraire aux mœurs, peut, dans certaines circonstances, donner lieu à porter devant le conseil d'Etat un appel comme d'abus. (Arrêt du conseil d'Etat du 11 janvier 1829. Sirey, 29, 2, 50.)

Lorsque le desservant n'a pas refusé le sacrement du baptême, mais qu'il a refusé seulement d'admettre les parrain et marraine présentés par le père, celui-ci n'est pas fondé à se pourvoir devant le conseil d'Etat, en appel comme d'abus. Quant au refus de recevoir tels individus comme parrain et

7. Il y aura pareillement recours au conseil d'État, s'il est porté atteinte à l'exercice public du culte et à la liberté

marraine, le recours compète seulement à ceux-ci, et non au père de l'enfant présenté au baptême. (Arrêt du conseil d'Etat, du 17 avril 1825. Macarel, 1825, pag. 457.)

Le refus public de sacrement, quand il n'est accompagné ni de réflexions ni d'injures, est un fait qui doit être déféré à l'autorité ecclésiastique.

Il n'y a pas lieu, dans ce cas, de la part du conseil d'Etat, à autoriser des poursuites en diffamation, contre les prêtres, devant les tribunaux. (Arrêt du conseil d'Etat, du 16 décembre 1830.)

Le refus de confession, quand il n'est pas accompagné d'injure publique, est un fait qui doit être déféré à l'autorité ecclésiastique, mais qui ne peut donner lieu à un appel comme d'abus.

Au cas de refus de sépulture par un prêtre, pour apprécier s'il y a abus, il faut distinguer ce qui touche aux prières et cérémonies religieuses, et ce qui touche à l'inhumation proprement dite. Quant aux prières et cérémonies, il est entièrement facultatif au prêtre de les accorder ou refuser; sous ce rapport, il ne peut y avoir abus. Mais à l'égard de l'inhumation ou du dépôt des corps dans le cimetière, la police des cimetières étant exclusivement dans les attributions de l'autorité municipale, l'opposition du prêtre à ce que le corps soit placé dans l'endroit désigné par l'autorité compétente, ou l'action de le faire déposer dans un endroit inconvenant ou non bénit, constitue un abus susceptible d'être réprimé. (Lettre du ministre de l'intérieur des PaysBas au gouverneur de Liége, 8 déc. 1828. Sirey, 29, 2, 47.)

La suppression par le curé d'une congrégation religieuse établie dans une paroisse, ne peut donner lieu à un appel comme d'abus.

L'invitation faite par un prêtre en chaire, à ses paroissiens, de ne plus envoyer leurs enfants à une école non autorisée, ne peut motiver un appel comme d'abus de la part du directeur de l'école.

Toute diffamation dont un prêtre se rend coupable hors l'exercice de ses fonctions, ne peut donner lieu à un appel comme d'abus. (Arrêt du conseil d'Etat, du 28 mars 1831.)

Il n'y a pas abus ecclésiastique quand un curé enjoint publiquement à un fidèle, pendant l'office des vêpres, de quitter la place qu'il occupait dans l'église et le costume qu'il portait comme membre d'une confrérie formée dans la paroisse. (Arrêt du conseil d'Etat, du 7 août 1829.)

Quand un particulier a payé volontairement à un curé des droits de sépulture au delà du tarif, il ne peut se pourvoir par appel comme d'abus devant le conseil d'Etat, ni solliciter l'autorisation de poursuivre le curé comme concussionnaire.

La cession faite par une fabrique à un curé, de tous ses droits dans les inhumations et services funèbres, ne peut motiver de la part d'un particulier que cette cession ne blesse pas, un appel comme d'abus. (Arrêt du conseil d'Etat, du 4 mars 1830.)

Il n'y a pas abus de la part d'un prêtre qui, appelé pour administrer les sacrements à un malade, se fait remettre volontairement par la famille divers

que les lois et les règlements garantissent à ses ministres 1. 8. Le recours compétera à toute personne intéressée. A défaut de plainte particulière, il sera exercé d'office par les préfets.

Le fonctionnaire public, l'ecclésiastique ou la personne qui voudra exercer ce recours, adressera un mémoire détaillé et signé, au conseiller d'État chargé de toutes les affaires concernant les cultes 3, lequel sera tenu de prendre, dans le plus

livres, parce qu'il les trouve mauvais et dangereux. (Arrêt du conseil d'Etat, du 26 août 1829.)

