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a reconnu depuis, que cette oppofition étoit dué à une différence dans l'action de l'eau bouillante fur le verre, à raifon des espèces de verre qu'on employoit. Des Chimiftes célebres foutienner actuellement des opinions directement oppofées fur la nature de l'acier; l'un, dit qu'on convertit le fer en acier en lui donnant du phlogistique; l'autre prétend au contraire que le procédé de la cémentation enleve au fer une portion de ce même phlogiftique (1). L'un & l'autre appuient leur opinion de l'expérience; & comme cette difcuffion eft d'une affez grande importance dans la pratique des arts, elle mérite des recherches plus approfondies.

A ces exemples, je vais joindre un fait qui me touche d'affez près. Le Rev. Dr. Hales (2) dont les travaux étoient toujours dirigés vers le bien de l'humanité, découvrit que certains mêlanges fermentés avoient la propriété de diffoudre le calcul de la veffie. Mais il reconnut qu'il étoit impoffible d'employer directement ce remede par la voie d'injection, & il donna le détail de fes expériences, furtout dans le but d'engager d'autres phyficiens dans cette recherche éminemment utile. Perfonne cependant

(1) Notre auteur auroit pû renforcer fon argument en fuppofant ce qui eft poffible & même probable; c'eft que l'un & l'autre des deux antagonistes foient dans l'erreur. (R)

(2) Auteur de la Statique des Végétaux. (R)

ne s'en occupa, & les expériences de Hales étoient prefqu'oubliées lorfque l'attention publique fut réveillée fur cet objet par les écrits de plufieurs favans fur les propriétés & les ufages des airs factices. En 1774 le Dr. Saunders médecin de Londres, fort inftruit en chimie reprit les expériences de Hales, & trouva que l'action diffolvante des liqueurs fermentées provenoit uniquement de l'air fixe qu'elles contenoient. Lorfque j'eus quelque connoiffance de cette découverte, la curiofité & l'humanité m'engagerent à porter mes recherches de ce côté; je me rappelai que le Dr. Black & Mr. Cavendish avoient prouvé que diverfes fubftances terreufes étoient folubles dans l'eau par l'intermede de l'air fixe qu'elles contien nent; & comme le calcul humain eft attaqué par l'eau de chaux & l'alkali cauftique, à raifon de l'extrême affinité de ces fubftances avec l'air fixe, il me parut extrêmement probable que le même effet auroit lieu à l'aide d'agents chimiques qui tendroient à augmenter la proportion de l'air fixe dans le calcul. L'a--nalogie favorifoit cette hypothefe, & une fuite d'expériences que je fis avec le plus grand foin la confirma de la maniere la plus pofitive. Deux ans après, le Dr. Falconer entreprit les mêmes recherches; & fes résultats coinciderent exactement avec les miens. Les travaux fubféquens des Drs. Priestley & Hulme renfor

cerent encore les mêmes conféquences: rien de plus décifif en apparence: cependant un de mes amis, habile phyficien & manipulateur exact, m'affure que d'après fes expériences fur le calcul, cette fubftance réfifte conftamment à l'action de l'eau imprégnée d'air fixe. Il ajoute qu'aucune de ces pierres, analyfées, ne lui a paru contenir un feul grain de terre absorbante, mais qu'elles font compofées en entier de matiere inflammable ainfi que les calculs biliaires. Le Dr. Heberden m'a fourni les mêmes renfeignemens fur leur analyse. D'autre part, j'ai montré avec évidence que ces calculs varient dans leur nature & leur compofition; qu'il y en a que l'action du feu convertit en chaux vive; que d'autres fe confument en entier; & qu'une troifieme variété laiffe après la combuftion, un réfidu infipide & infoluble dans l'eau (1). Que conclure de faits en apparence auffi contradictoires? feulement cette leçon falutaire; c'eft qu'un phyficien doit éviter la tentation de dogmatifer; qu'il peut fe tromper lors même que, l'évidence lui paroît, en quelque forte, intuitive; & que des différences inapperçues dans les objets de nos recherches peuvent expofer la vérité même, à une évidence contradictoire (2).

(1) Philofoph. Medic. & Experim. Effays, vol. III. pag. 171. (A)

(2) Ces réflexions s'appliquent d'une maniere frap

Il n'eft pas de difpofition plus défavorable aux recherches phyfiques, que l'empreffement

pante aux travaux du Dr. Beddoës dont nous avons rendu compte en grand détail. Nous apprenons qu'il rejete maintenant la théorie qui l'avoit guidé dans fes utiles recherches. Mais remarquons que la théorie n'eft en pareille matiere, qu'un acceffoire, & un stimulant pour le Phyficien; les faits demeurent, & c'est l'effentiel. Ces guérifons fi remarquables obtenues par la médecine pneumatique ont attiré l'attention générale ; & ouvert une carriere d'effais qui peuvent devenir bien précieux à l'humanité. La Société établie à Geneve pour l'avancement des Arts s'eft empreffée de fournir aux Médecins de notre pays les moyens d'employer ces reffources nouvelles; elle a chargé une commiffion de fon corps de faire construire en grand tous les appareils néceffaires à la production & à l'emploi des gaz. Mr. PAUL, Membre de cette commiffion " a établi ces appareils chez lui, à fes frais, & a ajouté aux moyens du Dr. Beddoës ceux qui lui font particuliers pour imprégner l'eau, avec abondance, d'un gaz quelconque. La célébrité qu'ont acquife fes eaux minérales artificielles fait preuve de l'efficacité de ces moyens; & ce fera fans doute multiplier très - avantageufement les reffources de la médecine que d'offrir aux gens de l'art les gaz à employer, à leur choix, ou par la refpiration, ou unis à l'eau & introduits avec elle dans toutes les voies alimentaires. Ces appareils font en pleine activité.

On nous mande de Paris, que d'après la connoiffance qu'on y a puifée dans notre Recueil, de ces nouveaux moyens curatifs, l'Inftitut National a chargé

à former des fyftemes, & l'impatience de cer tains amateurs lorfqu'ils obtiennent des réfultats différens de ceux qu'ils attendoient, & quelquefois même contradictoires. Bacon a trèsbien dit que celui qui commencé par la certi»tude, finira par douter; mais que s'il fe con»tente de commencer par le doute, il arri» vera à la certitude. Les progrès de la fcience font ordinairement lents & gradués; & pref que toujours ce n'eft pas le lievre qui atteint le premier le but, mais la patiente & perfévérante tortue. Un homme dont le caractere eft ardent & l'imagination fertile s'engage pour l'ordinaire avec une forte d'impétuofité dans les recherches phyfiques; & s'il tombe par hafard fur quelques faits importans, il bâtit incontinent & fupplée à ce qui lui manque, avec des hypothefes & des conjectures. Mais qu'il rencontre dans fon travail des phénomenes quile dérangent, il fe dégoûtera promptement de l'étude de la Nature; & prétendra que tout eft incertitude, parce qu'il a eu la mortification de fe tromper. Ce genre de fcepticisme, fondé fur l'orgueil & l'indolence, s'oppofe également à la fpéculation & à l'action. Aucune partie des connoiffances humaines n'eft exempte de

les claffes de Médecine & de Chimie de répéter les effais du Dr. Beddoës, & de lui rendre compte de leurs réfultats. (R)

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