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deux métaux. Voici les expériences qui autorifent cette conclufion.

Premiere Expérience. Soixante grains d'étain

furent mêlés à 12 onces d'or fin en fufion; pur & le mêlange, après avoir été duement remué fut coulé dans un moule de fable en une barre plate, large d'un pouce, & épaiffe d'un huitieme de pouce. La barre parut faine & bonne ; elle fupporta d'être applatie fous le marteau; on la fit paffer plufieurs fois dans un grand laminoir, & on la coupa en pieces circulaires de près d'un pouce de diametre, qui fupporterent l'action ordinaire du balancier fans montrer le moindre figne de fragilité, ou plutôt, avec une ductilité qui parut égale à celle de l'or pur.

Exp. II. On mêla 90 grains du même étain avec 12 onces d'or fin, en procédant, à d'autres égards, comme ci-deffus. Il fut à peine poffible de diftinguer ce lingot du précédent; & il fupporta auffi bien que lui toutes les opé rations dont on a parlé.

Exp. III. On mêla 120 avec 12 onces d'or fin, &

grains d'étain fin en procédant tou

jours de la même maniere, on eut un lingot qui parut un peu plus pâle & plus dur que le précédent, mais qui foutint très-bien les mêmes opérations; excepté que, fous le laminoir, les bords du barreau parurent difpofés à fe gercer.

Exp. IV. On mêla de même 240 grains, ou demi-once d'étain en grains avec 12 onces d'or

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fin. Le lingot, qui réfulta de ce mêlange fut trouvé parfaitement fain & bon; mais évidemment plus pále & plus dur qu'aucun des précédens, & plus difpofé encore que le dernier à fe gercer fous le laminoir; mais il fupporta toutes les autres opérations, en y comprenant l'action du balancier, fans paroître en fouffrir.

Exp. V. Enfin, on mit une once d'étain avec 12 onces du même or qu'on avoit employé cidevant, & on coula ce mêlange de la même maniere. Le lingot obtenu, quoique folide & bon en apparence avoit une mauvaife couleur, il paroiffoit fragile dans fa texture; & effec_ tivement à fon premier paffage entre les rouleaux du laminoir, il fe fendit en plufieurs morceaux; & l'on n'effaya pas d'autres proportions.

Exp. VI. Pour éprouver fi les vapeurs de l'étain mifes en contact avec l'or n'auroient pas plus. d'effet que le mêlange du métal en nature, on mit un petit creufet rempli d'or à 22 karats, dans un creufet plus grand qui renfermoit une once d'étain fondu. On tint les deux métaux en fufion pendant près de demi-heure, aprèsles avoir couverts d'un creufet renverfé. On trouva au bout de ce temps un bon quart de l'étain calciné; mais l'or ne fut point altéré, & il parut auffi ductile qu'une autre portion du même or, fondu à la maniere ordinaire.

On pouroit demander fi dans chacun de ces effais l'étain n'avoit point été détruit en

tout ou en partie, de maniere à tromper fur le réfultat: mais comme dans toutes les expériences on ne trouva pas plus de 6 à 8 grains de déficit après la fonte, & comme l'or fin lui-même éprouve toujours quelque déchet. on peut négliger cette confidération dans les effais qui précedent.

Ces expériences paroiffent donc montrer que le mêlange de l'étain n'eft pas auffi nuisible à l'or qu'on l'a cru généralement mais on auroit tort d'en conclure que le premier auteur de cette doctrine (d'après lequel tant d'autres ont parlé implicitement) l'avoit hafardée fans fondement, L'or & l'étain font fans doute des fubftances affez bien connues, mais il eft aifé d'imaginer qu'on aura pu prendre, d'une part des monnoyes & des bijoux, & de l'autre de l'étain impur, ou peut-être le mélange d'étain, & de plomb appelé Pewter; & il eft difficile de deviner quels auront été les réfultats d'un alliage dont les ingrédiens étoient mal connus." C'est pour obtenir quelques données à cet égard, que les expériences furent continuées comme fuit.

Exp. VII. Pour découvrir fi une chaleur plus forte que celle de la fufion ordinaire combineroit plus intimément les deux métaux, & fi la maffe n'en deviendroit point plus fragile, on fondit de nouveau l'alliage d'or & d'étain obtenu dans la premiere expérience, & on le

tint en fufion dans un feu plus violent pendant une bonne demi-heure. Il ne fe perdit que le poids de 6 grains dans cette opération, & le lingot lorsqu'il fut refroidi parut tout aufli malléable qu'auparavant.

Exp. VIII & IX. On refondit féparément les alliages d'or & d'étain provenant de la feconde & quatrieme expérience, & l'on ajouta à chacun une once de cuivre. Après avoir bien remué le mêlange on le coula comme les précédens; les lingots, quoique fenfiblement plus durs, fupporterent comme auparavant toutes les opérations. Le dernier lingot fe gerça un peu fur les bords en paffant au laminoir, comme il l'avoit fait fans l'addition du cuivre ; mais cette gerçure étoit peu confidérable, & le métal paroiffoit fe laiffer couper mieux que dans fon premier état.

Exp. XXI. On prit un quart d'once du dernier mêlange (demi-once d'étain, une once de cuivre, & 12 onces d'or), & la même quantité du lingot produit par la 3o. expérience; (120 grains d'étain fur 12 onces d'or) on les fit fondre féparément par un orfevre, à la maniere la plus ordinaire, avec un feu de charbon de pierre. Ces alliages furent coulés en petits boutons, fans perte fenfible de poids. L'orfevre les forgea enfuite en petites barres en les recuifant, ou adouciffant fouvent à la flamme d'une lampe; l'on fit enfuite paffer cha

cune d'elles environ 20 fois par les trous d'une filiere, jufqu'à l'état de fil très-fin, cette opération fut faite auffi aifément qu'avec l'or ordinaire.

Exp. XII. Pour rechercher fi l'addition de l'étain à l'or déjà allié auroit quelqu'influence, on mèla 60 grains d'étain avec 12 onces d'or à 22 karats; l'alliage fupporta toutes les opérations dont on a parlé, fans paroître avoir fouf fert le moins du monde du mélange de l'étain.

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Pour plus de certitude on fit plusieurs autres effais avec divers mêlanges de cuivre, d'étain, & d'argent, avec l'or; jufqu'au point de mettre dans 12 onces d'or, 2 onces & demi de cuivre, & une demi-once d'étain. Tous ces alliages fupporterent l'action du marteau, & celle des laminoirs jufques à l'épaiffeur d'une feuille de papier fort. On les trouva enfuite fufcep tibles d'être travaillés en boîtes de montres pommeaux de cannes, &c. avec une grande facilité; ils devinrent tous, à la vérité, d'autant plus durs & moins ductiles qu'ils contenoient plus de métal étranger, mais aucun de ces alliages n'offrit l'apparence de ce que les ouvriers, pomment aigre, ou fragile. On pourroit ce femble conclure de-là que ce n'eft ni l'étain en fubftance ni la vapeur de ce métal qui rendent Por difficile à travailler.

Lors donc qu'on a vu que l'or fin devenoit fragile par l'addition de petites quantités d'étain,

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