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fant fa courfe

il ne rencontre

que des Campagnes ruïnées, & des contrées defertes.

Je ne ferois pas

fâché, Usbek,

de voir une Lettre écrite à Madrid par un Efpagnol qui voyageroit en France je crois qu'il vangeroit bien fa Nation quel vafte champ pour un homme flegmatique & penfif! Je m'imagine qu'il commenceroit ainfi la defcription de Paris.

Il y a ici une Maison où l'on met les fous on croiroit d'a bord qu'elle eft la plus grande de la Ville non, le reméde eft bien petit pour le mal. Sans doute que les François extrêmement décriez chez leurs voifins, enferment quelques fous dans une maison, pour perfuader que ceux qui font dehors ne le font pas.

Je

Je laiffe-là mon Espagnol.Adieu, mon cher Usbek.

A Paris le 17. de la Lune de Sapbar 1715.

LET

LETTRE LXVI.

USBEK à RHE DI.

A Venife.

LA plûpart des Législateurs ont

été des hommes bornez, que le hazard a mis à la tête des autres, & qui n'ont préfque confulté que leurs préjugez, & leurs fantaifies.

Il femble qu'ils ayent méconnu la grandeur & la dignité même de leur ouvrage : ils fe font amufez à faire des inftitutions puériles, avec lesquelles ils fe font à la vérité conformez aux petits esprits mais décréditez auprès des gens de bon fens.

Ils fe font jettez dans des détails inutiles: ils ont donné dans des cas particuliers; ce qui mar

que

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que un genie étroit, qui ne voit les chofes que par parties & n'embraffe rien d'une vuë generale.

Quelques-uns ont affecté de fe fervir d'une autre Langue que la vulgaire; chofe abfurde par un faifeur de Loix : comment peuton les obferver, fi elles ne font pas connuës?

Ils ont fouvent aboli fans neceffité celles qu'ils ont trouvées établies; c'est-à-dire qu'ils ont jetté les Peuples dans les defordres infeparables des changemens.

I eft vrai que par une bifarrerie qui vient plûtôt de la nature que de l'efprit des hommes il eft quelquefois neceffaire de changer certaines Loix. Mais le cas eft rare; & lorfqu'il arri, ve, il n'y faut toucher que d'une main tremblante on y doit obferver tant de folemnitez, & apporter tant de précautions, que Tome. II. B le

le peuple en concluë naturellement que les Loix font bien faintes, puifqu'il faut tant de formalitez pour les abroger.

giciennes

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Souvent ils les ont faites trop fubtiles, & ont fuivi des idées Loplûtôt que l'Equité naturelle. Dans la fuite elles ont été trouvées trop dures; & par un efprit d'équité, on a cru devoir s'en écarter: mais ce remede étoit un nouveau mal. Quelles que foient les Loix il faut toûjours les fuivre, & les regarder comme la confcience publique, à laquelle celle des particuliers doit fe conformer toûjours.

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Il faut pourtant avouer que quelques-uns d'entr'eux ont eu une attention, qui marque beau coup de fageffe; c'eft qu'ils ont donné aux peres une grande autorité fur leurs enfans rien ne foulage plus les Magiftrats; rien ne dégarnit plus les Tribunaux ; rien

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