L'abus contenu dans une ordonnance épiscopale, et qui consistait à avoir pris pour base de cette ordonnance les prescriptions d'une bulle non reçue dans le royaume, est couvert, lorsqu'une ordonnance postérieure révoque la précédente, et ne fait plus mention d'aucune bulle non reçue par le gouvernement. (Arrêt du conseil d'Etat, du 14 juillet 1824.)

Voyez notes sur les art. 1, 8, 15 et 19.

'C'est-à-dire, si un officier civil abusait de son autorité pour vexer les ministres du culte dans l'exercice de leurs fonctions, ou pour s'arroger des droits qu'il n'a pas sur les matières spirituelles. Quant aux indécences dans les temples, aux coups, aux menaces et autres voies de fait que des particuliers peuvent se permettre, ou contre les ministres, ou contre les objets du culte, ce sont des délits qui doivent être punis conformément aux dispositions des lois pénales, correctionnelles ou criminelles. (Note de M. le comte Portalis, premier président de la C. de cass.)

Une rue doit être considérée, pendant le passage d'une procession, comme un lieu servant actuellement à l'exercice du culte, dans le sens de l'art. 291 du Code pénal. (Tribunal correctionnel d'Étampes, du 22 juin 1831.)

L'art. 5 de la loi du 26 mai 1819, qui ne permet au ministère public de poursuivre les faits de diffamation ou d'injures publiques dirigées contre les agents de l'autorité publique et contre les particuliers, que sur la plainte de la partie lésée, n'est pas applicable au cas d'outrages (publics ou non publics) commis envers un ministre du culte, dans l'exercice de ses fonctions: ce délit, prévu par l'art. 262 du Code pénal, peut être poursuivi d'office par le ministère public.

Il en serait autrement des outrages adressés à un ministre du culte, sculement à raison de ses fonctions: la poursuite de ce délit, puni par l'art. 6 de la loi du 22 mars 1822, est subordonnée à la plainte. (Arrêt de la C. de cass., du 10 janvier 1833. Sirey, 33, 1, 218.)

Voyez les art. 257, 290 et suivants du Code pén.; lois des 18 novemb. 1814, 17 mai 1819, 25 mars 1822, 20 avril 1825, et 11 octobre 1830.

• La demande doit être déclarée non recevable jusqu'à ce que ce préalable ait été rempli. (Arrêt du conseil d'Etat, du 31 juillet 1822; Macarel, 1822, pag. 117.)

3 Aujourd'hui le ministre de la justice et des cultes.

court délai, tous les renseignements convenables; et, sur son rapport, l'affaire sera suivie et définitivement terminée dans la forme administrative, ou renvoyée, selon l'exigence des cas, aux autorités compétentes 1.

On trouve dans ces dispositions relativement aux fonctionnaires publics ecclésiastiques, l'équivalent de celles que renferme l'art. 75 de l'acte constitutionnel de l'an VIII, quant aux agents du gouvernement. Toutes les fois que l'on a à se plaindre d'un fonctionnaire ecclésiastique pour des faits relatifs à ses fonctions, la voie du recours est la scule qui soit ouverte, et les tribunaux ne peuvent être saisis qu'après qu'il a été décidé par le conseil d'Etat, si l'affaire est de sa nature administrative ou judiciaire. (Note de M. le comte Portalis.)

Lorsqu'un ministre du culte est inculpé pour un fait qualifié délit, mais qui serait un acte de fonctions ecclésiastiques, quelque dommageable que cet acte soit d'ailleurs, fût-il même une diffamation en chaire, la justice ne peut voir là qu'un abus de fonctions ecclésiastiques. C'est pourquoi elle doit s'interdire des poursuites directes contre l'ecclésiastique. Il y a plus, le plaignant lui-même est obligé d'en référer préalablement au conseil d'Etat, pour que l'affaire soit terminée administrativement, s'il y a lieu, ou pour que le conseil d'Etat autorise le plaignant de faire des poursuites. (Voy. loi du 20 août 1810; arrêt de la C. de cass., du 25 août 1827. Sirey, 28, 1, 22. D. 25, 1, 478. L. 80, 312.)

Ainsi, lorsqu'un fait pouvant constituer une diffamation, est émané d'un curé dans l'exercice de ses fonctions sacerdotales, le conseil d'Etat est seul compétent pour connaître de la contestation qui peut en être la conséquence. (Jugement du tribunal civil de Paris, du 6 mai 1829.)

