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du globe font bien connus. Ce fut à l'ère de Nabonaffar que l'on commença en Chal dée les premieres obfervations régulieres qui ayent mérité l'attention des fiecles fuivans. La curiofité des Grecs fe porta bientôt fur le même objet; & ce peuple ingénieux fut le premier qui effaya d'expliquer par l'ensemble d'une théorie les phénomenes qu'on obferve dans les cieux. On confidera cet ouvrage comme tellement achevé dans la fyntaxe de Ptolémée que fon fyftême dirigea pendant plus de 500 ans, les Aftronomes d'Egypte, d'Italie & de Grece. Aprés que les Sciences eurent été bannies d'Alexandrie, les écrits de cet Aftronome pafferent dans l'Orient; & fous les Califes de Bagdad, l'Aftronomie fut cultivée avec affiduité & fuccès, Les Princes Perfans fuivirent l'exemple des Califes, & emprunterent à Trébizonde les connoiffances mathématiques échappées aux ruines de l'Empire des Grecs. Les conquêtes de Gengis & enfuite celles de Timour, retarderent, mais ne fufpendirent pas les progrès de l'Aftronomie dans l'Orient. Les petits-fils de ces deux Conquérans furent également célebres par leur amour pour la fcience: Ulagu rétablit l'Aftronomie en Perfe, & Ulug-Beigh, par un effort encore plus fingulier, l'établit en Tartarie. Cette Science ayant paffé, à cette époque, en Espagne avec les Arabes, elle trouva encore dans Alphonfe de Caftille un difciple & un Patron.

Bientôt après elle fut portée au Nord de l'Eu rope, où, après avoir exercé le génie de Copernic, de Kepler & de Newton', elle eft devenue la plus fublime & la plus parfaite des Sciences.

Dans les progrès qu'a fait ainfi l'Aftronomie chez prefque toutes les Nations, depuis le fleuve Indus jufqu'à la mer Atlantique, les Hiftoriens peuvent retracer tous fes pas; & il n'eft jamais difficile de déterminer ce que chaque fiecle ou chaque Nation a reçu d'une autre, & d'indiquer une à une les additions au repertoire général des connoiffances aftronomiques. Les divers fyftêmes qui ont prévalu dans tous les pays qu'on vient de défigner font visiblement liés les uns aux autres ; ils découlent tous d'un fyftême originel; & ils nous porteroient à croire que la maniere dont les hommes commencent à obferver les cieux, & à raifonner fur ce qu'ils y voient, eft une expérience fur la race humaine, qui n'a été faite qu'une fois.

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C'est donc un objet de curiofité très-piquant que de trouver au-delà du fleuve Indus, un fyfteme de connoiffances Aftronomiques qui ne paroît point appartenir à ce grand corps de Science qui a traverfé & éclairé les autres pays du monde; un fyftème pratiqué par des hommes qui fuivent fes regles fans entendre fes principes, & qui ne peuvent rendre d'autre

compte de fon origine, finon en difant, que fon antiquité remonte fort au-delà de la période à laquelle nous rapportons mème les fiecles héroïques.

On doit les premieres notions fur cette aftronomie à Mr. Laloubére qui, revenant, en 1687, d'une ambaffade en Chine, en rapporta l'extrait d'un manufcrit Siamois, qui contenoit des tables, & des regles pour calculer les lieux du Soleil & de la Lune; l'énoncé de ces règles rendoit les principes fur lefquels elles étoient fondées très-obfcurs, & il fallut un commentateur, auffi familier avec les calculs aftronomiques que l'étoit le célebre Caffini, - pour expliquer ce fragment curieux. Depuis cette époque les Miffionnaires Français envoye rent à Paris deux autres collections de tables aftronomiques; elles ne furent examinées qu'au retour de Mr. Le Gentil, qui avoit été dans l'Inde obferver le paffage de Vénus en 1769; cet Académicien chercha, pendant le long féjour qu'il fit dans ce pays, par une fuite de fon zele pour la fcience, à acquérir des connoiffances dans l'aftronomie Indienne. Les Braemines crurent voir dans les occupations d'un Aftronome, les indices qu'il appartenoit à une Cafte qui avoit quelques rapports avec la leur, & ils commencerent à s'entretenir avec Mr. le Gentil plus familièrement qu'ils ne le font avec les étrangers ordinaires. Un favant Bramine.

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de Tirvalore ayant fait une vifite à l'Aftronome Français, lui montra comment il calculoit les éclipfes de Soleil & de Lune, & lui communiqua les tables & les procédés qu'on trouve dans les Mémoires de l'Académie des Sciences de Paris pour 1772. Depuis cette époque, l'ingénieux & éloquent Auteur de l'Hiftoire de l'Aftronomie a confacré un volume entier à l'explication & à la comparaifon de ces différentes tables & il a tiré plufieurs conclufions intéreffantes. Ce fujet méritoit toute fon attention; car l'astronomie Indienne a toute la précifion requife pour réfoudre les grandes queftions fur fon origine & fon antiquité, & elle n'eft point au nombre de ces fragmens imparfaits des anciennes connoiffances, qui ne conduifent qu'à la conjecture, & que l'Aftronome abandonneroit volontiers aux recherches de l'Antiquaire ou du Mythologiste.

C'est des fources que je viens d'indiquer & en particulier c'eft des profondes recherches que renferme l'aftronomie Indienne, que j'ai tiré la fubftance du Mémoire que je préfente à la Société ; il ne renfermera donc rien de bien original; mais voici mon excufe: je dois avouer que malgré mon refpect profond pour la fcience & les talens de l'Auteur de l'Aftronomie Indienne, en commençant à étudier cet ouvrage, je le fis avec cette portion de fcepticifme, que tout ce qui eft nouveau & extraor

dinaire dans les Sciences doit toujours produire ; & je cherchai à vérifier les calculs & à examiner les raifonnemens de l'écrivain, avec l'attention la plus fcrupuleufe. J'acquis alors la conviction parfaite de l'exactitude des uns & de la folidité des autres; & j'imaginai que dans un fujet auffi varié, ce feroit peut-être un fervice à rendre à d'autres lecteurs que de mettre en évidence les conclufions qui m'avoient paru les plus frappantes. Tel eft l'objet de ces remarques; elles portent fur trois points. Dans le premier, je donne un court détail de l'Aftronomie Indienne, en tant qu'elle nous eft connue par les quatre collections de tables dont j'ai parlé; dans le fecond, j'établis les conjectures principales qu'on peut former d'après ces tables relativement à leur antiquité; & dans le troifieme, j'effaie de reconnoître les bafes géométriques fur lefquelles ce fystème est établi. Dans la premiere partie j'ai fuivi pied-à-pied Mr. Bailly; dans la feconde, quoique j'aie fouvent pris une route différente de la fienne, je fuis arrivé aux mêmes résultats en cherchant toujours à ferrer le raisonnement & à éviter tout argument qui ne fut pas purement aftronomique & indépendant de toute hypothefe; enfin, dans la troifieme, j'ai commencé à traiter une queftion qui n'entroit pas dans le plan de l'ouvrage de Mr. Bailly, en fupprimant, pour le moment, les difcuffions auxquelles elle pourroit conduire.

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