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Bienfaiteur des jardins ainsi que du langage,
Le premier sur les eaux suspendit ton ombrage:
A peine le passant voit ce tronc respecté,
La rame est suspendue, et l'esquif arrêté;

Et même en s'éloignant, vers ce lieu qu'il adore
Ses regards prolongés se retournent encore.
Mon sort est plus heureux; par un secret amour
Près de ces bois sacrés j'ai fixé mon séjour.
Eh! comment résister au charme qui m'entraîne ?
Par plus d'un doux rapport mon penchant m'y ramène.
Le chantre d'Ilion fut embelli par toi ;

Virgile, moins heureux, fut imité par moi.
Comme toi, je chéris ma noble indépendance;
Comme toi, des forêts je cherche le silence.
Aussi, dans ces bosquets par ta muse habités,
Viennent errer souvent mes regards enchantés :
J'y crois entendre encor ta voix mélodieuse;
J'interroge tes bois, ta grotte harmonieuse;
Je plonge sous sa voûte avec un saint effroi,
Et viens lui demander des vers dignes de toi.
Protége donc ma muse; et si ma main fidèle
Jadis à nos Français te montra pour modèle,

Inspire encor mes chants; c'est toi dont le flambeau

Guida l'art des jardins dans un chemin nouveau :
Ma voix t'en fait hommage, et, dans ce lieu champêtre,
Je viens t'offrir les fleurs que toi-même as fait naître.

FIN DU TROISIÈME CHÂNT.

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Il laisse hors des murs sa cohorte guerrière;
Il porte dans l'enceinte un pas religieux
Et craint de profaner le calme de ces lieux.

POËME.

QUATRIÈME CHANT.

NoN, je ne puis quitter le spectacle des champs.
Eh! qui dédaignerait ce sujet de mes chants?
Il inspirait Virgile, il séduisait Homère,
Homère, qui d'Achille a chanté la colère,
Qui nous peint la terreur attelant ses coursiers,
Le vol sifflant des dards, le choc des boucliers,
Le trident de Neptune ébranlant les murailles,
Se plaît à rappeler, au milieu des batailles,
Les bois, les prés, les champs; et de ces frais tableaux
Les riantes couleurs délassent ses pinceaux:
Et lorsque pour Achille il prépare des armes,
S'il y grave d'abord les siéges, les alarmes,
Le vainqueur tout poudreux, le vaincu tout sanglant,
Sa main trace bientôt, d'un burin consolant,

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