L'autorisation du gouvernement, nécessaire par préalable à toute action en décision contre un ministre du culte pour tout dit ou tout fait dommageable, doit être demandée par la voie du ministre des cultes, et obtenue sur son rapport: il ne faut pas s'adresser directement au conseil d'Etat. (19 mars 1817. Arrêt du Conseil. Sirey, tom. 21, 2, 338.)

Un curé, ou autre ecclésiastique qui aurait proféré des injures en chaire, ne peut être traduit sans une autorisation du conseil d'Etat, aux termes de a loi du 18 germinal an X. Une lettre d'excuses, écrite par cet ecclésiastique, est une réparation suffisante pour que le conseil d'Etat n'autorise pas la mise en jugement. (Sirey, tom. 4, pag. 302.)

Le particulier qui se prétend lésé par un fait ou par tout autre, que la loi qualifie d'abus ecclésiastique, ne peut poursuivre devant les tribunaux l'ecclésiastique inculpé, sans recours préalable au conseil d'Etat, et sans autorisation. (Arrêts de la Cour de Nancy, du 28 mars, et de la Cour royale de Rouen, du 27 octobre 1828. Sirey, 28, 2, 333.)

De même, quand un paroissien prétend avoir été insulté par un curé dans l'exercice de ses fonctions, il doit obtenir l'autorisation du conseil d'Etat pour poursuivre le prêtre devant les tribunaux. (Arrêt du conseil d'Etat, du 28 octobre 1329.)

Il y a abus lorsqu'il est constaté qu'un prêtre s'est fait remettre des valeurs,

TITRE DEUXIÈME.

Des Ministres.

SECTION PREMIÈRE.

Dispositions générales.

9. Le culte catholique sera exercé sous la direction des archevêques et évêques dans les diocèses, et sous celle des curés dans leurs paroisses.

même pour les transmettre à des tiers; mais le fait de cette remise ne suffit pas pour autoriser une poursuite criminelle. (Arrêt du conseil d'Etat, du 25 novembre 1829.)

Quand un prêtre a rétracté devant son évêque, et s'est engagé à rétracter publiquement, les discours qu'il aurait tenus en chaire contre le gouvernement, il n'y a pas lieu d'autoriser contre lui des poursuites devant les tribunaux. Le prêtre qui refuse toute rétractation, doit être poursuivi devant les tribunaux. (Arrêt du conseil d'Etat, du 16 décembre 1830.)

Telle était la jurisprudence; mais depuis la Charte de 1830, elle s'est modifiée. La question s'est plusieurs fois présentée de savoir si les ministres des cultes étaient des fonctionnaires publics, et s'ils pouvaient être poursuivis directement, et sans qu'il fût besoin d'autorisation préalable du conseil d'Etat, pour tous les crimes et délits par eux commis dans l'exercice des actes de leur ministère.

La Cour royale de Poitiers, par arrêt du 13 janvier 1831, et la Cour royale de Paris, par arrêt du 27 mai même année, avaient décidé que l'autorisation était indispensable. Mais cet arrêt a été cassé par un autre arrêt de la C. de cass., du 23 juin 1831. D'après ce dernier arrêt, l'autorisation du conseil d'Etat est déclarée n'être plus nécessaire.

Le conseil d'Etat a jugé de même, que toute diffamation dont un prêtre se rendait coupable hors l'exercice de ses fonctions, ne pouvait donner lieu à un appel comme d'abus; que dans ce cas l'autorisation préalable n'était pas nécessaire pour poursuivre le prêtre devant les tribunaux correctionnels. (Arrêt du conseil d'Etat, du 28 mars 1831.)

Il semble donc que les appels comme d'abus doivent toujours être portés au conseil d'Etat; mais que sa compétence est limitée aux seuls actes du prêtre constitutifs d'abus, et qu'elle ne s'étend point aux faits qualifiés de crimes et délits, dont le prêtre se serait rendu coupable dans l'excrcice de ses fonctions. (Jugement du tribunal correctionnel de Libourne, du 16 juin 1833.)

Aux termes des art. 10 et 18 de la loi du 20 avril 1810, sur l'ordre judiciaire et l'administration de la justice, si des archevêques, évêques ou présidents de consistoires sont prévenus de délits de police correctionnelle, ils ne peuvent être jugés que par les Cours royales et suivant le mode indiqué par l'art. 479 du Code d'instruction criminelle; s'ils sont accusés de faits emportant peine afflictive ou infamante, ils ne peuvent être traduits que devant la Cour d'assises du lieu où réside la Cour royale.

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