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à la mâchoire fupérieure. Il réfulte de l'organi fation particuliere de ces animaux, que la propriété de ruminer, qu'ils poffedent, leur permet de fe nourrir avec un tiers moins d'alimens qu'il n'en faut à tout autre animal de même volume. Ceux qui font le commerce des beftiaux connoiffent bien cette faculté. Elle provient de ce que ces animaux ont des organes digestifs en plus grand nombre & plus énergiques que les autres; enforte que tout ce qui peut être converti en chyle dans les alimens dont ils fe nourriffent, l'eft effectivement; d'où réfulte en particulier, une production de lait beaucoup plus abondante. L'eftomac d'une jument ou d'une âneffe n'eft point organilé de même, & il faut à ces animaux une beaucoup plus grande quantité de végétaux pour en extraire la même proportion de matière nutritive.

Le volume de l'organe qui fournit le lait eft d'une très-grande capacité: il contient jufqu'à dix quarts (1) de lait, & peut donner cette quantité deux fois par jour. Et non-feulement cette abondance eft remarquable, mais la qualité du lait l'eft auffi, car il y a telle vache dont le lait procure douze à quatorze livres de beurre par femaine. La forme & la proportion des trayons eft en parfait rapport avec la main de l'homme; leur épaiffeur permet que les con

*. (1) Le quart égale à peu-près la pinte de Paris. Sciences & Arts. Vol. 7. N°. 2. Février 1798.

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duits lactiferes foient d'un plus grand diamètre que dans d'autres animaux; & leur longueur en prolongeant le fyphon facilite d'autant l'extraction du lait.

L'existence de ces mamelons, au nombre de quatre, eft une particularité très - frappante. Leur nombre dans tous les animaux, eft toujours en rapport avec celui des nourriffons d'une portée ordinaire. On l'observe dans la chienne, la chatte, la truie, &c. Mais la vache ne met bas à chaque portée qu'un nombre de petits, analogue à celui que donnent les femelles qui n'ont que deux mamelons.

La vache fe laiffe traire auffi facilement, & continue à donner du lait auffi long-temps en l'abfence du veau, que lorfqu'on permet à celui-ci de l'approcher à volonté. Il n'en est point ainfi de l'aneffe, qui eft, après la vache, l'animal qu'on trait le plus communément dans cette partie du monde (1): car on fait bien qu'elle perd fon lait fi on la fépare tout-à-fait de fon ânon. Il eft vrai qu'elle n'eft pas de la claffe des animaux ruminans.

Il en eft de même du lait de femme. Il tarit bientôt lorfqu'on févre le nourriffon, & fa faveur fe détériore même, dans le cas où l'enfant n'eft pas mis quatre à cinq fois dans les

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(1) Il nous femble que la chêvre doit, fous ce rapport, être mife avant l'âneffe. (R)

vingt-quatre heures au fein de fa mere. Trois fois ne fuffifent pas en général, pour que cet aliment conferve toute fa perfection, & le prépare en quantité convenable. Je ne prétends pas dire cependant qu'il foit toujours impoffible d'entretenir le lait fans qu'un enfant le fuçe constamment ; je fais qu'on peut fuppléer pour quelque temps au nourriffon, par un adulte ou par de petits chiens; mais ce font là, en quelque forte, des nourriffons adoptifs. Ce que je foutiens feulement, c'eft que tous ces moyens artificiels ne remplacent jamais que pour un temps affez court la préfence de l'enfant, lors même qu'on avale le lait, & que la fuction est répétée quatre à cinq fois par jour. J'en ai l'expérience.

On dit que Capivaccius conferva la vie à l'héritier d'une grande maifon, en lui donnant deux jeunes nourrices, & leur lait pour unique aliment.

Foreftus nous apprend qu'un jeune homme de vingt-neuf ans, attaqué de marafme, fe ré. tablit entièrement avec le lait d'une nourrice de dix-huit ans qui couchoit à fes côtés. Voilà, me dira-t-on, deux exemples, dans lefquels le lait s'eft confervé fans qu'il y eût de véritable nourriffon; mais ce font là des exceptions, qui ne détruifent pas l'observation générale. On me dira que la chèvre, la brebis & la femelle du daim fe laiffent traire, & Confervent leur

lait, indépendamment de la préfence du nour riffon. J'en conviens, mais ce font là des animaux ruminans, & je les mets, à cet égard, dans la claffe de la vache.

Je crois donc qu'on peut conclure que la faculté de donner du lait fans nourriffon, véritable ou adoptif, n'appartient qu'à cette claffe d'animaux ruminans, à cornes, qui ont quatre eftomacs, le pié fourchu & la mâchoire fupérieure dénuée de dents incifives. Que la vache, la chèvre, la brebis & la femelle du daim font les feules dans ce cas. Que la vache en particulier, poffede cette faculté dans un degré plus éminent que les autres femelles, d'après fon organisation particuliere & le nombre de fes mamelons. Il y a d'autres animaux ruminans, qui ne réuniffent qu'une partie des caracteres fpécifiques dont j'ai fait l'énumération; mais je n'ai jamais ouï dire qu'ils poffédaffent la propriété de donner du lait fans nourriffon.

On me dira peut-être que les Tartares dans leurs excursions de pillage, fe fervent de jumens afin de fe nourrir de leur lait, & que, probablement, ils n'emmenent pas les poulains avec eux. Ceci ne détruit point mon obfervation; car ces excurfions font rarement affez longues pour que les femelles privées de leurs nourriffons aient le temps de perdre leur lait.

Ne fommes nous donc pas fondés à conclure que la vache a été particulièrement destinée par

la fageffe fuprême de l'Auteur de la Nature, à fournir à l'homme un aliment agréable & falubre ?

ART S.

NOTICES fur les principales fabriques du Comté d'York, tirées d'un Tour dans le Nord de l'Angleterre, par un Voyageur Anglais. (Monthly Magazine, No. 22.)

Le premier objet qui fixe l'attention du voyageur dans la ville populeufe de Leeds eft la halle aux draps, établie en faveur des Négocians qui font le commerce de ce produit principal de l'industrie du York-Shire. On ne l'ouvre que deux fois par femaine, & pendant une heurefeulement, chaque fois. Dans ce court intervalle on fait une quantité inconcevable d'affaires, avec la régularité la plus grande, & dans un filence prefque parfait. La halle est un quarré de trois cents pieds de côté. Il y a fept divifions, appelées rues, dans chacune defquelles font quatre rangées de bancs deftinés à recevoir les étoffes. Chaque banc porte le nom d'un propriétaire, & le numéro qui répond à fa place dans la halle; on peut ainsi trouver à Pinítant & l'homme & la marchandise auxquels

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